TAGNARD Paul, Joseph [pseudonyme dans la résistance : Philippe, Beranger]

Par Eric Panthou

Né le 2 janvier 1898 à Vizille (Isère), mort en déportation le 15 octobre 1944 à Flossenburg (Allemagne) ; garagiste-mécanicien pour cycles à Buis-les-Baronnies (Drôme), membre du Parti communiste (PCF) ; résistant au sein des Francs-tireurs et partisans (FTP), commandant des maquis du sud-Drôme puis commandant des opération du Gard et Commissaire aux opérations dans le Puy-de-Dôme avec le grade de lieutenant-colonel.

Fils de Pierre, cultivateur à Vizille, et de Léonie Mathieu(?), ouvrière en soie, Paul Tagnard était détenteur d’un CEP. Il épousa Lucienne Balme le 20 mai 1924 à Vizille. Il était chauffeur automobile en 1925 et vivait avec son épouse à Corbie (Somme) quand est née leur fille, Paulette, le 30 avril 1925.
Au moment de la 2éme Guerre mondiale, le couple exerçait la profession de réparateurs, vendeur, loueurs de cycles à Buis-les-Baronnies (Drôme).
Selon les témoignages de deux enfants d’anciens résistants communistes de Buis-les-Baronnies, il n’y a aucun doute sur le fait que Lulu et Polo (Lucienne et Paul Tagnard) faisaient partie du groupe des communistes du pays aux côtés de Jarnias, Reynier, Buix, Fernand Benoit, Louis Borel.
Le couple s’engagea dans les activités clandestines dès la fin de l’année 1940.
De janvier à 1941 au 9 novembre 1942, avec son épouse, Paul Tagnard fut notamment chargé de la diffusion de la presse clandestine dans le secteur. En février 1942, à Buis-les-Baronnies, Paul Tagnard et Gaby Reynier tirent un tract invitant les paysans de la région à ne pas livrer leur blé à la réquisition. Ses qualités militaires affirmées dans le combat et ses talents d’organisateur contribuèrent à le faire accéder à de hautes responsabilités.
De décembre 1942 au 30 mars 1943, il fit partie du Comité départemental FTP de la Drôme et est nommé commandant des maquis sud-Drôme avec le grade de capitaine. Il renonça à ses occupations professionnelles légales fin mars 1943. Il fit partie de ceux qui créèrent le premier maquis FTPF à Beauvoisin, dans la grotte dite "de Mandrin". Il organisa dès 1943 avec le communiste Louis Borel, avec Gaby Reynier, Aimé Buix, Bernard, Philibert, Raoul Espérandieu, Léon Desplan, d’autres également, le camp de la Fournache, sur le Linceuil, montagne immédiatement au nord de la Baume Noire, commune de Beauvoisin.
Il fut nommé à Nîmes à compter du 1er avril 1943 et prit le commandement des opérations du Gard. Il devint commandant et dirigea les opérations du département en étant membre du Comité militaire départemental FTP jusqu’au 6 janvier 1944.
En Lozère, l’Armée Secrète (AS) n’envisageait d’armer les maquis que peu à peu afin qu’ils soient en mesure d’assurer au Jour J des actions complémentaires de sabotage venant en aide aux troupes de débarquement, seules responsables des opérations militaires. Les FTP quant à eux, réclamaient l’armement immédiat des groupes pour permettre à ceux-ci de mener des actions de partisans, renforçant ainsi par la lutte armée les autres actes de Résistance. Dans les Cévennes, des maquis se constituent par les FTP, en Vallée Longue, avec l’accord des résistants locaux, toutes tendances confondues. Jean HUC, de l’AS écrit : Le PC préconise la formation d’un maquis. On nous objecte le danger que coure le pays. Nous persistons, et sur les ordres du Chef FTP "Philippe" [Paul Tagnard], le premier maquis est créé le 27 juillet 1943.
Durant cette phase, il mèna les opérations intensifiant la lutte contre l’occupant comme les destructions ferroviaires, l’attaque de convois de l’occupant, l’attaque de la prison central de Nîmes et l’organisation de l’évasion de Résistants. Il avait 1200 hommes sous ses ordres.
Étant recherché par la Gestapo avec son épouse, après plusieurs perquisitions à leur domicile, ils rejoignirent le Puy-de-Dôme où ils intégrèrent l’état-major FTP de l’Inter “A”. Là, il devint commandant de secteur (Cantal - Allier - Puy-de-Dôme) de l’inter-région “A” (Massif central). Il dirigea alors un secteur qui regrouperait 1800 hommes et il exerça les fonctions de Chef du 4e Bureau (Renseignements). Pierre Girardot, responsable du PCF pour le Puy-de-Dôme depuis 1943, le présentait comme Commissaire aux Opérations (CO) pour le Puy-de-Dôme après mars 1944. Son dossier d’homologation de grade FFI le présente aussi comme Chef des opérations et du matériel de l’état-major départemental du Puy-de-Dôme en date du 7 janvier 1944.
Tagnard est alors sous le commandement du Commandant de la 2e subdivision FTP (Limousin, Massif-central, Vallée du Rhône), Benoît Faur, alias Mottet. Il dirigea des attaques de troupes ennemies et de convois ferroviaires.
En raison de son activité intense, de ses initiatives hardies, il fut promu au grade de lieutenant-colonel le 7 janvier 1944 par le Comité Militaire Zone-Sud avec accord du Comité Militaire National (CMN) des FTP. Ce grade lui a été maintenu en accord avec le télégramme du général Koening en date du 6 juin 1944.

En mars 1944, le couple fut hébergé par le couple Lucien et Yvette Armand, dans la cité Michelin de la Plaine, avant d’être envoyé chez le couple Madrange, qui louait une chambre au-dessus de leur café Cabaret, café de Chanturgue, route de Riom, aujourd’hui Bar Des Clos, boulevard Étienne Clémentel à Clermont-Ferrand.
Le 27 avril, des membres du SD se sont présentés au café Madrange, ont arrêté le propriétaire, son épouse, leur fille ainsi que le couple Tagnard. Dans la chambre de ces derniers, ont été trouvé des tracts FTP et communistes. C’est au cours d’un interrogatoire suivant ces arrestations que, selon Yvette Armand, madame Madrange a dû donner le nom de la personne lui ayant envoyé les Tagnard. C’est ainsi que le même jour, 29 avril, Lucien Armand et sa femme furent arrêtés par le SD à leur domicile.
Le 30 avril 1944 à Clermont-Ferrand l’EM FTP 63 est donc en partie démantelé. En effet, l’arrestation d’un membre du PCF envoyé noyauter la Milice clermontoise entraîne l’arrestation de sept miliciens, suivie de vingt-deux FTP, alors qu’avait lieu la réunion du Comité Militaire Inter-Régional ce jour-là, dans la journée du 30 avril 1944 à Clermont-Ferrand. Parmi les personnes arrêtées par la police allemande, on compte : Paul Tagnard (Commissaire aux effectifs pour Clermont-Ferrand), Marc Baudoin (Commissaire aux Effectifs et bientôt retourné par le SD), Lucienne Tagnard. Lucien Armand, membre de l’état-major FTP départemental. Un Commissaire aux opérations ainsi que le Commissaire aux opérations de Saint-Étienne, Clovis Chirin alias Dupuy y échappent. Le lendemain, c’est au tour d’un commandant de Compagnie et du gannatois Rondat d’être arrêtés. Jean Ameurlain échappe à l’opération et rejoint l’Allier où il participe à la création du camp Casanova.
Les papiers saisis sur Paul Tagnard et le Commissaire aux effectifs, Marc Baudoin permirent l’arrestation immédiate de plusieurs autres personnes dont le cafetier José Lopez, sa femme, leur voisin Charles Vernière et Lucienne Tagnard, l’épouse de Paul Tagnard.
Il fut d’abord interrogé et torturé à Clermont-Ferrand pendant une dizaine de jours puis il fut transféré au camp de Compiègne Royaulieu le 21 juin 1944. Il fut ensuite déporté le 2 juillet 1944 dans le convoi surnommé « le convoi de la mort » vers le camp de Dachau en Allemagne. Puis il fut transféré au camp de Flossenburg fin septembre. C’est là qu’il mourut le 15 octobre 1944.
Il a été reconnu “Mort pour la France", homologué FFI. Il fut reconnu lieutenant-colonel par décret du 16 janvier 1947 avec date de prise de rang au 1er avril 1944.
Son nom figure sur monument aux morts de Buis-les-Baronnies (Drôme).
Sa femme, Lucienne Tagnard fut elle-même déportée mais elle survécut et reprit le commerce de cycles. Leur fille Paulette, alias Yolande dans la Résistance, épousa le commandant Benoît Faur, ancien supérieur de Paul Tagnard dans la Résistance et militaire d’active après-guerre.

Pour citer cet article :
https://maitron.fr/spip.php?article209851, notice TAGNARD Paul, Joseph [pseudonyme dans la résistance : Philippe, Beranger] par Eric Panthou, version mise en ligne le 22 décembre 2018, dernière modification le 29 avril 2020.

Par Eric Panthou

SOURCES : SHD Vincennes, dossier Paul Tagnard : GR 16 P 560500 .— AVCC, dossier Paul Tagnard : AC 21 P 162063 (non consulté) .— Arch. dép. de la Drôme : 132 J 1, LM I 240 (non consulté) .— CD(DVD)-ROM : La Résistance dans la Drôme - le Vercors, 2007.— Éveline et Yvan Brès, Presses du Languedoc, 1987 .— Pierre Girardot, La Lavande et le Palais-Bourbon, Paris, éd. Sociales, 1980 .— MémorialGenWeb .— Mémoire des Hommes .— Livre Mémorial des Déportés de France .— http://museedelaresistanceenligne.org/media632-Louis-Borel-reA. .— Courriel de Claude et Michel Seyve à Eric Panthou, 24 décembre 2018 .— état civil Vizille.

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