DEBOURDEAU Jean-Pierre. Pseudonymes : Fred, Villeneuve, Yves Sartan, FREYSSAT Jean-Marie

Par Jean-Paul Salles

Né le 14 avril 1941 à Villeneuve-Saint-Georges (Seine-et-Oise, Val-de-Marne) ; instituteur puis professeur de collège ; militant de l’UGS puis du PSU ; membre du comité central du PCI (Section française de la IVe Internationale) et de la LC ; militant, membre du comité central et du bureau politique de la LCR, responsable de son école de cadres ; syndicaliste enseignant, membre du bureau départemental de la FSU Côte-d’Or (1994-1999) ; collaborateur de Rouge, Critique communiste, École émancipée.

Enfant naturel d’un cheminot et d’une couturière, Jean-Pierre Debourdeau passa son enfance à Miramas et à Port-de-Bouc (Bouches-du-Rhône) et fut marqué par la vie sociale et politique de ces deux cités ouvrières et communistes. Scolarisé d’abord dans un établissement confessionnel, puis dans un Cours complémentaire et au Collège Frédéric Mistral en Arles, il écrivit son premier article dans Le Provençal (comparaison entre l’hôtel de ville d’Arles et le château de Versailles). À partir de 1956, élève à l’École Normale de Dijon, puis en classe de philosophie à Besançon, il y rencontre Danièle (Barbara) qui partagera sa vie et son engagement militant jusqu’à son décès prématuré en 1994.

Le coup d’État du 13 mai 1958 fut à l’origine de sa prise de conscience politique. Instructeur aux Francs et Franches Camarades, il rompit avec cette organisation en 1958 puis s’éloigna peu à peu de la JEC. En 1959, il adhéra à l’Union de la Gauche socialiste, dirigée à Besançon par un militant se réclamant du trotskisme, futur animateur de Voix ouvrière. Il lui fit lire un ouvrage d’Yvan Craipeau, Les voies nouvelles de la révolution (Éd. de Minuit). Il fut aussi vivement impressionné par Roland Filiâtre qu’il rencontra ces années-là. La section de l’UGS dans laquelle il militait, matrice de certains futurs animateurs des luttes à la Rhodia (1967) et à Lip (1973), était assez radicale. Elle reproduisait et diffusait l’organe clandestin du réseau Jeanson Vérité pour. Dès la classe de Première il s’intéressa à la presse révolutionnaire, pas toujours facile à se procurer, et diffusa Témoignages et documents de Maurice Pagat et Vérité-Liberté, qui reproduisent des textes saisis ou interdits par la censure en relation avec la guerre d’Algérie. Il était convaincu de la justesse de la cause algérienne, refusa les compromissions des adultes qui laissèrent toute une génération s’abîmer dans les basses besognes de la répression coloniale pour les intérêts de quelques-unes.

Après avoir obtenu son baccalauréat, il fut de retour à Dijon pour préparer Normale Sup, avec une bourse de continuation d’études de deux ans. Il milita à l’UNEF - il était secrétaire de la corpo des Préparationnaires - et membre du comité directeur de l’Association générale des Étudiants dijonnais. Dans son lycée, il anima un Comité pour la paix en Algérie, participa à une manifestation interdite au terme de laquelle il fut arrêté, le 29 mai 1960. Il participa même au restaurant universitaire à une grève de la faim en solidarité avec les prisonniers algériens en France. Il diffusa tracts et brochures de Jeune Résistance, puis participa au soutien direct au FLN, transférant des fonds entre Dijon et Lyon et de la presse dans l’autre sens. À part La Voie communiste, la seule organisation connue de lui qui militait pour l’indépendance de l’Algérie étant le PCI (IVe Internationale), il prit contact avec lui. Au même moment se créa le PSU. Un peu sceptique du fait des caractéristiques politiques de l’un de ses promoteurs, Pierre Mendès France, il se laissa convaincre par Pierre Frank et y adhéra dans le but d’y mener un travail politique. Parallèlement il fut intégré au PCI (Pâques 1961). À Dijon, responsable des ESU, il organisa dans le PSU la Tendance socialiste révolutionnaire, autour de la rédaction d’une feuille d’entreprise, L’Étincelle, distribué à la SNCF et à Peugeot. Il fut délégué au 2e congrès national du PSU.

Devenu instituteur, il fut nommé dans un collège à 85 kilomètres de Dijon. Membre du SNI dont il sera plus tard le responsable cantonal, il participa à la reconstitution d’un groupe départemental École émancipée, avec des militants qui constitueront plus tard l’OCI. C’est avec Pierre Broué qu’il rédigea, au congrès de la FEN de 1969, la motion internationale de l’ÉÉ. Après que l’Algérie ait obtenu son indépendance (1962), conformément aux consignes de la IVe Internationale, il demanda à partir en coopération dans ce pays. Cela lui fut refusé, mais il fit son service militaire à Colomb-Béchar. À son retour, après quelques années d’enseignement en collège et en lycée, il fut chargé d’études au CRDP d’octobre 1968 à 1975, initiant les enseignants à l’utilisation des moyens audiovisuels. Politiquement, toujours au PSU, il accompagna la sortie de ce parti d’un groupe de militants de la tendance Socialiste révolutionnaire, en 1964. Regroupés en un Centre de liaison et de regroupement socialiste (CLRS), ces militants se rapprochèrent de la JCR bientôt créée (1966). Lui-même milita aussi au Comité Vietnam National et diffusa la presse de la IVe Internationale puis de la JCR. La cellule du PCI se constitua à Dijon en 1967, avec un JCR, 5 CLRS, 2 PSU. Il avait été élu comme stagiaire au comité central du PCI en 1965. Il était aussi membre de la commission syndicale de ce parti, chargé du travail enseignant avec Jean-Claude Bouyer. À l’intérieur de l’ÉÉ, il s’efforça de regrouper les militants en désaccord avec les orientations de l’OCI. À Besançon, de même qu’à Marseille ou à Strasbourg, il aida à la construction du PCI et de la JCR.

En Mai 68, il participa au comité de grève mis en place dans son établissement, le collège et lycée technique H. Fontaine de Dijon, où se réunissait bientôt une coordination des établissements secondaires de l’agglomération. Également se tenait à la Bourse du travail une AG quotidienne des grévistes FEN et des fonctionnaires CGT. Quelques militants adhérèrent à la JCR et au PCI, lui-même fut délégué au congrès de fondation de la Ligue communiste à Mannheim (1969). Le nombre des militants augmenta à Dijon, jusqu’à atteindre quarante en 1978. Il participa successivement à organisés en plusieurs cellules : enseignante, Hôpital psychiatrique, internationale... Outre ses responsabilités nationales (membre du CC et du BP également de la Commission nationale ouvrière), il siégea dans les directions locales (Direction de Ville à Dijon, Direction régionale Bourgogne, puis Bourgogne-Franche-Comté). Il anima localement stages de formation et rencontres des groupes Taupes. Au cours des débats internes, il prit position en faveur d’une rupture avec l’orientation sectaire-gauchiste des premiers temps. Il fut partisan de la construction d’une tendance syndicale large dans le syndicalisme enseignant, face aux partisans d’une simple fraction élargie. Il rédigea plusieurs brochures importantes, sur le Front unique ouvrier, l’autogestion ou l’OCI. En 1973, il participa aussi à l’intervention des militants bisontins en direction de Lip, s’impliquant dans l’organisation de la marche nationale sur l’usine, le 29 septembre 1973. Au cours de ces années, il fut aussi très impliqué dans les activités de formation, au niveau national, comme international. Membre de la commission nationale formation, il fut responsable à deux reprises de l’École nationale des cadres (de septembre 1975 à août 1977, puis de septembre 1981 à août 1983) et il participa à la réflexion sur l’Institut de formation de la IVe Internationale qui vit le jour à Amsterdam dans les années 1980. Il se présenta aux élections plusieurs fois, comme suppléant d’Aimé Thirard, candidat de la LC sur la 2e circonscription de la Côte-d’Or aux législatives de 1973, comme candidat sur la 1re circonscription aux législatives de 1978, puis sur la liste Lutte ouvrière-LCR aux municipales de 1980 à Dijon et aux régionales de 2004.

Après 1978, tout en continuant à militer à la LCR, il participa à des initiatives de regroupement de divers types, Union dans les luttes, Alternative 21, comités pour la candidature de Pierre Juquin aux présidentielles de 1988, Refondations, Convention pour une alternative progressiste. Avec des dissidents socialistes et communistes, il publia le bulletin local Utopie de 1994 à 2005. Il fut aussi responsable local de l’Association Information et Solidarité aux droits du peuple kanak, participa à l’animation du Comité dijonnais contre la Guerre du Golfe et est vice-président d’Attac. Il contribue à mettre en place le collectif AC ! (Agir contre le chômage et l’exclusion) à Dijon puis le collectif côte-d’orien Pour une autre Europe et celui Pour une alternative unitaire anti-libérale. Il participe à divers organismes de recherche sur les mouvements sociaux : RESSY ou la Fondation Copernic. Enfin il se montre très intéressé par l’histoire, participant activement à la Commission Histoire du syndicalisme enseignant de l’Institut de recherches de la FSU et à Adiamos, une association dijonnaise de recherche sur le mouvement ouvrier et social.

Sa femme, Danièle Debourdeau-Rivière(1941-1994) fut une active militante trotskiste.

Pour citer cet article :
https://maitron.fr/spip.php?article21690, notice DEBOURDEAU Jean-Pierre. Pseudonymes : Fred, Villeneuve, Yves Sartan, FREYSSAT Jean-Marie par Jean-Paul Salles, version mise en ligne le 25 octobre 2008, dernière modification le 18 mai 2022.

Par Jean-Paul Salles

ŒUVRE : Autogestion et dictature du prolétariat, Taupe rouge n° 11, 1973. — Autodéfense ouvrière, Taupe rouge n° 14, 1973. — Qu’est-ce que l’État, Document de formation de la LC, n° 6, 1973 (rééd. PEC, 1982). — Front unique ouvrier, Cahier rouge n° 6, 1976 — Qu’est-ce que l’internationalisme ? Pourquoi une Internationale ?, LCR, éd. PEC, 1982 — Qu’est-ce que la social-démocratie ?, PEC, 1982. — Vérité sur le Koweït, Dijon, Collectif pour la paix, 1991.
En collaboration avec Daniel Bensaïd, Les marxistes révolutionnaires dans l’enseignement, Document rouge n° 5, 1970. — avec Michel Dupré et François Ollivier, Ce qu’est l’OCI, Cahiers rouges, n° 10, Collection Débats.
A participé aux recueils collectifs : Retours sur Mai, Éd. La Brèche, 1988 et L’Unité syndicale en France, Éd. Syllepse, 1997.
Nombreux articles dans Le Normalien dijonnais, L’Enseignement public, Unité syndicale (US), l’École émancipée, Rouge, Critique communiste, Quatrième Internationale, Mauvais Temps, Politique, la revue, Contre-Temps, Points de repères.

SOURCES : Dossier de 13 pages fourni par J.-P. Debourdeau. — Salles Jean-Paul, La Ligue communiste révolutionnaire (1968-1981). Instrument du Grand Soir ou lieu d’apprentissage ? ; Rennes, PUR, 2005. — Pierre Turpin, Les révolutionnaires dans la France social-démocrate, 1981-1995, L’Harmattan, 1998.

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