EICHLER Willi

Par Jacques Droz

Né le 7 janvier 1896 à Berlin, mort le 17 octobre 1971 à Bonn ; résistant social-démocrate au nazisme.

Doté d’une formation commerciale, Willi Eichler fut pendant cinq ans (1923- 1927) le secrétaire du philosophe Leonard Nelson. Il hérita de lui sa doctrine, qui faisait dépendre l’organisation de l’État de principes purement rationnels et qui poursuivait l’établissement d’un socialisme éthique et rigoureusement égalitaire : aux élites seules revenait déjuger et de décider. Eichler fit partie de l’lnternationaler Jugendbund (IJB), dont l’organisation était autoritaire et hiérarchisée, qui excluait toute appartenance à une Église et qui exigeait de ses membres l’abstinence de tout alcool et une nourriture végétarienne. Lorsque l’IJB fut exclue de la social-démocratie en 1925, il participa à la constitution de l’internationaler sozialistischer Kampfbund (ISK), dont il assura la présidence après la mort de Nelson (1927), dirigeant la revue Der Funke (L’Étincelle), soumettant ses fidèles à une discipline sévère à l’école de cadres de Walkemühle. Il appartenait également à l’Association allemande des libres penseurs.
Obligé d’émigrer en France en 1933, il continua à soutenir les groupes de l’ISK demeurés en Allemagne, soit à travers l’ITF (Fédération internationale des transports) dont l’animateur, le hollandais Edo Fimmen, était au centre de l’opposition syndicale internationale, soit par l’envoi des Reinhart-Briefe soit par la publication de la Sozialistische Warte qui parut également en espéranto. Malgré ses préventions initiales, Eichler participa aux négociations du Comité Lutetia pour la formation du Front populaire allemand (1936) puis, hostile aux prétentions delà SOPADE, il collabora à la formation de l’Arbeitsausschuss deutscher Sozialisten. Expulsé de France à cause de ses activités politiques, Eichler se replia au Luxembourg puis, grâce à la protection de Lord Cecil, à Londres. Il y reconstitua avec une vingtaine de membres l’ISK, précisant sa doctrine hostile à la fois au marxisme et au système parlementaire. Cependant, un certain nombre de partisans de l’ISK se séparèrent de lui. Comme Fritz Eberhard (de son nom d’origine Hellmut von Rauschenplatt), ceux-ci préconisaient à la radio (Sender der europäischen Revolution), avec Waldemar von Knöringen et Richard Löwenthal, ainsi que le syndicaliste Walter Auerbach, l’organisation d’une révolution dans le Reich, repoussée par la direction de l’ISK. En plus de son activité à la BBC, Eichler publia de nombreux mémoires sur la rééducation politique des Allemands et le futur statut politique de l’Europe. Bien que ses sympathies allassent aux groupes avancés — il fit partie, à côté de Kurt Hiller, de la GUDA (Gruppe unabhängiger deutscher Autoren) —, il se rallia à l’Union des organisations socialistes en Grande-Bretagne, mise sur pied par Vogel et, plus tard, à la fusion de ces partis dans le Parti social-démocrate reconstitué. Sa femme, qui se fit connaître sous le nom de Susanne Miller comme l’historienne de l’Allemagne socialiste, avait fait de sa demeure de Welwin Garden City le rendez-vous de la colonie allemande.
Rentré en Allemagne en 1945, il participa comme directeur de la Rheinische Zeitung à la réorganisation du parti en Rhénanie. Élu au Bundestag de 1949 à 1953, il appartint au Parteivorstand de 1952 à 1958. Président depuis 1955 de la commission chargée de la rédaction du programme du parti, il fut mêlé étroitement aux délibérations qui aboutirent au texte de Godesberg. Partisan d’un socialisme éthique, qui faisait appel davantage à la conscience morale des citoyens qu’à la transformation des structures économiques dans le sens des nationalisations, il avait fait imposer ses vues dès la conférence culturelle de son parti à Ziegenheim (1947) et mit à leur service la revue Geist und Tat.

Pour citer cet article :
https://maitron.fr/spip.php?article216210, notice EICHLER Willi par Jacques Droz, version mise en ligne le 23 juin 2020, dernière modification le 19 février 2020.

Par Jacques Droz

ŒUVRE : (avec M. Hart et alii.) Leonard Nelson. Ein Bild seines Lebens und Wirkens, 1938. — Der Weg in die Freiheit, 1955. — Hundert Jahre Sozialdemokratie, 1962. — Zur Einführung in den demokratischen Sozialismus, 1972.

SOURCES : W. Rœder, Die deutschen sozialistischen Exilgruppen in Grossbritannien 1940- 1945, Hanovre, 1968. — Françoise Foret, « La reconstruction du SPD après la Deuxième Guerre mondiale », in Le Mouvement social, t. 95, avril-juin 1976. — K. Lompe, L.F. Neumann (éd.), Willi Eichlers Betirage zum demokratischen Sozialismus, Berlin, Bonn, 1979. — A. Glees, Exile Politics during the Second World War. The German Social-Democrats in Britain, Oxford, New York, Toronto, 1982. — Sabine Lemke-Müller, Ethischer Sozialismus und soziale Demokraite. Der politische Weg Willi Eichlers vom ISK zur SPD, Bonn, 1988. — Link, ISK, op. cit. — Rœder et Strauss, op. cit.

rebonds ?
Les rebonds proposent trois biographies choisies aléatoirement en fonction de similarités thématiques (dictionnaires), chronologiques (périodes), géographiques (département) et socioprofessionnelles.
Version imprimable