CRÉMIEUX Albert [CRÉMIEUX Isaac, Albert]

Par Marie-Cécile Bouju

Né le 5 avril 1885 à Paris (XVIIe arr.), mort en 1954 à Autouillet (Seine-et-Oise, Yvelines) ; co-directeur des éditions Rieder (1913-1932), directeur de la revue Europe (1924-1932).

Fils d’Abraham Crémieux et Régine Carcassone, Albert Crémieux vécut à Nîmes jusqu’au décès de son père, tailleur, en 1895, puis à Paris où il fit ses études secondaires au lycée Janson-de-Sailly. À partir de 1902, il poursuivit des études d’histoire à la Sorbonne. À cette époque, il fit deux rencontres déterminantes : Jean-Richard Bloch qu’il rencontre à la Sorbonne et avec qui il se lia d’une profonde amitié, et Charles Péguy grâce à ses beaux-frères Émile et Henri Boivin. Ces deux rencontres le poussèrent à participer plus directement à la vie intellectuelle de son époque.
En 1908, il fut reçu 8e à l’agrégation et en 1911 soutint sa thèse, La Révolution de février, étude critique. Les journées des 21, 22, 23 et 24 février, dirigée par Charles Seignobos. Il se maria en 1910 à Suzanne Carcassone (1888-1962).
En 1911, il entra, grâce à Pierre Caron, dans la librairie Édouard Cornély et Cie. En juin 1913, Édouard Cornély céda son fonds à Frédéric Rieder. Pierre Caron et Albert Crémieux devinrent les directeurs éditoriaux de la nouvelle librairie. Albert Crémieux fit alors publier par la librairie la revue de Jean-Richard Bloch, L’Effort Libre.
En 1914, il fut mobilisé ainsi que son frère cadet Lucien, qui sera tué au front en 1915. Il sortit du conflit profondément pacifiste et s’enthousiasma pour la révolution russe.
En 1918, il reprit ses fonctions à la librairie, qui publia, entre autres, de nombreux auteurs de gauche et pacifistes. Il s’entoura de Jean-Richard Bloch et Léon Bazalgette, directeurs de collection. En 1922, malgré les difficultés, il décida de publier la revue Europe, inspirée par Romain Rolland. Le premier numéro parut le 15 février 1923. Il y collabora régulièrement. Les problèmes que posait le secrétariat de rédaction de René Arcos et Paul Colin l’obligèrent à devenir le directeur de la revue en janvier 1924. En 1927, sa fonction fut vivement contestée par Romain Rolland qui critiqua le contenu de la revue. N’arrivant pas à imposer son autorité, il en laissa alors la direction effective à Jacques Robertfrance puis à Jean Guéhénno.
Dans le même temps, les difficultés commerciales de la maison d’édition l’obligèrent à partager la direction avec de nouveaux associés, avant de leur céder la totalité de la librairie en 1932. En septembre 1932, il quitta la direction d’Europe, dans l’indifférence générale, et perdit de vue Jean-Richard Bloch.
Ruiné, il partit avec son épouse à Autouillet, où Suzanne Crémieux possédait une maison, seul bien laissé par leurs créanciers. Ils fondèrent alors un cours privé. Pendant la guerre, protégé par la bienveillance des villageois, il poursuivit ses activités sous le nom de Croet. Son école accueillait alors des réfugiés et des enfants de résistants. Élu maire d’Autouillet en 1945, il abandonna ses fonctions en 1946. À partir de 1948, outre sa propre école, et bien que totalement athée, il dirigea l’École Yabné à Paris, école de confession juive.
Albert Crémieux ne fut pas un militant mais un homme qui tenta de créer un milieu intellectuel, accueillant des auteurs de gauche, de toutes tendances. La rupture de 1932 marqua la fin de son projet, sans altérer ses convictions.

Pour citer cet article :
https://maitron.fr/spip.php?article21064, notice CRÉMIEUX Albert [CRÉMIEUX Isaac, Albert] par Marie-Cécile Bouju, version mise en ligne le 25 octobre 2008, dernière modification le 12 mai 2020.

Par Marie-Cécile Bouju

ŒUVRE : La censure en 1820 et 1821 sur la presse politique et la résistance libérale, Librairie Édouard Cornély et Cie, coll. « Bibliothèque d’histoire moderne », n° 14, 1912 — La Révolution de Février. Étude critique. Les journées des 21, 22, 23 et 24 février 1848, Paris, Librairie Édouard Cornély et Cie, coll. « Bibliothèque d’histoire moderne », n° 13, 1912 — « La Révolution de 1848 » in Histoire des révolutions, de Cromwell à Franco, Gallimard, 1938.

SOURCES : Bibl. nat. Fonds Jean-Richard Bloch, correspondance d’Albert Crémieux. — Fonds Albert Crémieux, correspondance de Jean-Richard Bloch. — Un beau visage à tous sens, choix de lettres de Romain Rolland, Cahier Romain Rolland n° 17, Albin Michel, 1967. — Témoignage et archives d’Yves Bodeur-Crémieux.

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