DALLIDET Raymond [DALLIDET Léon, dit]. Pseudonyme sous l’Occupation : Raphaël

Par Jean Maitron, Claude Pennetier, Denis Peschanski

Né le 18 mars 1911 à Nantes (Loire-Inférieure, Loire-Atlantique), mort le 12 janvier 2002 à Gennevilliers (Hauts-de-Seine) ; frère d’Arthur Dallidet* ; apprenti boucher, ouvrier métallurgiste puis permanent communiste ; militant communiste de la région parisienne ; résistant ; proche de Jacques Duclos*, responsable du garage du parti et de la sécurité des dirigeants.

Fils d’un ouvrier chaudronnier aux Chantiers de la Loire, anticlérical anarchisant, et d’une ménagère issue d’une famille catholique, Raymond Dallidet travailla dans une usine de chaussures après avoir obtenu son Certificat d’études primaires puis devint apprenti boucher à l’âge de douze ans. C’est en 1930 qu’il « monta » à Paris où était déjà son frère Arthur Dallidet*, né en 1906. Après son service militaire, il habita à Boulogne-Billancourt et chercha du travail dans la boucherie. Mais, les bas salaires qui lui étaient proposés lui firent préférer, à la suite d’une période de chômage, l’embauche dans une entreprise métallurgique : Arbel, à la Plaine-Saint-Denis. Puis, il entra à l’usine Renault de Billancourt et travailla à la chaîne dans l’Ile Seguin. Licencié, chômeur, il alla à la soupe populaire où Garcia, chargé de la vente à la criée de l’Humanité dans les rues de Billancourt, le contacta. Il entra aux Jeunesses communistes, devint par la suite secrétaire du rayon, et adhéra au Parti communiste à la fin de l’année 1931. Les deux frères Dallidet avaient connu chacun de leur côté la même évolution politique ; leur fraternité en fut renforcée.
En juin 1933, Raymond Dallidet entra aux Glacières de Paris comme cocher-chauffeur-livreur, travail très dur mais bien payé ce qui lui permit, par la suite, de militer au service de l’Espagne républicaine sans soucis financiers. Le 6 février 1934, il était présent à la Concorde avec l’Association républicaine des anciens combattants ; le 9 février il participa avec son frère, de la République à la Gare du Nord, à la bataille de rue antifasciste. La police l’arrêta et le garda une partie de la nuit au commissariat de la rue Montmartre. Le 12 février, toujours avec son frère, il prit une part active à la grève générale.
Marié à Micheline Poirier le 5 mai 1934 à Boulogne-Billancourt, il s’installa à Montrouge (Seine) en 1935. Les militants communistes de cette ville le désignèrent comme secrétaire adjoint du sous-rayon dont un ancien mutin de la Mer Noire, Terion assurait le secrétariat. En septembre 1936, Terion le sollicita pour aller combattre en Espagne et obtint son accord. Jacques Duclos le convoqua au 120 rue Lafayette et lui demanda d’aider un responsable espagnol, Marcos, dans sa recherche d’armes et autres fournitures pour l’Espagne républicaine. Il s’occupa de diverses filières d’approvisionnement plus ou moins tolérées par les autorités françaises. L’une d’elle partait de Suisse : les armes transitaient par bateaux de pêcheurs à travers le lac de Genève pour être réceptionnées, côté français, près d’Annemasse entre deux rondes de douaniers puis acheminées par route vers Marseille et Perpignan.
En juillet 1938, la direction du Parti communiste lui demanda de changer d’activité et de devenir le chauffeur de Julien Racamond, un des dirigeants de la CGT. Resté auprès de celui-ci jusqu’à la mobilisation, il l’aurait convaincu de ne pas condamner le Pacte germano-soviétique, de prendre du recul pour juger, ce que Racamond accepta.
Mobilisé le 7 septembre 1939, Raymond Dallidet rejoignit l’école militaire et fut incorporé au 22e COA où il suivit la direction de l’Intendance à la Ferté-sous-Jouare, puis à Meaux. À l’occasion d’une permission, il entra en contact avec son frère et Benoît Frachon. Son épouse Micheline était déjà dans le « circuit illégal ». Il repartit à la caserne avec des tracts et des numéros de l’Humanité clandestine. Avec la débâcle de juin 1940 la direction de l’Intendance s’enfuit vers le Sud. R. Dallidet se « démobilisa » pour revenir à Paris. Le 2 ou 3 juillet sa femme lui organisa un rendez-vous avec Jacques Duclos qui ébaucha sa future responsabilité de clandestin, confirmée dès leur retour à Paris, vers le 3 août, par son frère et Frachon : il s’agissait de mettre en place un service d’impression et de « planques » réservé à la direction du Parti communiste. Mis en place progressivement, ce dispositif fonctionna jusqu’à la Libération de Paris. Les difficultés ne manquèrent pas : arrêté le 14 juillet 1941 au Quartier latin, il s’évada le soir même du commissariat du Panthéon ; arrêté à nouveau, quelques jours après son frère, le 6 mars 1942, il s’évada le 10 des bureaux de la préfecture de Police de Paris en compagnie du professeur Vigneron. Il assura dès lors toutes les liaisons internes de la direction du Parti communiste et organisa les réunions du secrétariat. C’est lui qui accueillit et cacha Georges Cogniot* après son évasion du camp de Compiègne. Il s’occupa de même de Marcel Cachin, Julien Racamond* et Henri Raynaud*.
Georges Cogniot l’imaginait après-guerre accédant « à des responsabilités politiques élevées dans le Parti. Il n’en a rien été : sa modestie l’a maintenu occupé à des tâches d’exécution, il est vrai essentielles » (Parti pris, p. 493). Responsable du service transport du Parti communiste parallèlement à celui de sécurité, il était invité, jusqu’en 1952, à assister aux congrès et aux réunions du Comité central et restait un proche collaborateur de Jacques Duclos qui appréciait son sang-froid, sa discrétion et son efficacité. Il fut, en dernier lieu, chargé de la sécurité physique et matérielle des principaux dirigeants communistes. En 1971 la maladie le surprit puis sa femme tomba elle-même malade. Ne pouvant plus assurer à plein-temps ses activités, il prit sa retraite mais, après le décès de son épouse en 1972, il reprit bénévolement ses fonctions qu’il n’abandonna définitivement qu’à la fin de l’année 1977.
En octobre 1984, L R. Dallidet fit paraître 1934-1984 : Voyage d’un Communiste. Il était depuis la fin des années 1970 en dialogue avec les historiens, confirmant et éclairant leurs découvertes, notamment lorsque s’ouvrirent les archives de Moscou. Il tenait à la conservation de la mémoire de ceux qui avaient été sous sa responsabilité dans l’équipe qui maintenait des locaux et des moyens de fonctionnement en cas d’interdiction de PCF après la Libération. Membres des services techniques du parti clandestin pendant l’Occupation, ils n’étaient plus formellement membres du Parti pour des raisons de fonctionnement jusqu’à leur retraite. Dallidet citait aussi Gustave Guéhenneux,*, Henriette Neunlist, Léone et Raymond Jouaud, Paulette et Henri Moquet, Germaine et Marcel Prigent.
Remarié avec Josiane Chaffaut, toujours domicilié à Paris (XVIe arr.), il mourut le 12 janvier 2002 à Gennevilliers. Éloigné de l’action politique en raison de son âge, de sa santé, mais aussi parce qu’il ne se reconnaissait pas entière dans l’évolution du Parti communiste, il avait jusqu’au bout suivi l’évolution des recherches sur les années de guerre à partir des archives de Moscou.

Pour citer cet article :
https://maitron.fr/spip.php?article21321, notice DALLIDET Raymond [DALLIDET Léon, dit]. Pseudonyme sous l'Occupation : Raphaël par Jean Maitron, Claude Pennetier, Denis Peschanski, version mise en ligne le 25 octobre 2008, dernière modification le 29 mars 2020.

Par Jean Maitron, Claude Pennetier, Denis Peschanski

ŒUVRE : Raph. Vive le Parti communiste français, Châtillon-sous-Bagneux, Société d’éditions générales, 1987, 351 p. (reprise légèrement modifiée de 1934-1984 : Voyage d’un communiste, préface de J. Gacon, La Pensée universelle, 1984, 319 p.).

SOURCES : Georges Cogniot, Parti pris, 1976, t. 1. — Jacques Duclos, Mémoires, 1968. — Jean-Pierre Besse, Claude Pennetier, Juin 1940 : la négociation secrète, Éditions de l’Atelier, 2006. — Roger Bourderon, La négociation, Syllepse, 2001. — Témoignage de Raymond Dallidet.

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