Par Gilles Morin
Né le 15 décembre 1906 à Dijon (Côte-d’Or), mort en mars 1959 ; rédacteur PTT, inspecteur général au ministère des Anciens combattants ; socialiste ; résistant, déporté, compagnon de la Libération ; député à l’Assemblée consultative provisoire.
Bachelier, Edmond Debeaumarché voulait être pilote mais, sa vue étant faible, il passa le concours des PTT. Membre de la SFIO en Côte-d’Or depuis mai 1932 et syndicaliste, il était rédacteur au ministère des PTT en 1939. Il fut mobilisé dans l’aviation comme « rampant » (sergent radio), à l’état-major à Montpellier (Hérault), puis dans l’Aisne près de Laon. Il fut évacué, puis, pris dans l’exode, arriva à Tarbes (Hautes-Pyrénées) où il fut démobilisé fin août et revint à Paris en septembre 1940.
Debeaumarché n’accepta pas la défaite et entra dans la Résistance dès 1940. Avec un camarade des PTT, il organisa un passage de la ligne de démarcation avec la complicité de postiers ambulants des wagons postaux et un transport de courrier clandestin qui débuta au moment où furent mises en place les cartes interzones. Il imagina de cacher le courrier dans les tuyaux de chauffage des wagons Ces actions devaient durer jusqu’en 1944.
Fin 1942, par l’intermédiaire de Simone Michel-Lévy, Debeaumarché entra en contact avec le réseau CND-Castille. Il mit alors sur pied un transport de courrier clandestin pour Londres via Concarneau - où il se rendait par wagons des PTT - en voyageant par chalutier. Il transporta aussi des armes pour CND.
Au début de 1943, Debeaumarché entra en contact avec l’OCM par l’intermédiaire de Roland Farjon qu’il soupçonna rapidement de trahison.
À l’été 1943, à la demande de CND, un réseau autonome des PTT fut fondé, sous la direction de Pruvost et Horvais et Debeaumarché fut membre actif de l’État-major PTT. Après le démantèlement de CND, à l’automne 1943, Debeaumarché contribua, avec le colonel Labat, à la réorganisation du réseau. Placé sous les ordres de Simone Michel-Levy, il devint la cheville ouvrière du transport et de l’acheminement du courrier de Londres et fonda un service de transports de fonds de la délégation, destiné à acheminer l’argent aux différentes organisations de Résistance et aux maquis, à l’aide des voitures des PTT et aux wagons de la poste. En novembre 1943, il prit la tête de l’organisation de l’état-major PTT après le départ de Pruvost et l’arrestation de Simone Michel-Levy. Il contribua à la mise au point du plan de sabotage des communications des Allemands et de contre-sabotage des stations susceptibles de servir les armées alliées (plans Potard et Violet). Après le débarquement, le réseau entreprit ces sabotages, visant à isoler les centres et les divisions des Allemands. Son réseau se procura les codes secrets de Darnand et de la Milice et fournit journellement les textes des télégrammes au renseignement interallié. Il eut divers pseudonymes : Dury, Roux, Henry, Lamy ou l’ami.
Debeaumarché fut arrêté le 3 août 1944, à la suite d’une dénonciation d’un résistant torturé. Emprisonné à Fresnes, il y fut torturé à sept reprises. Déporté le 15 août, il arriva à Buchenwald le 20 - il y fit probablement la connaissance d’Eugène Thomas -, puis fut expédié à Dora le 2 septembre, enfin à Ellrich. Accusé de sabotage des V1, il fut torturé de nouveau en novembre. Condamné à mort, il fut sauvé lorsque son convoi fut encerclé par les troupes anglaises, et libéré le 15 avril 1945. Avec son témoignage au Comité d’histoire de la Seconde Guerre mondiale, il déposa d’importantes archives sur la Résistance des PTT.
Debeaumarché fut délégué à l’Assemblée consultative provisoire au titre des déportés en 1945 et s’inscrivit au groupe socialiste.
Secrétaire général de la Fédération nationale des déportés et internés de la Résistance en 1947, puis de l’Union nationale des associations de déportés internés et familles de disparus (UNADIF), dont il était président en 1956, il fut détaché au ministère des Anciens combattants en février 1956 comme inspecteur général.
Debeaumarché participa à de nombreux cabinets ministériels. Il fut alternativement directeur adjoint, chef adjoint puis chef du cabinet d’Eugène Thomas au ministère des PTT, de 1945 à août 1950, chargé de mission au secrétariat d’État à l’Intérieur, encore en juillet 1950. Il était au cabinet du ministre de la Défense nationale en septembre 1951, puis fut conseiller technique au ministère des Postes en 1956-1958 dans les différents cabinets de Thomas, puis au cabinet de Cornut-Gentille le 9 janvier 1959. Il avait été chargé de mission en Indochine en janvier et février 1948.
Décédé le 28 mars 1959, ses obsèques furent célébrées dans la cour d’honneur des Invalides et il fut inhumé à Dijon.
Titulaire de la Croix de la Libération, de la Croix de Guerre, grand officier de la Légion d’honneur pour services exceptionnels, il avait été fait Compagnon de la Libération par décret du 19 octobre 1945.
Par Gilles Morin
SOURCES : Arch. Nat, F/7/15495, n° 4596 ; 72 AJ 70, témoignage du 8 août 1947 à Marie Granet. — Arch. OURS, dossier personnel, dossiers Pyrénées-Orientales et Tarn-et-Garonne. — Le Travailleur socialiste n° 2, juin 1958. — Annuaires des cabinets ministériels, ministère Guy Mollet, 31 janvier 1956, Office français d’éditions documentaires, juillet 1956. — Le Monde 3 avril 1959. — Site de l’Ordre de la Libération.