Par Serge Cosseron
Né le 10 août 1878 à Stettin, mort le 28 juin 1957 à Emmendingen (Forêt Noire) ; médecin et écrivain socialiste.
Fils d’un tailleur juif, Alfred Döblin s’installa avec ses parents à Berlin en 1888. Après de bonnes études au lycée, il se dirigea vers la carrière médicale après avoir été diplômé de l’Université de Fribourg en 1905, avec un travail sur les troubles de la mémoire dans la psychose de Korsakoff. C’est donc tout naturellement vers les maladies mentales qu’il porta son attention. Il fut d’abord médecin dans un institut psychiatrique à Ratisbonne puis, de 1911 à 1933 à Berlin, dans les mutualités pour les maladies mentales. Simultanément, il se lança dans l’écriture ; à une activité strictement littéraire, il ajouta une pratique journalistique intense. Très tôt mêlé aux milieux littéraires d’avant-garde de Berlin, il fut cofondateur de la revue expressionniste Der Sturm en 1910.
En 1918, il adhéra à l’USPD ; refusant dépasser au KPD, il rejoignit en 1921 le SPD qu’il quittera avec fracas en 1929, à la suite de l’adoption des Schand- und Schmutzgesetze (lois scélérates). Auteur de nombreuses critiques théâtrales pour le Prager Tageblatt de 1921 à 1924, après avoir signé une chronique politique dans la Neue Rundschau de 1919 à 1921, sous le nom de Linke Poot, Döblin s’affirma comme un maître de la littérature contemporaine.
Il révolutionna l’écriture romanesque en utilisant la technique du montage dans Berlin Alexanderplatz qui obtint un succès immédiat. Marqué par son expérience de médecin d’une grande métropole, il montra l’impuissance de la force humaine face à la violence de la nature et des forces collectives.
En 1933, il fuit le nazisme triomphant, gagna la Suisse et se rendit en France où il fut accueilli par Jean Giraudoux ; iî travailla au ministère de l’Information, et obtint la nationalité française en 1936. En 1940, il se rendit aux États-Unis par l’Espagne et le Portugal, voyage qu’il décrivit dans Schicksalsreise (1940). De retour en Europe en 1945, il travailla au « bureau des lettres », sous la direction des Forces d’occupation françaises, à Baden-Baden. Installé à Baden-Baden puis à Mayence, il ne fut toutefois pas reconnu dans la nouvelle Allemagne et décida de se réinstaller à Paris en 1953, où il vécut jusqu’en 1956. Il avait consacré les années d’après- guerre à la poursuite de la rédaction d’une œuvre romanesque considérable consacrée à la révolution de novembre 1918, November 1918 (1948-1950) dont le premier tome, Bourgeois et soldats, avait été publié en 1941. Il fut enterré à Housseras (Vosges).
Par Serge Cosseron
ŒUVRE : Aüsgewählte Werke in Einzelbänden, éd. par W. Muschg, 1960ss. — Scbriften zu Ästhetik, Poetik und Literatur, 1989. — En français : Berlin Alexanderplatz, 1980. — L’Assassinat d’une renoncule, 1984. — L’empoisonnement, 1988. — Hamlet ou la longue nuit prend fin : roman, 1988. — Sur la musique. Conversations avec Calypso, 1989. — Le Tigre bleu : roman, 1989. — Bourgeois et soldats, 1990. — Novembre 1918, une révolution allemande, 1990.
SOURCES : R. Links, Allred Döblin. Leben und Werk, Berlin, 1965. — W. Kort, Alfred Döblin. Das Bild des Menschen in seinen Romanen, Bonn, 1970. — K. Schrôter, Alfred Döblin in Selbstzeugnissen und Bilddokumenten, Reinbek, 1980. — W. Laqueur, Weimar. Une histoire culturelle de l’Allemagne des années vingt, Paris, 1978. — « L’Expressionisme allemand », in Obliques, no. spécial, 1981. — H. Kiesel, Literarische Trauerarbeit : das Exil- und Spàtwerk Alfred Döblins, Tübingen, 1986. — Durzak, op. cit. — Rœder et Strauss, op. cit.