MADIGNIER Fanny (MONNIN Marie, Françoise, dite Madignier ou Madinier) [Dictionnaire des anarchistes]

Par Dominique Petit

Née le 28 février 1852 à Lyon (4e arrondissement), célibataire, tisseuse, anarchiste de Lyon, condamnée à mort par contumace.

Elle était la fille de Claude Monnin et de Julie Bouton. Sa mère épousa Madignier (parfois écrit Madinier), en secondes noces. Sa sœur cadette, Virginie, était mariée avec Claude Joseph Bernard et appartenait au groupe Marie Ferré- Louise Michel.
Fanny Madignier habitait avec sa mère et son beau-père au 5 rue Lebrun à Lyon.
Elle assistait aux réunion anarchistes où elle proposait régulièrement des quêtes, qu’elle faisait elle-même en faveur « des victimes de la bourgeoisie » ; elle en fit une, en particulier, lors de l’enterrement civil du compagnon Charvieux le 31 mars 1882.
Elle était membre du groupe anarchiste de femmes Marie Ferré-Louise Michel. Ce groupe faisait partie de la Fédération révolutionnaire lyonnaise.
A la réunion organisée par la Fédération révolutionnaire le 28 mai 1882, salle de l’Elysée, pour traiter du journal Le Droit social et de la condamnation de Dejoux, son gérant, ainsi que des mesures à prendre pour la résistance, réunion dont le président d’honneur était le compagnon Fournier, de Roanne, un vote déclara nul le verdict du jury et que Dejoux avait bien mérité du parti révolutionnaire. Fanny Madinier, au nom des femmes révolutionnaires, avait déclaré : « Nous jurons de prêter tout notre concours aux vaillants citoyens qui voudront délivrer Dejoux ».
Elle fut secrétaire du bureau de la conférence faite sur la Révolution, salle de l’Alcazar, le 1er juillet 1882, par Louise Michel, Digeon et G. Rouannet, réunion organisée par la Fédération révolutionnaire. Un vote de flétrissure contre le gouvernement, la magistrature et tous les exploiteurs du peuple en général y avait été adopté.
Elle fut assesseur du bureau d’une réunion tenue le lundi 3 juillet, salle de la Perle, à la Croix-Rousse, réunion dont Bordat et Fournier étaient les présidents d’honneur.
Dans cette réunion présidée par la citoyenne Labouret-Finet du groupe Marie Ferré, cette dernière donna lecture d’une lettre du groupe l’Avant-garde d’Amiens, décernant à Louise Michel le titre de Porte drapeau de la Révolution.
Cette réunion dans laquelle, on fit appel à la révolution violente, se termina par les cris de : « Vive la Révolution ! Vive la Commune ! Mort aux voleurs ! A bas le commissaire ! Vive Bordat ! Vive Fournier ! La Révolution les tuera tous ! ».
Le 16 août 1882, Fanny Madignier assistait à la réunion publique organisée par la Fédération, salle de la Perle (Croix-Rousse), sous le titre Tribunal révolutionnaire, pour protester contre la condamnation prononcée le même jour, par la cour d’assises du Rhône, contre les compagnons Crestin et Bonthoux. A cette réunion présidée par le compagnon Pautet, ouvrier serrurier, Crestin, arrêté à l’audience et condamné pour avoir adressé des menaces de mort à l’avocat général, fut acclamé président d’honneur. La propagande par le fait y fut préconisée, celle faite par la parole et par la plume n’ayant d’autre résultat que de faire condamner les compagnons qui s’y livraient et on recommanda l’emploi du poignard, de la dynamite et des aiguilles empoisonnées. Le président de la République, les ministres, les généraux et tous les bourgeois en général y furent traités de voleurs et de bandits, et après avoir recommandé aux conscrits de refuser le service militaire, Cyvoct aurait proposé et fait voter, selon un rapport de police, un arrêt de mort contre les juges et les jurés ayant condamnés Crestin et Bonthoux, se chargeant de rechercher et de trouver leurs adresses.
Une réunion publique salle de l’Elysée, 11 rue Basse du Port au Bois eut lieu le samedi 9 septembre 1882 sur Les troubles de Montceau les Mines, la grève des conscrits.
Sur le mur, au fond, au-dessus de l’estrade où se trouvait le bureau, il y avait deux drapeaux, un rouge et un noir. Le bureau était composé de Dard, président (délégué à l’ordre, selon les anarchistes), Pape secrétaire, Andrion et Dupin, assesseurs.
Le public était composé de 600 personnes, dont une quarantaine de femmes.
Tous les journaux politiques de Lyon étaient représentés par un ou deux journalistes.
La séance s’ouvrit à 8h40.
Cyvoct prit la parole annonçant qu’étant conscrit, il ne partira pas : « Plus d’armée, plus de conscrits. Vive la grève des conscrits. (applaudissements) ».
Fanny Madignier, au nom du groupe Marie Ferré et des mères et sœurs des prolétaires, donna lecture d’une adresse invitant les mères de famille à refuser leurs enfants : « quand ils peuvent nous venir en aide, pour en faire de la chair à canon ou du fumier de caserne ! L’éclair révolutionnaire qui vient d’éclater à Montceau doit nous affranchir de tous de nos exploiteurs (applaudissements) ».
Le 4 octobre, à la suite d’une réunion orageuse organisée conjointement par la Fédération révolutionnaire et le Parti ouvrier à la salle de la Perle à la Croix-Rousse, le commissaire de police dressa plusieurs procès-verbaux dont un à l’encontre de Fanny Madignier, pour infraction à l’article 40 de la loi sur la presse qui interdisait d’annoncer publiquement des souscriptions pour couvrir des frais de justice. Il semble que ce procès-verbal n’ait pas eu de suite.
Elle assista à la réunion publique organisée par la Fédération, salle de l’Alcazar, le 22 octobre 1882, réunion dans laquelle Emile Gautier, arrêté la veille, devait faire une conférence sur le Droit de la force. A cette réunion, le compagnon Jolly proposa de mettre son bras au service de la Fédération pour assassiner le président de la République ou le commissaire de police présent au bureau.
Le 25 octobre 1882, elle était signalée comme répondant au signalement de la femme recherchée comme complice des auteurs de l’attentat de Bellecour du 23 octobre. Citée à comparaître devant le juge d’instruction, elle disparut de Lyon le 28 octobre 1882 et se réfugia en Suisse, selon la police.
Elle aurait écrit à Lyon pour demander des secours et la commission chargée de répartir les souscriptions ayant pour but de venir en aide aux victimes de « la réaction bourgeoise », dont Courtois était le trésorier, lui aurait attribué, le 3 novembre, la somme de 10 francs.
Le 3 décembre 1884, la cour d’assises du Rhône la condamna aux travaux forcés à perpétuité pour meurtre et tentative de meurtre, sans préméditation.
Selon la police, elle se serait réfugiée chez Elisée Reclus à Clarens (Suisse) chez qui elle aurait travaillé comme employée de maison, mais cette information n’est pas confirmée dans la correspondance de Reclus qui ne l’évoque pas, ni dans d’autres documents.

Pour citer cet article :
https://maitron.fr/spip.php?article210030, notice MADIGNIER Fanny (MONNIN Marie, Françoise, dite Madignier ou Madinier) [Dictionnaire des anarchistes] par Dominique Petit, version mise en ligne le 31 décembre 2018, dernière modification le 10 avril 2020.

Par Dominique Petit

SOURCES : Arc. Dép. Du Rhône 2 U 464 — Laurent Gallet, Aspects de la vie quotidienne des anarchistes à Lyon, Lyon, ACL, 2016. — Laurent Gallet, Machinations et artifices, Lyon, ACL, 2015.

rebonds ?
Les rebonds proposent trois biographies choisies aléatoirement en fonction de similarités thématiques (dictionnaires), chronologiques (périodes), géographiques (département) et socioprofessionnelles.
Version imprimable