BRAUN Otto

Par Jacques Droz

Né le 29 janvier 1872 à Königsberg, mort le 25 juillet 1955 à Ascona (Tessin) ; leader social-démocrate, ministre prussien.

Fils de cheminot, imprimeur dans sa ville natale, Otto Braun, protégé par Hugo Haase, entra au sein du parti dans le groupe des Jeunes, qui s’élevaient contre la politique réformatrice et parlementaire, dirigeant dans ce sens la Königsberger Volkszeitung. Intéressé parles questions paysannes et publiant de nombreux ouvrages de propagande contre le système de la grande propriété est-elbienne, il fut l’un des premiers élus socialistes au Landtag de Prusse (1913). Engagé dans la majorité du parti au cours de la Première Guerre mondiale, il participa aux côtés d’Ebert et de Scheidemann à l’échec de la grève révolutionnaire de janvier 1918. Après la guerre, il fut élu à l’Assemblée nationale, puis au Reichstag et au Landtag prussien dont il demeura membre jusqu’en 1933. Après le putsch de Kapp, il fut chargé de la constitution du ministère prussien où il occupa d’abord les fonctions de ministre de l’Agriculture, puis de président du Conseil. Dans ces fonctions, il manifesta le souci constant de démocratiser la Prusse, dont il pensait qu’elle devait jouer un rôle hégémonique dans l’Allemagne de Weimar : du modèle de l’Obrigkeitsstaat (État autoritaire) allemand, il fit le bouclier le plus solide de la République, ce qui lui valut le surnom de « tsar rouge ». Dans son effort pour transformer les cadres directeurs du nouvel État, il obtint un succès incontestable dans la haute administration, plus limité pour la police, presque nul dans la magistrature. Il eût également souhaité mettre fin aux privilèges du Junkertum mais il se heurta dans ce domaine à la plus vive résistance : son programme d’abrogation des dettes des petits propriétaires fut considéré comme du « bolchevisme agraire » et dans la question de la Osthilfe, il subit un échec complet. Membre du Parteivorstand, il fut présenté parle SPD comme candidat à la présidence de la République en 1925, mais se désista au second tour pour le catholique Wilhelm Marx. Il soutint plus tard la poltique de « tolérance » à l’égard du cabinet Brüning comme « la solution souhaitée par toutes les personnalités raisonnables ». Objet d’attaques de plus en plus violentes de la part de la droite et des communistes, il se fit mettre en congé et s’inclina sans résistance, et avec une entière résignation, devant le coup d’État de von Papen, qui lui retira ses fonctions ministérielles en juillet 1932, tout en lui laissant certains privilèges honorifiques dont il jouit jusqu’à l’avènement de Hitler.
En mars 1933, il émigra aussitôt dans le Tessin, ce qui lui fut amèrement reproché par ses amis politiques. Dans la maison d’Ascona qu’il s’était fait construire, il publia chez l’éditeur suisse Oprecht son livre Von Weimar zu Hitler (1940) où il exprimait sa confiance dans la destinée de la Prusse et son droit d’assurer à nouveau la présidence du ministère prussien. Mais ce ne fut que pendant la seconde moitié de la guerre qu’il reprit contact avec certains milieux résistants en Suisse, en particulier avec le catholique Joseph Wirth, avec lequel il créa une communauté de travail, Das demokratische Deutschland. Dans l’intention d’influencer la politique des Alliés après la guerre, il publia un mémoire, Nach dem Zusammenbruch (1943), dans lequel il suggérait de restaurer autant que possible le régime de Weimar et de réédifier la Prusse, protestant contre la thèse de la culpabilité collective du peuple allemand, ce qui lui valut de vives controverses avec les organisations communistes et avec Joseph Wirth. Ayant vu ses projets échouer, il se retira complètement de la vie publique en 1945.

Pour citer cet article :
https://maitron.fr/spip.php?article215985, notice BRAUN Otto par Jacques Droz, version mise en ligne le 23 juin 2020, dernière modification le 14 février 2020.

Par Jacques Droz

ŒUVRE : Outre les ouvrages cités dans le texte : Deutscher Einheitsstaat oder Föderativsystem, 2e éd., 1927.

SOURCES : M. Beer, Otto Braun als preussischer Ministerpräsident 1925-1932, Diss. Würzbourg, 1970. — E.D. Kohler, Otto Braun. Prussia and Democracy 1872-1955, Diss. Stanford, 1971. — W. Matull, Otto Braun, Preussischer Ministerpräsident der Weimarer Zeit, Dortmund, 1973. — H. Schulze, Otto Braun oder Preussens demokratische Sendung. Eine Biographie, Francfort, 1977. — G. A. Craig, Das Ende Preussens. 8 Porträts, Munich, 1985. — Osterroth, op. cit. — Benz et Graml, op. cit. — Lexikon, op. cit.

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