GÖHRE Paul

Par Jacques Droz

Né le 18 avril 1864 à Wurzen (Saxe), mort le 4 juin 1928 à Ratzeburg (Holstein) ; pasteur protestant d’orientation socialiste.

Élève d’une école religieuse de Meissen, destiné à la théologie, Paul Göhre commença sa carrière comme assistant d’un pasteur de la Lausitz saxonne où, pour la première fois, il vit de près la misère des tisserands, dont il rendit compte dans la revue Die christliche Welt. Pour connaître le monde ouvrier, il entra dans une fabrique de Chemnitz et publia, dans son livre Drei Monate Fabrikarbeiter und Handwerksbursche (1891), ses impressions qui ne passèrent pas inaperçues auprès de ses contemporains. Il y déclarait que la leçon du christianisme ne pourrait être perçue par la classe ouvrière avant que sa condition sociale se soit relevée. Entendu par le congrès socio-évangélique, il collabora avec Naumann et Max Weber, dont il reprit les thèses contre la grande propriété patriarcale. Devenu secrétaire général de cet organisme, il se heurta à l’opposition de l’empereur et du Conseil supérieur de l’Église évangélique, qui désapprouva ses tentatives, comme pasteur à Francfort-sur-l’Oder, pour créer des Arbeitervereine. Excédé par l’incompréhension du pouvoir, il demanda en 1900 son admission au SPD, démarche qu’il expliqua dans son livre Wie ein Pfarrer Soziaidemokrat wurde, mais qui l’obligea à quitter l’Église. Son attitude fut déterminée non pas seulement par sa pitié pour le prolétariat, mais par son horreur de la bourgeoisie wilhelmienne et de l’Église évangélique, dans laquelle il discernait une manifestation dangereuse de l’État de classe. Élu au Reichstag en 1903 puis en 1910, bien que sa collaboration à la presse socialiste ne fût pas du goût de Bebel, Göhre écrivit de nombreux ouvrages soit autobiographiques soit consacrés à la classe ouvrière. Révisionniste, il prit position, en 1914, pour la défense du pays et s’engagea sur le front russe où, contrairement à la pratique social-démocrate, il accepta d’être nommé officier. Sous la République, il occupa des postes de secrétaire d’État dans le Reich puis en Prusse ; aveugle, il se retira de la vie politique à partir de 1923. Son influence sur la classe ouvrière avait été insignifiante, mais il avait touché profondément la conscience sociale de la bourgeoisie.

Pour citer cet article :
https://maitron.fr/spip.php?article216257, notice GÖHRE Paul par Jacques Droz, version mise en ligne le 23 juin 2020, dernière modification le 25 janvier 2022.

Par Jacques Droz

ŒUVRE : Die evangelisch-soziale Bewegung : ihre Geschichte und ihre Ziele, 1896. — Die neueste Kirchenaustrittsbewegung aus den Landeskirchen in Deutschland, 1909.

SOURCES : H. Dirkes, Die evangeliscfh-soziale Bewegung und der sozialdemokratische Arbeiter 1896-1914, Diss. Fribourg, 1949. — D. Fricke (éd.), 1830-1945. Die bürgerlichen Parteien in Deutschland, t. II, Berlin, 1970 (art. « National-sozialer Verein »). — K.D. Mrossko, « Der religiöse Paul Göhre », in Geist und Tat. Zeitschrift für Politik und Kultur, 1964. — E.I. Kouri, Der deutsche Protestantismus und die soziale Frage 1870-1919. Zur Sozialpolitik im Bildungsbürgertum, Berlin, New York, 1984. — Osterroth, op. cit.

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