Par Irène Petit
Né le 29 septembre 1863 à Allenstein (Prusse orientale), mort le 7 novembre 1919 à Berlin ; avocat, homme politique socialiste, vice-président du SPD, président de l’USPD, commissaire du Peuple en 1918.
Hugo Haase naquit dans une famille juive de dix enfants ; son père, d’abord cordonnier, devint plus tard petit commerçant. Haase fréquenta l’école primaire de Womiditt puis, de 1873 à 1882, le lycée de Rastenburg (Prusse orientale). Il fît entre 1882 et 1885 des études de droit, d’économie et de philosophie à l’Université de Königsberg, études pendant lesquelles il lut Marx, Hegel et Kant. A la fin des années quatre-vingt, encore sous le règne des lois anti-socialistes, il adhéra, stagiaire, au SPD. Seul avocat socialiste à Königsberg, il lut rapidement connu comme défenseur des ouvriers, des paysans, des fonctionnaires et journalistes sociaux-démocrates. Sa renommée s’étendit à toute l’Allemagne, surtout lorsqu’il défendit brillamment les neuf inculpés socialistes (dont Otto Braun) accusés, au procès de Königsberg sur les associations secrètes (1904), d’avoir fait parvenir des tracts anti-tsaristes en Russie. En 1907, il défendit Karl Liebknecht accusé de haute trahison.
Il fut le premier socialiste à être élu député à l’Assemblée de la ville de Königsberg en 1894. Élu député au Reichstag en 1897, il y siégea — sauf pendant la période 1907-1912 — jusqu’à sa mort. En 1911, à la mort de Singer, il devint coprésident du SPD avec Bebel puis, à partir de 1913, à la mort de celui-ci, avec Ebert. Il participa aux congrès du parti en 1897, de 1899 à 1901, en 1903, 1905, 1908 et de 1908 à 1912, ainsi qu’à la conférence nationale du SPD à Berlin en septembre 1916. Il participa également aux travaux des congrès internationaux en 1893, 1900, 1907, 1910 et 1912. Au congrès de Chemnitz en 1912, il fit un rapport important sur l’impérialisme et le militarisme, insistant sur le danger de guerre provoqué par la politique agressive du capitalisme, n’excluant pas toutefois la possibilité d’un partage pacifique du monde entre les grandes puissances. Ainsi, Haase se situait au centre gauche avec Kautsky et Ledebour. Il ne cessa de réaffirmer sa position pacifiste, par exemple au congrès international de Bâle en 1912 et à la conférence d’entente (Verständigungskonferenz) des parlementaires allemands et français, tenue à Berlin en mai 1913.
Dans les dix jours qui précédaient la mobilisation, il appela sans relâche à des manifestations et rédigea des appels contre la guerre. Malgré son hostilité personnelle au vote des crédits de guerre — hostilité manifestée par lui-même et treize autres députés lors d’une réunion du groupe socialiste, le 3 août —, ce fut à lui qu’incomba, en tant que président du groupe, la tâche de lire au Reichstag, le 4 août 1914, la déclaration justifiant le vote des crédits. L’opposition à la poursuite de la guerre se manifesta publiquement à partir de 1915 : le 19 juin 1915, Haase publia avec Kautsky et Bernstein un manifeste pacifiste intitulé Das Gebot der Stunde où les ouvriers étaient appelés à lutter contre la politique annexionniste du gouvernement. En décembre 1915, Haase vota, avec dix-sept autres parlementaires socialistes, contre les crédits militaires. Les dix-huit membres de l’opposition socialiste au Parlement créèrent, en mars 1916, la Communauté de travail social-démocrate (Sozialdemokratische Arbeitsgemeinschaft). Haase fit partie de la direction de ce groupe qui, bientôt exclu de la majorité parlementaire socialiste, constitua le noyau du futur Parti socialiste indépendant (USPD) fondé à Gotha à Pâques 1917 ; auteur du rapport introductif au congrès, il fut élu président du nouveau parti. Autour de son nom se rassemblaient des fractions divergentes de l’opposition, depuis les spartakistes jusqu’aux plus modérés.
En novembre 1918, dès les premiers jours de la révolution, Haase se montra partisan de la collaboration avec les socialistes majoritaires. Favorable à la coalition gouvernementale entre majoritaires et indépendants, il fut élu commissaire du Peuple dès le 10 novembre et coprésident, avec Ebert, du Conseil des commissaires du peuple. Même après sa démission du Conseil — et celle des deux autres commissaires indépendants Dittmann et Barth —, le 29 décembre 1918, il continua à prôner la collaboration entre USPD et MSP. Il appela de ses vœux un système de gouvernement combinant les conseils ouvriers et l’Assemblée nationale. Très prudent dans la question de la socialisation, il pensait comme Hilferding et Kautsky qu’il ne fallait socialiser que certaines grandes industries « arrivées à maturité », comme les mines. Il s’éloignait ainsi de l’aile gauche de l’USPD, les Revolutionäre Obleute (délégués révolutionnaires), berlinois notamment, par exemple. Il combattit le nouveau Parti communiste allemand créé le 1er janvier 1919. Élu à l’Assemblée constituante en 1919, il prit parti, dans un grand discours prononcé en mars au Lustgarten, pour la réunification du SPD et de l’USPD.
Le 8 octobre 1919, se rendant au Reichstag, il fut victime d’un attentat perpétré par un fou. Il mourut quelques semaines plus tard.
Par Irène Petit
ŒUVRE : Strafrecht, Strafprozess und Strafvollzug. Referat auf dem Parteitag der SPD 1906 (brochure), 1906. — Reichstagsreden gegen die deutsche Kriegspolitik, 1919.
SOURCES : E. Haase (éd.), Hugo Haase. Sein Leben und sein Wirken, Berlin, 1929. — K.R. Calkins, Hugo Haase. Demokrat und Revolutionär, Berlin, 1976. — Lexikon, op. cit. — Osterroth, op. cit. — BLDG, op. cit. — Benz et Graml, op. cit.