Par Gauthier Langlois
Né le 3 juillet 1808 à Saint-Georges-sur-Cher (Loir-et-Cher), mort au même lieu le 13 septembre 1874 ; avoué au Mans (Sarthe) ; militant socialiste, il participa à une tentative d’insurrection contre le coup d’État du 2 décembre 1851. Recherché, il réussit à échapper à la police et se réfugia à Jersey où il intégra la communauté des proscrits animée par Victor Hugo.
Sylvain Fameau fut déclaré à l’État civil fils de Nicolas Fameau sabotier et Silvine Dugué. Par erreur Victor Hugo écrivait son nom Famot. En 1851, célibataire, Fameau exerçait au Mans (Sarthe).
Opposant au coup d’État du 2 décembre 1851, il participa à une tentative d’insurrection pour laquelle il fut recherché. En janvier 1852 les autorités publièrent, par voie de presse et d’affiches, l’avis de recherche suivant :
« Le gouvernement vient de donner l’ordre de faire rechercher et arrêter partout où elles seront trouvées les personnes dont les noms suivent :
1. Trouvé Chauvel ex-banquier ex-ministre, âgé de 45 ans ;
2. Jean-Michel Cutivel, âgé de 40 ans ;
3. [Félix] Pierre, ex-greffier de justice de paix, âgé de 43 ans ;
4. Veillard-Lebreton, ex-limonadier, âgé de 34 ans ;
5. Trouvé-Freslon tanneur, âgé de 47 ans ;
6. Édouard Trouvé, commis de banque ;
7. Silly, ex-rédacteur de journal ;
8. [Jean] Milliet, ex-capitaine de la garde nationale, âgé de 50 ans ;
9. Sylvain Parfait Fameau, avoué, âgé de 43 ans.
Des mandats d’amener ont été décernés contre ces neufs personnes, qui ont pris la fuite et qui sont inculpées d’être auteurs ou complices de l’insurrection qui a eu lieu à La Suze (Sarthe). »
Malgré les efforts des autorités Sylvain Fameau échappa à l’arrestation. Aussi, la Commission mixte de la Sarthe, entérinant un état de fait, le condamna à l’expulsion du territoire. Elle motiva sa décision par les attendus suivants : « Considérant, en ce qui concerne les Srs Fameau, [Édouard] Laboussinière, [Victor] Louchet, Michel, [Joseph] Butté, Philippe Faure, [Alexis] Hamonet, [François] Neveu, [Louis Martin] Jouffreau, Louis Lair, [Jean Joseph Félix] Milliet qu’ils sont tous depuis longtemps affiliés, comme directeurs ou agents principaux, à la société politique qui, sous divers titres, s’était donné la mission de répandre, dans le département de la Sarthe les principes démagogiques ou socialistes ; qu’à toutes les époques on les a vu rédiger ou distribuer des écrits de cette société, convoquer ou présider ses réunions, assurer l’exécution de ses décisions et, en un mot, s’efforcer de diriger l’opinion publique dans le sens de ses doctrines, ainsi que l’attestent toutes les pièces saisies au domicile du sieur Bouteloup. Que lors des événements du 2 décembre, ils étaient à la tête d’une organisation dont le but était de changer la forme du Gouvernement, sauf à attendre l’époque et saisir le prétexte que les circonstances fourniraient, et que pendant le moment venu, ils se sont efforcés d’assurer l’exécution des plans par eux depuis longtemps médités ; qu’en négligeant les allées et venues des premiers jours ainsi que la tentative faite dans la nuit du 3 décembre contre l’hôtel de ville du Mans, il ressort de l’instruction que le 5, à une heure de l’après-midi, les sus nommés se sont assemblés au domicile du sieur Fameau, l’un d’eux, qu’ils ont désigné comme Président et qu’ils ont ouvert une délibération ; que l’objet de cette délibération était : prendra-t-on les armes ? Quel jour et à quelle heure le fera-t-on ? Qu’il fut résolu d’attendre au lendemain 5, à quatre heures de l’après-midi ; que le plan était de remplacer violemment toutes les autorités alors en exercice ; d’installer à leur place des administrations provisoires et de paralyser ainsi toute l’action gouvernementale du Président de la République. »
Sylvain Fameau choisit, avec ses compatriotes Ariste Jacques Trouvé Chauvel, Jean-Michel Cutivel, Louis Lair, Constant Veillard-Lebreton et Philippe Faure, de se réfugier à Jersey dans la communauté de proscrits animée par Victor Hugo. Il participa aux activités sociales de cette communauté comme membre de la société d’entraide La Fraternité qui aidait notamment le proscrit sans le sou Julien Hubert. Ce dernier avait réussi à le convaincre de revenir en France —avec Bertrand Gigoux, Félix Jarrassé, Jego, Arsène Hayes et Adolphe Rondeau— pour participer à un projet d’insurrection contre Napoléon III. Mais la couturière Mélanie Simon dénonça Hubert comme espion. Au terme d’une enquête menée par ses camarades de La Fraternité, il participa, le 21 octobre 1853, à l’assemblée générale des proscrits républicains résidant à Jersey qui déclara le sieur Julien Hubert comme espion et agent provocateur de la police de Napoléon III.
Selon son dossier de pension il aurait séjourné ensuite en Espagne.
Revenu en France il retourna dans son village natal comme propriétaire. Il y épousa, le 29 juillet 1857, Marie-Sainte Vitalis veuve Despré, âgée de 60 ans. Veuf il épousa en secondes noces, le 10 juillet 1865, Esther Vitalis veuve Brunet, une probable parente de sa première femme.
Par Gauthier Langlois
SOURCES : Archives départementales du Loir-et-Cher, Acte de naissance, Acte de mariage, Acte de décès. — « Banquet démocratique offert par les patriotes du Mans au citoyen Joly », Le Bonhomme Manceau, 14 septembre 1849, p. 65. — Journal de Toulouse, 27 janvier 1852. — Victor Hugo, « 1853-L’espion Hubert », Oeuvres inédites de Victor Hugo. Choses vues, 1888, p. 291-330. — Gérard Boëldieu, « Sur six proscrits sarthois, compagnons d’exil de Victor Hugo à Jersey », Gavroche, n° 158, avril-juin 2009, p. 24-33. — Denise Devos, La Troisième République et la mémoire du coup d’Etat de Louis-Napoléon Bonaparte : la loi de réparation nationale du 30 juillet 1881 en faveur des victimes du 2 décembre 1851 et des victimes de la loi de sûreté générale du 27 février 1858 : F15 3964 à 4023, Paris, Archives nationales, 1992, p. 438. — Jean-Claude Farcy, Rosine Fry, « Fameau - Sylvain Parfait », Poursuivis à la suite du coup d’État de décembre 1851, Centre Georges Chevrier - (Université de Bourgogne/CNRS), [En ligne], mis en ligne le 27 août 2013.