RATIER Gustave [RATTIER Simon François Marie Gustave]

Par Gauthier Langlois

Né le 24 juillet 1804 à Buzançais (Indre), mort le 13 avril 1880 à Lorient (Morbihan) ; avocat ; franc-maçon ; militant socialiste et républicain, il fut expulsé suite au coup d’état du 2 décembre 1851 et se réfugia dans la communauté des proscrits de Jersey animée par Victor Hugo. Suite à la proclamation de la IIIe République, le 4 septembre 1870, il fut nommé préfet du Morbihan puis élu député et maire de Lorient.

Né le 12 Thermidor an XII. Fils de Louis François Ratier propriétaire et de Marthe Félicité Chassinat. Il avait épousé le 15 mai 1836 à Lorient (Morbihan) la fille d’un notaire, Caroline Paule Haye, née en 1819.

Après des études de droit il s’établit à Lorient et s’inscrivit au barreau en 1829 ou 1830. Il fut élu bâtonnier le 7 novembre 1832, à l’âge exceptionnellement jeune de 28 ans. Franc-maçon, Gustave Ratier était membre, au moins depuis 1842, de la loge Nature et philanthropie - orient de Lorient. Militant socialiste et républicain, il s’opposa à la politique du prince Louis-Napoléon. C’est pourquoi, suite au coup d’état du 2 décembre 1851, il fut arrêté. La Commission départementale du Morbihan motiva sa décision par les attendus suivants : « Avocat très intelligent, très habile, sans moralité, méprisé de tous les partis. Il est le chef reconnu du socialisme à Lorient et a contribué plus que personne à y organiser le parti du désordre. »

Avec Adolphe Rondeau frappé de la même peine, il choisit de se réfugier en Belgique. Les deux amis furent conduits par la gendarmerie jusqu’à Lille où ils apprirent que la Belgique ne recevait plus de proscrits. Ils furent donc dirigés sur Dunkerque et embarqués à leurs frais vers l’Angleterre sur un paquebot britannique. Ne parlant pas anglais et ne trouvant pas de travail, les deux amis se replièrent, après quelques mois de séjour à Londres, sur Jersey. En effet au début de l’exil la présence de milliers de proscrits français rendait difficile l’accès d’un métier quelconque. Les proscrits qui exerçait un métier manuel parvenaient à vivre. Mais les avocats, les médecins, les professeurs n’arrivaient pas à gagner un peu de pain. Les travailleurs manuels gagnaient la vie pour tous. Si le travail n’était pas forcément plus facile à trouver à Jersey, l’emploi du français, alors parlé par presque toute la population, facilitait l’installation.

Gustave Ratier intégra alors la communauté des proscrits de Jersey animée par Victor Hugo. En exil, il fut visiteur ou membre actif, entre 1853 et 1862, de la loge la Césarée - orient de Jersey. Membre de la société d’entraide des proscrits La Fraternité, il fut chargé par celle-ci —avec le député Félix Mathé, le cordonnier Arsène Hayes et ses deux compatriotes de Lorient : les conducteurs de travaux Adolphe Rondeau et Étienne Henry— d’instruire l’enquête sur le proscrit Julien Hubert. Il était présent le 21 octobre 1853 à l’assemblée générale des proscrits républicains résidant à Jersey, qui déclara le sieur Julien Hubert comme espion et agent provocateur de la police de Napoléon III.

Tout comme Adolphe Rondeau, il rentra pas en France immédiatement après l’amnistie de 1859. Il reprit alors sa place au barreau de Lorient et au sein de la loge Nature et philanthropie - orient de Lorient dont il fut plusieurs fois le vénérable. Il était par ailleurs membre du Conseil de l’ordre du Grand Orient de France en 1866.

Suite à la proclamation de la IIIe République, le 4 septembre 1870, le Gouvernement de la Défense nationale, sur proposition de son ami Adolphe Rondeau, le nomma préfet du Morbihan. Il exerça cette fonction du 1er octobre 1870 au 25 mars 1871, date à laquelle il fut destitué par la « Réaction ». Entre-temps, aux élections législatives de février 1871, il fut candidat malheureux dans le Morbihan sur la liste dite des « Amis de l’ordre et de la liberté, de la France et de la république » avec Léon Gambetta et ses compagnons d’exil Louis Quenniec et Edmond Le Guével.

Conseiller général, il fut élu député du Morbihan de 1876 à 1880, siégeant comme républicain. Il fut l’un des 363 députés qui refusèrent la confiance au gouvernement de Broglie, le 16 mai 1877. Il échoua aux élections sénatoriales de 1879 mais fut élu maire de Lorient le 15 mars 1878, fonction qu’il conserva jusqu’à sa mort.

Pour citer cet article :
https://maitron.fr/spip.php?article213845, notice RATIER Gustave [RATTIER Simon François Marie Gustave] par Gauthier Langlois, version mise en ligne le 28 mai 2019, dernière modification le 28 novembre 2020.

Par Gauthier Langlois

ŒUVRE : Rapport du frère Ratier [au Grand Orient de France], Paris : typ. A. Lebon, [1870 ?].

SOURCES : Archives départementales de l’Indre, Acte de naissance, Acte de mariage. — Archives départementales du Morbihan, Acte de décès. BnF, Notice autorité Ratier, Gustave. — A la France. L’agent provocateur Hubert, Jersey : imp. universelle, [1853]. — Victor Hugo, « 1853-L’espion Hubert », Œuvres inédites de Victor Hugo. Choses vues, 1888, p. 291-330. — Alphonse-Marius Gossez, « Deux documents relatifs à la surveillance politique des proscrits de l’Empire réfugiés à Jersey », Revue d’histoire du XIXe siècle, tome 28, n° 138, Septembre-octobre-novembre 1931 p. 135-138. — Jean-Claude Farcy, Rosine Fry, « Ratier - Marie Simon François Gustave », Poursuivis à la suite du coup d’État de décembre 1851, Centre Georges Chevrier - (Université de Bourgogne/CNRS), [En ligne], mis en ligne le 27 août 2013. — Journal du Morbihan, 5 octobre 1877, — Le Phare de Bretagne, 18 avril 1880. — L’Avenir du Morbihan, 28 mai 1893. — Adolphe Robert et Gaston Cougny, « François Ratier », Dictionnaire des parlementaires français, Edgar Bourloton, 1889-1891. — René Bargeton, « RATIER, Simon François Marie Gustave, Dictionnaire biographique des préfets (septembre 1870-mai 1982), Paris : Centre historique des Archives nationales, 1994.

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