Par Jacques Droz
Né le 18 juin 1836 à Esslingen, mort le 29 septembre 1908 à Leipzig ; militant social-démocrate à l’époque de la loi contre les socialistes.
Fils de commerçants, Julius Motteler reçut une éducation poussée dans le domaine de la draperie et de la comptabilité à Esslingen, puis à Augsbourg, enfin, après son service militaire, à Crimmitschau où il créa une imprimerie coopérative administrée par les ouvriers eux-mêmes, où il fit paraître depuis 1870 le Bürger- und Bauernfreund. Politiquement, son évolution fut semblable à celle de Bebel : après avoir rompu avec le libéralisme et la démocratie bourgeoise, il participa à la fondation du parti d’Eisenach. Membre du Verband deutscher Arbeitervereine, il s’était inscrit en 1867 à l’AIT et en 1869, il créa une Coopérative syndicale internationale (Internationale Gewerkgenossenschaft) qui groupait des ouvriers de manufacture, de fabrique et travaillant à domicile, donnant aux femmes un salaire égal à celui des hommes. Ses accointances politiques, son génie de l’organisation, sa connaissance méticuleuse et douloureusement vécue des problèmes ouvriers, sa générosité personnelle à l’égard des entreprises en difficulté lui valurent rapidement en Saxe une grande popularité. Élu au Reichstag en 1874, il y intervint en faveur des enfants des jeunes ouvrières contre l’exploitation capitaliste. Lorsque survint le Sozialistengesetz, il était à Munich où il dirigeait la revue Zeitgeist. C’est là que Bebel vint le chercher pour lui demander de diriger, à partir de Zurich vers l’Allemagne, l’organe officiel du SPD, Der Sozialdemokrat. À Zurich, Motteler, devenu le « maître de poste rouge » (Roter Feldpostmeister), mit au monde une organisation clandestine et conspiratrice qui permit l’introduction en Allemagne, soit dans des ballots de marchandises, soit dans des emballages de fortune transportés par des sentiers de montagne ou sur des canots du lac de Constance, de journaux et de livres. Ceux-ci furent ensuite répartis dans les grandes villes par des hommes de confiance qu’un service de sécurité, le « masque d’acier », protégeait contre les agents de la police impériale, les jaunes et les provocateurs. Dans l’organisation de la Rote Feldpost, Motteler fut aidé par Joseph Belli (1849-1927), cordonnier établi à Kreuzlingen (près de Constance) qui avait assisté en 1880 au congrès du SPD à Wyden, spécialisé dans la petite guerre contre la police, jusqu’au jour où, en 1883, il fut emprisonné par les Autrichiens. La police n’arrêta qu’une fois, pendant quelques semaines en 1884, le travail de Motteler qui put être repris grâce à l’aide précieuse de l’étranger, notamment de l’ancien communard hongrois Léo Frankel. Expulsé de Suisse en 1888, Motteler poursuivit son travail de Londres. Après la levée du Sozialistengesetz, le retour en Allemagne lui fut interdit et il dut rester dix ans à Londres où il menait la lutte contre l’influence anarchiste.
Rentré à Leipzig en 1901, il prit la direction de l’édition et de l’impression de la Leipziger Volkszeitung où il soutint une ligne antirévisionniste. Il revint en 1903 au Reichstag.
Par Jacques Droz
ŒUVRE : Über die Kinderarbeit in den Fabriken, 1872. — Die Frauen- und Kinderarbeit vor dem deutschen Reichstag, [1878 ?]. — Wucherfrage, 1880.
SOURCES : E. Engelberg, Revolutionäre Politik und Rote Feldpost 1879-1890, Berlin-Est, 1959. — F. Pospiech, Julius Modeler, der « rote Feldpostmeister », Esslingen, 1977. — BLDG, op. cit.