Par Jacques Droz
Né le 18 mai 1876 à Mannheim, mort le 21 mars 1931 à Berlin ; homme d’État social-démocrate, chancelier du Reich.
Fils d’un directeur de fabrique, après des études commerciales et une carrière de journaliste, Hermann Müller fut proposé par Bebel au congrès du parti à Iéna en 1905, comme membre du Parteivorstand, mais sur l’avis de Legien on lui préféra Ebert, si bien que le parti ne lui confia la direction de la presse et des questions internationales que l’année suivante. Envoyé à Bruxelles pour rencontrer les milieux de l’Internationale, puis à Paris, le 28 juillet 1914, pour prendre contact avec les socialistes français, il apprit aussitôt l’assassinat de Jaurès et, après des débats difficiles, ne pouvait trouver aucune formule d’entente avec ses interlocuteurs. Il fut menacé d’internement au cours de son voyage de retour et ne put rejoindre la frontière que grâce à la protection de Henri de Man. Revenu en Allemagne, il se prononça pour la défense du pays, tout en cherchant à maintenir des contacts avec l’extérieur. Nommé au Reichstag en 1916, il reçut la mission de conserver au Vorwärts, l’organe officiel du parti, une attitude favorable à la majorité, contre une opposition sans cesse grandissante. Membre influent du conseil d’ouvriers et de soldats, il se prononça tout de suite pour l’élection d’une Assemblée nationale et le congrès du parti à Weimar le nomma successeur d’Ebert — dont il soutint la politique comme président du Reich — à la direction du parti. Lorsque Scheidemann eut refusé de signer le traité de Versailles, il dut, comme ministre des Affaires étrangères du nouveau gouvernement d’Empire, aller à Versailles, pour exécuter ce pénible devoir. Nommé chancelier après la tentative de coup d’État de Kapp, il ne put rester dans ces fonctions que deux mois par suite du recul d’influence du Parti social-démocrate lors des élections de 1920. Huit ans plus tard, au cours desquels la social-démocratie avait été pratiquement écartée du pouvoir, Müller fut rappelé à la chancellerie à la tête d’un gouvernement qui, outre les partis attachés à la Constitution de Weimar, comprenait la Deutsche Volkspartei. Il obtint la réduction des charges des réparations et l’évacuation anticipée de la rive gauche du Rhin, sans se créer le soutien des éléments nationalistes, de plus en plus hostiles à son égard depuis la mort de Stresemann. Déjà ébranlé par la question des cuirassés de combat (Panzerkreuzer) que le gouvernement se montrait disposé à construire, mais que rejetait l’opinion socialiste, le gouvernement de « grande coalition » se trouva acculé, malgré l’opposition des syndicats et du ministre du Travail Wissell, à l’augmentation de la cotisation individuelle à l’assurance-chômage. Non sans avoir présenté les conséquences désastreuses que comportait l’attitude de son parti, Muller remit sa démission au président Hindenburg en mars 1930 : décision qui mit fin au dernier gouvernement parlementaire de la République de Weimar. Millier, qui n’avait pris aucun souci de son état de santé, mourut un an plus tard, sans avoir pu faire profiter à l’Allemagne de ses exceptionnelles qualités de lucidité et de sang-froid.
Par Jacques Droz
SOURCES : Helga Timm, Die deutsche Sozialpolitik und der Bruch der grossen Koalition im März 1930, Düsseldorf, 1952. — Ilse Maurer, Reichsfinanzen und Grosse Koalition : Zur Geschichte des Reichskabinetts Müller (l928-1930), Berne, Francfort, 1973. — W. von Stemburg, Die deutschen Kanzler von Bismarck bis Schmidt, Kônigstein/Ts., 1985. — Osterroth, op. cit. — Benz et Graml, op. cit.