DAVOUST Eugène, François, dit DEPRÉ François (du lieu de sa naissance Pré-en-Pail)

Né le 20 novembre 1875 à Pré-en-Pail (Mayenne), mort le 20 octobre 1951 à La Garenne-Colombes (Seine, Hauts-de-Seine) ; ouvrier boulanger, cheminot deux fois révoqué, agent d’assurances ; franc-maçon ; militant socialiste et syndicaliste.

Eugène Davoust naquit d’un père boulanger, ancien compagnon du Devoir et Liberté, franc-maçon et d’une mère catholique pratiquante. Il fréquenta l’école primaire jusqu’à treize ans et demi puis entra en apprentissage dans la boulangerie de son père. Son Tour de France commença au Havre (Seine-Inférieure, Seine-Maritime) en 1891 ; il avait alors seize ans. En contact avec un groupe communiste-anarchiste local Davoust fut remarqué par la police qui perquisitionna à deux reprises le domicile de ses parents en 1892. Il dut partir dans la région parisienne pour travailler comme ouvrier boulanger à Paris et à Saint-Germain-en-Laye (Seine-et-Oise, Yvelines). En relations avec Émile Pouget et Sébastien Faure, il se syndiqua en 1893.
Le service militaire interrompit de 1896 à 1899 ses activités professionnelles mais non son action de propagande anarchiste et antimilitariste. L’armée l’envoya comme musicien, dans un régiment d’infanterie du Mans (Sarthe). Sa compagne Julia Leduc l’y rejoignit et mit au monde une fille : Aurore. En 1898, la sécurité militaire accusa Davoust de faire de la propagande anarchiste. Une perquisition à son domicile permit de saisir des lettres de Sébastien Faure, des exemplaires de La Feuille publiée par Zo d’Axa, L’Armée contre la Nation d’Urbain Gohier et Biribi de Georges Darien. L’affaire n’eut pas de suites. À l’issue du service militaire, il abandonna le métier de mitron pour raisons de santé. Il entra aux chemins de fer, Compagnie de l’Ouest, en février 1900, et, débuta à Juigné-sur-Sarthe (Sarthe) avant d’être nommé à Pouancé (Maine-et-Loire) jusqu’en 1908 puis à Chazé-Henry. Son embauche à la Compagnie de l’Ouest l’avait obligé à régulariser sa situation familiale. Il eut deux autres enfants : Eugène né à Juigné et Gaston né en 1904 à Chazé-Henry. Son épouse travaillait comme receveuse à la gare de Chazé. Dans cette région traditionnellement réactionnaire et cléricale, Eugène Davoust ne pouvait rompre son isolement que par un échange de correspondance avec ses amis du Mans et de Paris. Il entra en contact avec la Libre-pensée qui édita ses petites brochures anticléricales intitulées Les causeries du père Magloire Lafoy et signées François Depré. La Compagnie de l’Ouest avertie le déplaça d’office à Pont-Audemer (Eure) en 1908. Il passa des examens pour être chef de gare intérimaire, tandis que son épouse reprenait son ancien métier de culottière-giletière. En 1910, à la suite d’un concours, il devint rédacteur aux services centraux de la gare Paris-Saint-Lazare. La grande grève de 1910 provoqua sa révocation. Il fut réintégré cinq mois plus tard et élu secrétaire du syndicat de Paris-Saint-Lazare-Batignolles.
L’année 1911 marqua un tournant dans ses engagements politiques : il entra à la franc-maçonnerie et adhéra au Parti socialiste. Non mobilisé en août 1914, Eugène Davoust approuva dans un premier temps les positions de Léon Jouhaux* et collabora avec les autorités, en particulier avec Marcel Sembat*, ministre des Travaux publics et son chef de cabinet Léon Blum*. La propagande internationaliste qui se développa après les conférences de Zimmerwald (septembre 1915) et Kienthal (avril 1916) l’ébranla. Il soutint les propositions de paix du Président Wilson. Eugène Davoust prit une part active aux grèves de février et mai 1920. Il fut révoqué des chemins de fer.

On ignore l’attitude précise de Davoust après le congrès de Tours (décembre 1920). Peut-être suivit-il quelque temps la majorité par souci d’unité. Il transita par les groupes socialistes-communistes de Paul Louis avant de rejoindre la section socialiste SFIO de La Garenne-Colombes, commune où il habitait depuis 1913 après avoir vécu trois ans à Colombes. Davoust était bien connu dans les organisations ouvrières locales. Il avait, avant la Première Guerre mondiale, animé l’Université populaire dont le siège fut l’Atelier maçonnique puis la Maison du Peuple. Sa femme avait été de 1914 à 1921 gérante de la coopérative ouvrière locale et rédactrice du journal La Ménagère garennoise. Devenu agent d’assurances, Davoust n’eut guère d’activité syndicale avant le Front populaire. Il lisait et soutenait la revue de Pierre Monatte, La Révolution Prolétarienne. En 1936, il fonda le syndicat national des techniciens de l’Assurance et son journal L’Assureur moderne. Son organisation se prononçait pour la nationalisation des assurances.

Eugène Davoust prit sa retraite au début de la Seconde Guerre mondiale. L’Union-Vie lui accorda le bénéfice d’un portefeuille d’encaissement de primes pour La Garenne-Colombes. Il touchait en outre une demi-retraite des chemins de fer. L’ancien cheminot syndicaliste Henri Sirolle lui obtint un emploi de bureau au Secours national créé par le gouvernement de Vichy. Il aurait fait dans ce cadre de la « propagande gaulliste » dénoncée par le journal L’Appel en août 1941. Toutefois ce ne fut pas cet article qui provoqua son arrestation mais la découverte par la police d’un revolver dans la maison de sa mère à Pré-en-Pail (Mayenne). On perquisitionna son domicile le 10 octobre 1941. Il fut arrêté avec son fils Gaston, tandis que son autre fils Eugène était interpellé au Havre. Le père fit dix-huit mois de prison (Fresnes, Angers, Fresnes, Compiègne) avant d’être libéré. Eugène quitta la prison au bout de trois mois. Mais, Gaston fut déporté en Allemagne. Malgré son âge, Eugène Davoust s’engagea dans les FFI en 1944 (Secteur Ouest, groupe Libération-Nord).

Pour citer cet article :
https://maitron.fr/spip.php?article21622, notice DAVOUST Eugène, François, dit DEPRÉ François (du lieu de sa naissance Pré-en-Pail), version mise en ligne le 11 novembre 2008, dernière modification le 4 janvier 2020.

ŒUVRE : Les causeries du père Magloire Lafoy, brochures éditées par la Libre-pensée entre 1905 et 1907. — Les Chemins de fer aux cheminots dans la société transformée, préface de Charles-Ange Laisant, 1912-1913, 93 p. — Les Cheminots de l’état et la Grande Guerre, Courbevoie, 1916, 32 p. — Projet de nationalisation de l’assurance, 1936.

SOURCES : Renseignements fournis par Louis Bonnel qui a mené une enquête approfondie auprès de la famille et des témoins. — La Révolution Prolétarienne, n° 55, novembre 1951. — Un article de E. Davoust paru dans le n° 15 de L’Assureur moderne fut republié dans La Révolution Prolétarienne du 25 juin 1939.

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