SALL Alioune Badara dit Paloma

Par Françoise Blum et Martin Mourre

Né le 25 août 1951 à Saint-Louis (Sénégal), Consultant, militant anti-impérialiste.

Alioune Sall est né à Saint-Louis (Sénégal) le 25 août 1951, d’une famille de la bourgeoisie sénégalaise. Son père est administrateur civil. Il fait ses études à Saint-Louis puis au lycée Van Vollenhoven de Dakar avant de gagner Paris, après un bac obtenu en septembre 1968. Il a d’ailleurs pleinement participé au mouvement de mai 68 au Sénégal. En juillet 1968, Senghor, curieux de comprendre une jeunesse contestatrice les a d’ailleurs reçus, lui et quelques amis. Il leur a vanté , face aux théories contestatrices mises en avant par les jeunes gens, la négritude, à son avis théorie tout aussi anti-impérialiste qu’un marxisme-léninisme importé. Sachant qu’Alioune a fait à Van Vollenhoven des études de grec, il souhaite le voir partir pour la France, et intégrer l’Ecole des chartes. Mais en France Paloma préfère s’inscrire en philosophie, sciences politiques et sociologie dans la nouvelle université de Vincennes. Il habite alors rue de Valence et héberge des expulsés du Sénégal à la suite des évènements de 68. Ils forment un groupe d’amis parmi lesquels Omar Blondin Diop, Isabelle et Antoine Gallimard, ou Sylvina Boissonnas, future fondatrice des Editions des femmes et fille de général qui va financer les aventures ultérieures d’Omar et Paloma. Sa vie va changer après la procès des incendiaires à Dakar et leur condamnation à de très lourdes peines de prison. Quelques jeunes gens dont deux frères d’Omar, Diallo et Mohammed avaient mis le feu au Centre culturel français , à la direction des mines et à quelques voitures d’assistants techniques, incendies sans gravité par ailleurs. Ils avaient eu aussi le projet de lancer des cocktails Molotov sur le cortège de Pompidou, en visite à Dakar mais avaient été arrêtés avant exécution. Au vu de ces événements, Omar et Paloma , décident de partir pour la Syrie, pour un entrainement militaire dans un camp du Fatah, Beth Naïm, où ils côtoient outre les Palestiniens des Erythréens ainsi que quelques français. Alioune et Omar y restent 2 mois puis, via Paris, rejoignent cette Algérie qui est alors la Mecque des révolutionnaires. Ils cherchent à établir des liens avec les Blacks Panthers, alors présents à Alger car ils voient en eux de possibles soutiens dans leurs désirs de guérilla urbaine révolutionnaire, et surtout des médiateurs possibles dans le projet qu’ils mûrissent alors : enlever l’ambassadeur de France au Sénégal pour l’échanger contre les « incendiaires ». Mais, alors que les deux jeunes gens sont en Algérie, les Black Panthers connaissent une grave crise qui contrarie leurs projets d’alliance. Ils partent pour la Guinée de Sékou Touré, mais on les refoule dès l’aéroport. La Guinée vient de connaitre une attaque de mercenaires portugais et guinéens de l’exil et une grave paranoïa y sévit. Ils sont rembarqués dans un avion de l’aeroflot, seule compagnie alors à assurer la liaison avec l’Algérie mais s’en échappent à l’escale de Bamako. Ils entrent cette fois sans problème dans un pays gouverné alors par le régime militaire de Moussa Traoré, qui a renversé en 1968 le régime socialiste de Modibo Keita. Ils y logent chez une tante d’Omar, en prétendant être là pour travailler sur la philosophie Dogon. Ils restent au Mali de juin à novembre 1971, essayant de mettre au point une stratégie pour l’enlèvement projeté. Pendant ce temps, les prisonniers de Dakar se sont mutinés, tentant une évasion à l’aide de complicités dans la prison de Gorée (Suzanne Socq la fille du régisseur). Mais Senghor va rendre visite au Mali, une visite de réconciliation qui n’avait pas encore eu lieu depuis l’éclatement de la Fédération en août 1960. Par prudence, on arrête Alioune et Omar, sur lequel on trouve des lettres compromettantes pour eux-mêmes et certains de leurs camarades restés à Dakar. Alioune et Omar vont passer 3 mois dans les cellules de commissariats maliens avant d’être extradés vers le Sénégal. Ils sont condamnés de même que leurs acolytes à 3 ans de prison. Omar mourra en prison mais Alioune bénéficiera de la grâce de Senghor qui s’étend , en mars-avril 1974 à l’ensemble des prisonniers politiques détenus au Sénégal. Alioune Sall repart alors en France où il termine son troisième cycle. Il revient ensuite à Dakar où il rencontre Samir Amin qui lui offre un poste de chercheur à l’IDEP (Institut Africain de Développement Economique et de Planification) , dans une section spécialisée en matière d’environnement où il travaille sur les vertus comparées du pastoralisme face à la sédentarisation, et, de manière plus générale sur la prospective. Il travaille ainsi en liaison étroite avec Samir Amin et sous la direction de Jacques Bonicourt. Un contrat avec l’UNITAR (Institut des Nations unies pour la formation et la recherche) le familiarisera avec les Nations Unies et quand l’IDEP subit une compression de personnel, en 1979 il trouve un poste au PNUD (Programme des Nations unies pour le développement) qui l’envoie à Ouagadougou de 1979 à 1986. Il y connait Thomas Sankara et dit avoir contribué à la rédaction du fameux discours de Sankara à l’ONU. Après le Burkina, il est brièvement consultant indépendant à Dakar où il a créé un organisme baptisé PRODEST avant de recommencer à travailler pour les NU, cette fois à New-York, dans une division qui vient d’être créée et qui a pour objectif de réfléchir aux coordinations possibles avec la société civile. EN 1993, il est envoyé par le PNUD en éclaireur en Afrique du Sud pour envisager l’ouverture d’un bureau du PNUD, ce qui n’était pas possible du temps de l’apartheid. En 1995, il regagne New-York où il va être directeur de cabinet d’Ellen Johnson Sirleaf, alors directrice du PNUD. Mais il ne la suivra pas dans ses ambitions présidentielles. Il se retrouve cette fois à Abidjan à travailler sur la prospective et ce, jusqu’en 2002, puis repart pour l’Afrique du Sud. Il vit, au moment où cette notice est rédigée, à cheval sur plusieurs pays.

Pour citer cet article :
https://maitron.fr/spip.php?article216080, notice SALL Alioune Badara dit Paloma par Françoise Blum et Martin Mourre, version mise en ligne le 31 mai 2019, dernière modification le 3 septembre 2020.

Par Françoise Blum et Martin Mourre

Sources : Entretien avec Alioune Sall, Dakar, mai 2019

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