MONAMY Gabriel, Maurice (pseudo « Gaby »)

Par Joël Drogland

Né le 1er mars 1922 à Sens (Yonne), disparu le 3 février 1944 à Malay-le-Grand (Yonne) ; cultivateur ; résistant FTP (Groupe d’action immédiate).

Fils de cultivateur, Gabriel Monamy était lui aussi cultivateur à Malay-le-Grand, village proche de Sens. Il adhéra aux FTP en juin 1943. À cette époque, l’état-major départemental des FTP de l’Yonne décida de créer un groupe très particulier, dit d’action immédiate, dont il confia la responsabilité à Gabriel Monamy. Ce groupe mobile comprenait au départ trois personnes, Gabriel Monamy (« Gaby »), Lucien et Jean Paquet, auxquels se joignirent ensuite Pierre et Jean Berthélémy. Monamy dirigeait le groupe et recevait directement ses ordres de François Grillot (« Germain »), alors chef des FTP de l’Yonne.

En juillet-août 1943, leur activité s’exerça dans le Gâtinais. Ils logeaient dans des fermes toujours différentes et étaient très mobiles. Jean Paquet témoigne : « Nous ne partions pas toujours tous les cinq en mission. « Gaby » recevait les ordres : il était le chef du groupe. Nous nous déplacions beaucoup, sans nous cacher vraiment. Nous prenions de gros risques. Nos missions consistaient en sabotages, transports d’armes, éliminations de collaborateurs. Nous avons ainsi transporté sur nos bicyclettes des armes et des explosifs de Soucy à la Fourchotte. À partir de la seconde quinzaine d’août, nous nous sommes déplacés dans une Renault noire que nous avions ‘ empruntée ’ à Sens. » Le groupe fut hébergé dans la ferme d’Alfred Rondeau, maire de La Chapelle-sur-Oreuse (Yonne), au hameau de Hollard. C’est sans doute ce qui explique l’envahissement de la ferme par la police allemande, le soir du 22 septembre 1943, l’arrestation d’Alfred Rondeau, de toute sa famille et de ses ouvriers agricoles.

Ce groupe était en contact avec les membres sénonais du Bureau des Opérations Aériennes (BOA). À Sens, leur point de chute était chez Pierre Castets, dont les frères Berthélémy connaissaient les enfants. Marius Guillemand (« Étienne »), responsable du BOA arrivé à Sens à la fin de l’été 1943, avait pris le groupe sous son autorité et donnait des ordres à « Gaby », alors qu’ils appartenaient à des organisations totalement distinctes et souvent opposées. Arrêté le 13 octobre 1943 avec un responsable national du BOA près de Sens, Guillemand allait trahir très vite, devenir un agent de la Gestapo et être à l’origine de l’anéantissement de toute la résistance gaulliste sénonaise. Le 22 septembre 1943, le groupe d’action immédiate avait pour mission d’effectuer un sabotage à l’usine de filets de camouflage de La Mousse à Sens. L’après-midi de ce jour, les frères Paquet, surpris chez un coiffeur de Sens par un contrôle de police, ouvrirent le feu sur les Feldgendarmes : Lucien Paquet fut tué, mais Jean réussit à s’échapper.

Chargé de missions particulières, ce groupe est le seul de ce type ayant existé dans l’Yonne et a opéré essentiellement dans le Sénonais. Il ne fut pas remplacé après sa disparition. On ne sait pas ce que fut par la suite l’activité résistante de Gabriel Monamy. Nous n’avons pu obtenir de renseignements, y compris auprès de Robert Loffroy, qui fut recruteur régional des FTP, en charge du Sénonais, et qui d’ailleurs n’évoque pas le sujet dans ses Mémoires. Il faut dire que Gabriel Monamy disparut peu après, officiellement le 3 février 1944. Monamy fut homologué FFI le 18 mars 1947, dans la catégorie « disparu ». Le jugement déclaratif de décès établi pas le ministère des ACVG le 8 février 1949, indique qu’il est « décédé au cours d’une mission », mais ne dit rien sur ladite mission. L’historien ne dispose d’aucun autre document. Mais plusieurs entretiens avec Jean Paquet et Pierre Berthélémy, qui furent ses camarades au sein du groupe d’action immédiate, nous ont appris que la conduite et les méthodes de Gabriel Monamy n’étaient pas exemplaires, et il n’est pas sûr du tout qu’il ait été éliminé par l’ennemi. Nous avons même la conviction que ces acteurs n’ont pas voulu dire ce qu’ils savaient à l’historien qui recueillait leurs témoignages.

Le nom de Gabriel Monamy figure sur le monument aux morts de Malay-le-Grand, son village natal. Il ne figure pas sur le monument des déportés et fusillés de l’Yonne à Auxerre, alors que les responsables FTP auraient pu l’y faire inscrire, ni sur le monument aux morts cantonal de l’arrondissement de Sens. De même, Robert Bailly, pourtant ancien résistant communiste, n’a pas cru devoir inscrire son nom dans la « Liste des résistants de l’Yonne victimes du nazisme » qui se trouve à la fin d’un de ses ouvrages. Gabriel Monamy obtint la mention « Mort pour la France » (cote AC 21 P 97565).

Pour citer cet article :
https://maitron.fr/spip.php?article209727, notice MONAMY Gabriel, Maurice (pseudo « Gaby ») par Joël Drogland, version mise en ligne le 18 décembre 2018, dernière modification le 17 septembre 2020.

Par Joël Drogland

SOURCES : Service historique de la Défense, GR 16 P 425323. — Arch. dép. Yonne, 1 W 102. — Témoignages de Jean Paquet et de Pierre Berthélémy. — CDrom La Résistance dans l’Yonne, ARORY-AERI, 2004 (notice de Joël Drogland, Le groupe d’action immédiate des FTP). — Joël Drogland, Histoire de la Résistance sénonaise, ARORY, 2e édition 1998.

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