BAUDOIS Marc, Sylvain. Pseudonymes dans la Résistance : Maurice, Larrieux, Ravel

Par Eric Panthou

Né le 13 septembre 1918 à Montreuil-sous-Bois, devenu Montreuil (Seine-Saint-Denis), suicidé ou exécuté sommairement à Nancy (Meurthe-et-Moselle) ou Paris (ex Seine) fin 1944 ; instituteur ; membre du Parti communiste (PCF) ; résistant au sein des Francs-tireurs et partisans ; évadé de la prison de Saint-Étienne (Loire) ; commissaire aux effectifs FTP ; retourné par le SD après son arrestation.

Fils de Sylvain Baudois, chauffeur né en Suisse, et de Georgette Duperray, sans profession, Marc Baudois fut légitimé par le mariage de ses parents le 7 août 1920 à Saint-Mandé (Val-de-Marne).
Il aurait fait des études de Sciences à la faculté de Paris. Il devint ensuite instituteur à Châtillon-sous-Bagneux (Hauts-de-Seine). C’est sans doute à cette époque qu’il adhéra au Parti communiste. Selon Théo Vial-Massat, qui l’a plus tard connu en prison, Marc Baudois était agrégé d’anglais et professeur.
Il devint ensuite aspirant au 23e Régiment d’infanterie et c’est là qu’il fut arrêté à Toulouse avec plusieurs autres militaires communistes début janvier 1941. On trouva des tracts chez lui et du matériel pour imprimer. Il fut convaincu d’avoir en août 1940 et janvier 1941 participé à une entreprise de démoralisation de l’armée. Pour cela, il fut condamné le 10 avril 1941 par le Tribunal militaire de la 17éme division à Toulouse, à 5 ans de travaux forcés, dix ans d’interdiction de séjour, à la dégradation militaire et la confiscation de ses biens. Il fut incarcéré à Toulouse puis la prison du Puy-en-Velay (Haute-Loire) avec plusieurs dizaines d’autres condamnés politiques.
Sans doute considéré comme un élément important, il fut sélectionné par le triangle de direction pour faire partie des 31 prisonniers qui purent s‘évader le 26 septembre 1943.
Il fit partie du groupe principal des évadés, acheminé jusqu’au camp FTP Wodli en Haute-Loire avant d’être affecté vers le Puy-de-Dôme où il devient Commissaire aux effectifs. Il remplaça ici Théo Vial-Massat qui venait d’être envoyé du Wodli à Clermont-Ferrand mais qui étant tombé sur Antonini, le policier qui l’avait arrêté précédemment, fut transféré à Avignon (Vaucluse).
Le 16 mars 1944, une assemblée près de Champeix (Puy-de-Dôme) groupa pour la première fois l’état-major départemental du Puy-de-Dôme des FFI. Six bureaux sont prévus. Marc Baudoin alias Maurice est représentant des FTP au 2éme Bureau, celui des renseignements.
Suite à l’arrestation de Paul Tagnard, Commissaire aux opérations des FTP du Puy-de-Dôme, Marc Baudois fut arrêté à la gare de Clermont-Ferrand alors qu’il venait de Lyon ou Saint-Étienne pour assister à une réunion de l’état major FTP régional.
La perquisition effectuée à son domicile fit découvrir une documentation complète sur le Parti communiste et l’organisation FTP, avec également la totalité des effectifs, les pseudo des responsables.
Dès son arrestation, il semble qu’il ait dénoncé plusieurs camarades. Par la suite alors qu’il était détenu à la prison Militaire de Clermont-Ferrand, il a dénoncé d’autres prisonniers. Craignant sans doute pour sa vie, il demanda à travailler pour le SD et vint s’installer à son siège au 2 bis avenue de Royat à Chamalières. Il appartenait au Kommando français, sous la direction de Joanny, Georges Batissier alias Schmidt, et avec sous-chef Paul Vidal, alias Max Burmann. Il est présenté alors comme un ex-veilleur de nuit.
Faute de logement disponible on lui aménagea une cellule en chambre à coucher avec le mobilier nécessaire. Il disposait d’une liberté complète mais ne pouvait sortir sans être accompagné.
Il ne participa pas aux opérations sur le terrain ; en revanche, il assista à des nombreux interrogatoires, usa de son expérience pour faire parler des résistants communistes, obligea certains qu’il connaissait à avouer, et participa à certaines reprises aux tortures, y compris sur ses anciens camarades.
Il a fourni aussi tout un plan de l’organisation communiste et d’utiles indications sur les maquis qu’il connaissait, en particulier le secteur des Ancizes, dans les Combrailles. Il a aussi permis l’arrestation de plusieurs membres des MUR, notamment les docteurs Paturet et Tabourin. Fin mai, il fournit une liste de personnes à arrêter dans Clermont-Ferrand et qui étaient en relations, soit avec les MUR, soit avec les FTP. Alphonse Rozier, ancien responsable du Front National dans le Puy-de-Dôme en 1943 et 1944, estima plus tard que l’arrestation de Baudois, alias Maurice, n’avait pas eu de conséquences, les papiers trouvés chez lui ne comportant que des pseudonymes et non pas les noms des résistants. C’est sans doute vrai à ce niveau, mais Baudois donna des indications jugées précieuses sur les effectifs et l’emplacement des compagnies mais aussi sur les Milices Patriotiques. Il avait en effet, comme le dit Rozier, une double appartenance, ce qui lui permit de dénoncer à la fois des FTP mais aussi des membres de l’Armée Secrète.
Que ce soit dans certains ouvrages, articles, ou dans les témoignages de personnes torturées ou d’anciens membres du SD, Baudois est désigné sous plusieurs orthographes, Jules Baudoin, Marc Beaudois, Maurice Baudois. Il ne doit pas être confondu avec Julien Baudois, alias Gilbert Chalier, Commissaire technique régional des FTP du Puy-de-Dôme, arrêté vers le 27 juillet 1944 à Clermont-Ferrand lui aussi. Après-guerre, quand une enquête était d’établir les membres du SD de Vichy et de Clermont-Ferrand, il figure au 154ème rang dans la liste des membres du SD recensés.
Marc Baudois quitta Clermont-Ferrand avec la Gestapo le 23 août 1944. A Nancy, il parvint à se soustraire à l’obligation qui lui avait été faite de s’engager dans la Waffen SS. Il aurait alors pris contact avec Mouvement « Libération » et aurait obtenu des papiers d’identité au nom de Faral né à Rethel, prétendant se nommer en réalité Marcel Brevannes. Le jour de la Libération de Nancy il prit contact avec le Front National, et serait devenu l’adjoint du chef.
La Cour de Justice du Puy-de-Dôme le condamna à mort par contumace dans sa séance du 27 avril 1945. Il est possible que ce soit à lui que le journal Le MUR fait allusion dans son édition du 9 février 1946 quand il écrit que Marc Beaudois (sic) est en attente de son exécution.
On ignore pour l’instant ce qu’il advint de Baudois ensuite. Cependant, selon une note manuscrite en marge du procès-verbal d’un des français du SD arrêté à Clermont-Ferrand à la Libération, et témoignant sur Baudois, il aurait été exécuté par les FTP. D’après la Bio de Jean Sanitas, alors jeune militant communiste qui eut à subir un interrogatoire en présence de Baudois en 1944, ce dernier se serait "suicidé" à Paris. L’utilisation des guillemets par Sanitas pouvait laisser entendre qu’il s’agissait d’une exécution. Néanmoins, le témoignage de Théo Vial-Massat recueilli par Roger Maurin et Lucien Bastet permet de préciser les circonstances tout en restant prudent puisque des erreurs sont commises alors dans l’identification des différentes protagonistes.
Selon Théo Vial-Massat, Baudois, en étant affecté à Clermont avait rejoint ici son frère qui était dans les FTP. Et après avoir été retourné par les Allemands, il aurait dénoncé son propre frère. Blessé en voulant s’évader au moment de son arrestation, ce dernier serait ensuite parvenu à s’évader de l’hôpital et parvint après la Libération à retrouver son frère qui avait été désigné responsable local du Front National à Nancy ou Metz. Là, le frère donna le choix à Marc Baudois, soit se suicider avec le revolver qu’il lui avait remis, soit se faire exécuter. Marc Baudois se serait alors suicidé.
Cette version pourrait coïncider avec les éléments recueillis par ailleurs hormis le fait que le soi-disant frère de Marc Baudois, identifié comme Julien Baudois, commissaire technique régional du Puy-de-Dôme et du Cantal, n’était pas son frère.

L’état civil de la commune de naissance de Baudois indique qu’après un jugement du Tribunal de Grande Instance de Paris en date du 18 novembre 1983, une instruction du parquet de Paris en date du 28 février 1985 dit "venant de Paris 15e déclare absent depuis le dernier trimestre 1944". Un doute subsiste donc sur le lieu où Marc Baudois a disparu : Paris ou en Lorraine.

Pour citer cet article :
https://maitron.fr/spip.php?article213174, notice BAUDOIS Marc, Sylvain. Pseudonymes dans la Résistance : Maurice, Larrieux, Ravel par Eric Panthou, version mise en ligne le 10 mars 2019, dernière modification le 8 août 2022.

Par Eric Panthou

SOURCES : Journal des débats politiques et littéraires, 12 avril 1941 .— “Un coup de filet dans le monde communiste de Toulouse”, La Croix, 18 janvier 1941 .— Arch. dép. du Puy-de-Dôme : Interrogatoire Georges Mathieu, 16 septembre 1944 .— Arch. dép. du Puy-de-Dôme : Interrogatoire Jean Vernière, 13 octobre 1944 .— Arch. dép. du Puy-de-Dôme : Déposition de Jean Sanitas, 20 janvier 1949 .— Gilles Lévy, A nous Auvergne !, Paris, Presses de la Cité, 1981, p. 288 .— Archives de la conférence nationale du PCF : Dossier Bio Jean Sanitas .— Arch. de la Loire : liste des évadés de la prison de Saint-Étienne le 26 septembre 1943 .— SHD Vincennes, GR 28 P 7- 107. Historique du SD en France. Vichy, Clermont-Ferrand .— La Nation, quotidien régional d’information, organe du FN, 28 avril 1945 .— Témoignage de Camille Pradet et Théo Vial-Massat recueilli par Lucien Bastet et Roger Maurin le 16 mai 2006 à Saint-Paulien (archives Roger Maurin). — Note manuscrite de Roger Champrobert sur Marc Beaudois, archives Roger Champrobert, Clermont-Ferrand. — État civil Montreuil.

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