CYPRIEN Étienne, Marius, dit CYPRE

Par Tangi Cavalin, Nathalie Viet-Depaule

Né le 20 juin 1901 à Marseille (Bouches-du-Rhône), mort le 22 juillet 1979 à Marseille (Bouches-du-Rhône) ; dessinateur industriel ; syndicaliste CGT ; membre du comité national et permanent fédéral du Mouvement populaire des familles (1945-1948), chroniqueur à Monde ouvrier et à Témoignage chrétien ; coopérateur.

Fils de Vincent Cyprien et d’Anaïs, Zoé Peyric, épiciers, aîné d’une fratrie de trois enfants, Étienne Cyprien fit sa scolarité à l’école laïque et obtint son brevet de dessinateur. Il commença à travailler dans l’atelier Noël et Pelligrini puis fut embauché chez Rocca, Tassy et Roux, une huilerie de Marseille, où il fit l’essentiel de sa carrière professionnelle (trente-trois ans) qu’il termina comme chef de publicité. Il milita au sein de la fédération des Produits chimiques CGT et fut délégué du personnel et secrétaire du syndicat.

Chrétien convaincu, Étienne Cyprien avait suivi les débuts de la JOC et participé à son dixième anniversaire, au Parc des Princes à Paris, en 1937. Marié depuis le 22 juin 1929 avec Augustina, Albertine Berger (il aura trois enfants), il rejoignit le Mouvement populaire des familles (né au début de la guerre) dont il fut l’un des permanents fédéraux. Il avait décidé de quitter son travail, d’être donc deux fois moins bien rémunéré, pour se mettre au service des classes populaires dont il dira plus tard : « C’est le choix que nous avons fait en pensant qu’avec un peu d’amour le monde serait plus accueillant, plus habitable, et ceci nous a valu de réaliser des choses incroyables... » Il fut pendant trois ans, de 1945 à 1948, non seulement l’une des chevilles ouvrières du mouvement à Marseille, mais aussi son porte-parole à travers ses articles dans Témoignage chrétien sous le nom de Frère Genièvre et dans Monde ouvrier (l’hebdomadaire du MPF) sous celui de Jean Primaire. C’était par l’intermédiaire d’Henri Théry*, qui était chargé de la diffusion de Témoignage chrétien dans la région sud-est, qu’il avait été sollicité pour décrire régulièrement les difficultés rencontrées par les milieux populaires. Quelques années plus tard, lorsque Théry sera responsable du Secrétariat social de Marseille, il fera de nouveau appel à Cyprien pour renforcer la composante ouvrière au sein du groupe Zachée, une instance de dialogue qui rassemblera patrons et ouvriers.

Très sensible aux questions de pénurie alimentaire et de détournement de ravitaillement, Étienne Cyprien n’hésitait pas à dénoncer ceux qui en étaient responsables comme à critiquer, par exemple, le fonctionnement de l’institution scolaire peu propice à l’ascension ouvrière. Mais, surtout, il remit en cause les excès de la propriété privée. Ce fut au congrès fédéral du MPF que l’action sur le logement fut décidée à Marseille, le 29 septembre 1946, initiant un mouvement qui allait prendre une ampleur nationale. Il participa alors à de nombreuses actions de squattage de logements : villas Tornési dans le quartier Saint-Louis, au Nord de Marseille, Consolat, maison des Frères des écoles chrétiennes à La Calade, pour ne citer que ces actions. Il s’agissait, pour reprendre l’expression d’Étienne Cyprien de « faire entrer la justice par effraction ». Il était gérant de Provence ouvrière, organe départemental du MPF, dont le siège était sis au 45 rue de Breteuil à Marseille.

Lorsqu’en mars 1950, l’Action catholique ouvrière (ACO) fut officiellement créée en France, lui et Alphonse Garelli*, les deux délégués marseillais, firent entendre leurs protestations face à une organisation voulue par la hiérarchie catholique qui, sous couvert d’« animation spirituelle » de militants diversement engagés dans le mouvement ouvrier, réduirait leur autonomie. En effet, pour les plus engagés d’entre eux, désireux de garder une certaine indépendance à l’égard de l’Église, une telle approche était inconcevable et la mise en place du nouveau mouvement se traduisit localement par des tensions très fortes entre prêtres et laïcs, mais aussi entre laïcs, issus du MPF et, pour beaucoup, anciens jocistes.

Dans ce contexte marseillais, Étienne Cyprien faisait figure de « rassembleur » : il établit des liens entre le MPF puis le MLP et Économie et Humanisme et assura même des prêches de Carême. Il réalisa, avec Edmond Céréda, de nombreuses organisations de type coopératif et associatif (mise en place de plusieurs coopératives et groupements d’achat à Marseille) et présida longtemps la section coopérative de Saint-Antoine, quartier où il habitait.

Pour citer cet article :
https://maitron.fr/spip.php?article21256, notice CYPRIEN Étienne, Marius, dit CYPRE par Tangi Cavalin, Nathalie Viet-Depaule, version mise en ligne le 25 octobre 2008, dernière modification le 3 juin 2009.

Par Tangi Cavalin, Nathalie Viet-Depaule

SOURCES : Arch. archevêché de Marseille. — Les Cahiers du GRMF, IV, 1986, VII, 1992, XIII, 2005. — Brochure « Témoignages d’amitié » qui rassemble plusieurs de ses articles parus dans Monde ouvrier et Témoignage chrétien, s.d. — Tangi Cavalin, Nathalie Viet-Depaule, « Catholiques engagés à Marseille », Les catholiques dans la République, Éd. de l’Atelier, 2004, p. 301-312. — Entretiens avec Séverin Montarello. — Renseignements fournis par la famille, décembre 2007.

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