FORGET Charles, Emile, Jean

Par Bernard Geay

Né le 6 juillet 1923 à Nantes (Loire-Inférieure, Loire-Atlantique), mort le 14 janvier 2009 à Rezé (Loire-Atlantique) ; ouvrier chaudronnier, puis chef d’équipe ; syndicaliste CFTC puis CFDT, secrétaire de la section chez Brissonneau et Lotz à Nantes (1949-1959), secrétaire de l’Union des Métaux de Nantes (1959-1968), membre du conseil et de la commission exécutive de l’Union départementale de Loire-Atlantique (1959-1967), membre du conseil de la Fédération générale de la métallurgie (1961-1968).

Charles Forget en 1960.

Le père de Charles Forget, également prénommé Charles (1899–1975), était ouvrier porte-faix sur le port de Nantes. La mère de Charles, Renée Ploteau (1898–1947), sans profession, est décédée de maladie. La famille a eu un seul enfant et était catholique pratiquante. Charles Forget milita à la Jeunesse ouvrière chrétienne (JOC) et plus tard à l’Action catholique ouvrière (ACO).
Après l’école primaire, à l’âge de quatorze ans, il entra en apprentissage de chaudronnier-ferblantier chez Brissonneau et Lotz à Nantes, une entreprise d’équipements navals. Il fut ensuite embauché comme ouvrier chaudronnier dans la même usine, alors située dans le quartier de Doulon. Pendant la guerre, il fut réquisitionné dans le cadre du STO et envoyé travailler en Allemagne près de Dantzig (aujourd’hui Gdansk en Pologne) où il resta deux ans.
Après la guerre, Charles Forget retourna chez Brissonneau et Lotz comme chaudronnier. Il fut promu chef d’équipe après quelques années. Il adhéra à la CFTC dès son embauche et devint rapidement militant et représentant du personnel. Il fut élu délégué du personnel et membre du comité d’entreprise dès 1949. Par courrier du syndicat en date du 5 mai 1949, il fut désigné délégué syndical en remplacement de Lucien Billot et devint donc le secrétaire de la section syndicale de l’entreprise.
Charles Forget participa au long conflit de l’été 1955 dans la métallurgie nantaise et fut membre du comité intersyndical de grève au titre de la CFTC. Ce conflit sur les salaires, intervenant après la grève victorieuse de la métallurgie nazairienne quelques semaines plus tôt, se termina par un beau succès avec 16 % d’augmentation en moyenne. Il marqua fortement l’histoire sociale du département et consolida l’implantation ouvrière de la CFTC. D’ailleurs, aux élections à la Sécurité sociale de décembre 1955, la CFTC devint majoritaire pour la première fois en Loire-Inférieure.
Charles Forget fut élu second secrétaire permanent de l’Union des Métaux CFTC de Nantes lors de son VIIe congrès le samedi 4 avril 1959. Il avait en charge le suivi du secteur de la mécanique. Deux ans plus tard, il remplaça Pierre Evain en tant que secrétaire de l’Union des Métaux, après que celui-ci eut accepté de devenir permanent au secrétariat national de l’ACO. Il demeura secrétaire de l’Union jusqu’à l’été 1968. Selon la Voix des Travailleurs (organe mensuel de l’UD), dans son numéro de septembre 1968, il assura ses fonctions « avec clairvoyance et beaucoup de compétences ». Sur la même période, il siégea aussi au conseil et à la commission exécutive de l’Union départementale (UD) de Loire-Atlantique. À ce titre, il représenta l’UD au conseil confédéral de la CFTC/CFDT. Il a également été membre du conseil de la Fédération générale de la métallurgie de 1961 à 1968.
Tout en étant secrétaire des Métaux, il situa aussi son action dans une dimension interprofessionnelle. Jusqu’en 1961, il a notamment assuré pendant deux ans, comme permanent à mi-temps, le démarrage du syndicat CFTC de l’Industrie alimentaire. Il était responsable au niveau départemental des questions d’emploi et il siégea au bureau de l’Assedic de la Basse-Loire dès sa création en 1959.
En mai 1962, en tant que syndicaliste ouvrier et membre de l’ACO, Charles Forget fut appelé à témoigner devant le tribunal en faveur de cinq militants pacifistes de l’Action civile non-violente (ACNV). Ceux-ci avaient été incarcérés pour s’être enchaînés le 23 mars 1962 aux grilles du théâtre Graslin à Nantes, en protestation contre la guerre d’Algérie.
Comme l’immense majorité des métallos CFTC qui, au conseil national de la FGM en octobre 1964, ont voté à 82 % en faveur de la déconfessionnalisation, Charles Forget fut favorable à l’évolution de l’organisation. Il participa, dans la délégation de Loire-Atlantique, au congrès confédéral extraordinaire des 6 et 7 novembre 1964 à Paris qui vit la naissance de la CFDT.
En responsabilité au moment de Mai-Juin 1968, Charles Forget prit une part active au mouvement et fut de presque toutes les manifestations. Il y prit la parole au nom de la CFDT à plusieurs reprises, notamment le samedi 1er°juin, jour de la manifestation gaulliste à Nantes, où un contre-défilé se forma spontanément. Une photographie de la presse locale le montre s’adressant, ce jour-là, aux manifestants sur les marches du monument aux cinquante otages, près de la préfecture. Dans sa prise de parole, il soulignait que « de l’autre côté, il y a tous les patrons mais de notre côté, il y a la jeunesse ».
En tant que secrétaire des Métaux CFDT de Nantes, Charles Forget eut à conduire les négociations avec le patronat de la métallurgie qui se terminèrent par un accord le dimanche 16 juin. Les résultats obtenus sur les salaires et le droit syndical facilitèrent la reprise du travail les jours suivants dans les entreprises de la métallurgie nantaise qui furent parmi les dernières à terminer la grève.
Voici comment François Le Madec décrivit Charles Forget en 1968 dans L’Aubépine de mai, récit de la grève avec occupation à Sud-Aviation Bouguenais : « Petit, sec et nerveux, un profil tendu et racé de militant depuis plus de 20 ans sur la brèche, c’est un esprit alerte et prompt qui sait donner à chaque évènement la grandeur exigée, ayant toujours une « antenne » largement déployée sur la vie et l’évènement ouvrier » (p.73).
À la fin de l’été 1968, il mit un terme à son mandat de permanent Métaux et fut remplacé par Daniel Rémond. Il entra alors comme enquêteur à l’Assedic de la Basse-Loire le 2 septembre 1968. Au fil du temps, il gravit les échelons et devint chef du service Enquêtes de l’organisme, où il resta jusqu’à sa retraite.
Charles Forget s’était marié en 1946 avec Renée Coutant (1923-2012). Le couple a eu cinq enfants, deux filles et trois garçons.

Pour citer cet article :
https://maitron.fr/spip.php?article215803, notice FORGET Charles, Emile, Jean par Bernard Geay, version mise en ligne le 20 juin 2019, dernière modification le 13 janvier 2021.

Par Bernard Geay

Charles Forget en 1960.

SOURCES : Arch. CFDT du Centre d’Histoire du Travail de Nantes. — Voix des Travailleurs, n° 125 d’avril 1959 et n° 217 de septembre 1968. — François Le Madec, L’Aubépine de mai. Chronique d’une usines occupée, Nantes, Édition CDMOT, 1988. — Le mai 68 de la CFDT en Loire-Atlantique, Nantes, Édition du CHT, 2018. — Frank Georgi, Soufflons nous-mêmes notre forge. Une histoire de la fédération de la métallurgie CFTC-CFDT 1920-1974, Paris, Éditions ouvrières/Éditions de l’Atelier, 1991. — Note de Robert Gourhand sur le procès de cinq militants pacifistes en 1962.

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