MAGNIN Philomène

Par André Vessot

Née le 25 avril 1905 à Caluire [Caluire-et-Cuire] (Rhône), morte le 29 août 1996 à Lyon (IIIe arr.) ; domestique, apprentie vendeuse ; employée ; syndicaliste CFTC du Rhône ; conseillère municipale de Lyon ; conseillère générale du Rhône (1945-1949 et 1961-1985) ; conseillère régionale Rhône-Alpes (1973-1976) ; militante MRP puis CDS.

Photo publiée avec l’autorisation de Michel Loude.

Philomène Magnin naquit dans une famille modeste, croyante et pratiquante. Elle était la fille de Claude, jardinier et de Marie Emélie Philomène Hilaire, femme de ménage dont l’enfance a été difficile.

Philomène Magnin perdit son père en 1911 alors qu’elle n’avait seulement que six ans. Sa mère travailla de façon harassante, parfois 18 heures par jour, et les fins de mois furent difficiles. En 1918, l’école se termina pour la jeune Philomène, avec le certificat d’études primaires. La situation précaire de sa mère, femme de ménage, ne permit pas de faire vivre deux personnes. A 14 ans, comme un grand nombre de filles du peuple, Philomène commença donc à travailler, d’abord comme domestique chez des particuliers, apprentie-vendeuse dans un magasin de chaussures, puis employée dans une fabrique de parapluies (la maison Revel), elle finit par se retrouver vendeuse dans un magasin d’optique, place des Célestins à Lyon.

Au patronage catholique, elle assista à une conférence faite par « un syndicaliste qui parlait du triste sort des femmes exploitées ». En octobre 1919, âgée de 14 ans, elle adhéra à la CFTC : « J’avais un réel désir de me former pour défendre les faibles ».

Elle se forma avec les Semaines syndicales organisées par la Chronique sociale : « C’étaient des cours exceptionnels : on comprenait la triste réalité du monde du travail par les récits impitoyables qu’en faisaient les formateurs, tous ouvriers syndiqués ». C’est là qu’elle fit la connaissance d’Andrée Butillard.

De 1919 à 1929, Philomène Magin participa à la lutte du syndicat pour défendre les ouvrières à domicile, les dévideuses en soierie. Grâce à la formation juridique, économique et politique, puis l’Ecole normale ouvrière sous l’égide de la CFTC, Philomène Magnin devint une syndicaliste chevronnée. Elle était une pionnière dans la défense des droits des femmes.

Dès 1924, alors secrétaire de la « section employés de commerce », elle mit sur pied, avec des camarades, la première convention collective pour les acteurs du commerce de détail non alimentaire. Ce fut un premier succès. Les vendeuses ne furent pas oubliées, pas plus que les « ouvrières de la dorure » pour lesquelles elle obtint un nouveau succès. En 1936, elle était membre du bureau de l’Union départementale CFTC du Rhône. Elle eut alors plusieurs mois d’interruption professionnelle à cause de la tuberculose. Elle fut envoyée en préventorium puis en convalescence dans un organisme tenu par les syndicats.

Philomène Magnin adorait sa ville et pendant son repos forcé, elle "engloutit" une bonne partie de la littérature des canuts écrite pas Pierre Dupont, Benoist Mary ou la mère Cottivet Lors d’un congrès de la CFTC en 1936-1937, à la demande du président, elle porta un toast en vieux lyonnais qui fut vivement applaudi.
Parallèlement, elle suivit des cours du soir en droit. Elle s’initia au monde des sciences politiques et obtint un poste à L’Echo de Fourvière, une revue religieuse. Militante pour le syndicalisme féminin, et le vote des femmes, Philomène Magnin était au cœur des débats sociaux qui agitèrent la France durant l’Entre-Deux-Guerres, notamment lors du Front Populaire.

A la Libération en 1944, elle fut désignée par son syndicat et en accord avec le Conseil national de la Résistance (CNR) pour siéger au conseil municipal provisoire de Lyon, présidé par Justin Godart. Elle fut la première femme à y siéger. Elle fut élue l’année suivante dans l’équipe d’Édouard Herriot puis de Louis Pradel.

Elle était administratrice des Hospices Civils de Lyon de 1944 à 1959.
Elle était conseillère générale du Rhône de 1945 à 1949 sous l’étiquette MRP (Mouvement républicain populaire) dans le 6ème canton de Lyon.. Aux élections de 1949, elle refusa certaines voix de la Droite locale et fut battue. Elle redevint conseillère générale de 1961 à 1985 sous l’étiquette du CDS (Centre des démocrates sociaux), issu majoritairement du MRP..

Elle fit partie de la commission d’action sociale dans le cadre de l’élaboration du 6ème plan.

Elle siégeait aussi à la Communauté urbaine de Lyon de 1969 à 1977 et au Conseil régional Rhône-Alpes de 1973 à 1976.

Chargée des questions sociales, elle innova avec "Ma Demeure", une maison de retraite constituée d’appartements pour personnes seules ou en couple et de services communs, pour les soins, la restauration, les loisirs..., maison qui servira de modèle aux Etablissements d’hébergement de personnes âgées dépendantes (EHPAD). Cette réalisation fut la première maison de retraite médicalisée en Europe.

Son expérience des combats des femmes l’amèna à prendre des positions audacieuses contre l’opinion parfois de son électorat et du monde catholique. « Il fallait une dose impressionnante de courage pour cautionner, dans les années 1970, les projets du planning familial, les lois Neuwirth sur la contraception, les lois Weil sur l’avortement ».

Âgée de 78 ans, elle se retira en 1983 à "Ma Demeure".

Elle décéda le 29 août 1996 à Lyon (IIIe arr.).

Pour citer cet article :
https://maitron.fr/spip.php?article215400, notice MAGNIN Philomène par André Vessot, version mise en ligne le 8 mai 2019, dernière modification le 20 mai 2019.

Par André Vessot

Photo publiée avec l’autorisation de Michel Loude.

SOURCES : Arch. Dép. Rhône. — Michel Loude in L’aube des citoyennes, Jacques André éditeur, 2004. — Le Progrès, quotidien régional, 10 mai 2015, — Journal officiel de la République française, 10 octobre 1969. . — Arch. Diocèse Lyon.

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