SINGER Paul

Par Irène Petit

Né le 16 janvier 1844 à Berlin, mort le 31 janvier 1911 à Berlin ; député au Reichstag, coprésident du SPD de 1890 jusqu’à sa mort.

Fils d’un négociant, Paul Singer fonda en 1869 une fabrique de confection (manteaux pour dames). En 1862, il avait adhéré au Parti du progrès (Deutsche Fortschrittspartei) dont il rallia l’aile gauche autour de Johann Jacoby en 1868 ; avec lui il tenta en vain de fonder un Parti démocrate populaire (Demokratisçhe Volkspartei). Ayant fait la connaissance d’A. Bebel et W. Liebknecht, il devint membre de l’Association berlinoise des travailleurs (Berliner Arbeiterverein) ; il fut partisan de l’adoption par l’Union des associations de travailleurs (ancêtre du parti socialiste) du programme de l’Association internationale des travailleurs (AIT). Avec Eichdoiff et Hirsch il fonda en 1868 l’Association démocratique des travailleurs (Demokratischer Arbeiterverein) qui proposait l’adhésion au pro­gramme de l’AIT et se rallia en 1869 au SDAP (Parti socialiste des travailleurs al­lemands). Il fut de ceux qui appelèrent au congrès d’Eisenach et il ne cessa de soutenir les eisenachiens contre les lassalliens. En octobre 1870, il protesta contre l’an­nexion de l’Alsace-Lorraine. C’est surtout par le soutien financier et par l’aide ap­portée à la fondation d’organes de presse socialistes, notamment à Berlin, que se manifesta d’abord son action. Il continua cependant à assurer une liaison entre les démocrates petits-bourgeois autour de Jacoby et le jeune parti socialiste, soutenant financièrement et moralement la presse démocrate aussi bien que la presse socia­liste. Singer contribua à créer le Fonds Johann Jacoby destiné à aider les persécutés politiques et il fut depuis 1875 l’un des directeurs de l’Association pour l’héberge­ment des sans-abri.
A l’époque des lois antisocialistes, Singer se plaça aux côtés de Bebel et de Wilhelm Liebknecht pour organiser des actions de solidarité et mettre sur pied des formes illégales d’organisation du parti. Il assura la liaison entre la direction du par­ti et Marx et Engels. Il contribua à la création de Der Sozialdemokrat, journal édi­té à Zurich et à sa diffusion clandestine. En 1878, W. Liebknecht dit de lui : « ...un social-démocrate exemplaire. Il faut qu’à l’occasion il entre au Reichstag. » En 1883, il fut élu, malgré une furieuse campagne antisémite contre lui, à la Chambre des députés de Berlin où il siégera jusqu’à sa mort et où il sera à la tête du groupe socialiste. Il réussit pendant toute la période des lois d’exception à combiner les formes d’action légales et illégales et fonda le très légal Berliner Voiksblatt en 1884. La même année il fut élu député au Reichstag. Dans le conflit qui divisa le Rei­chstag à propos d’une subvention proposée par Bismarck pour les compagnies ma­ritimes dans la création de lignes transatlantiques à destination des colonies, il se fit remarquer par une opposition acharnée contre le projet gouvernemental. Engels le considérait comme « un de nos meilleurs hommes au Parlement ». Expulsé de Ber­lin en 1886, ce qui donna lieu à des manifestations populaires à la gare de Silésie, il abandonna un an plus tard son travail à la fabrique de confection et se consacra désormais entièrement à son activité au sein du parti. Dès 1886, il était en fonction auprès du Comité directeur ; en 1887, il était à la tête du groupe socialiste au Rei­chstag ; au congrès de Saint-Gall, la même année, il fit un rapport sur l’activité des députés au Reichstag et au Landtag. En 1888, Bebel et lui dénoncèrent la corruption de la police politique ; ils obtinrent que les lois antisocialistes ne fussent pas aggravées. Après l’abolition de ces lois en 1890, Singer fut élu coprésident du Comité di­recteur au congrès de Halle. Il présida tous les congrès du parti jusqu’en 1909, à l’exception de celui de 1901, ainsi que les congrès internationaux de 1891,1893, 1896 et 1907.
Au début des années quatre-vingt-dix, il s’opposa aussi bien aux conceptions plus ou moins anarchistes des Jeunes (Die Jungen) qu’aux thèses révisionnistes avant la lettre de Vollmar. Il soutint Bebel et Kautsky dans la lutte contre le ré­visionnisme et dès le congrès de Mayence en 1900, il analysa et attaqua l’impéria­lisme allemand dans une intervention qui fit date ; au congrès international de Paris en 1900, il appela le prolétariat international à la lutte contre la politique de conquête impérialiste et d’agression. Il renouvela au cours des années suivantes ses attaques contre le militarisme et l’expansionnisme et salua la révolution russe de 1905-1906.
Versé dans la tactique parlementaire et la conduite des affaires du parti, excel­lent administrateur et orateur, Singer était extrêmement populaire. Cette popularité, que n’entamèrent pas les violentes attaques antisémites dont il était constamment l’objet dans la presse bourgeoise, se révéla lors de sa mort le 31 janvier 1911, quand des centaines de milliers d’ouvriers berlinois assistèrent à ses obsèques.

Pour citer cet article :
https://maitron.fr/spip.php?article216903, notice SINGER Paul par Irène Petit, version mise en ligne le 23 juin 2020, dernière modification le 28 mai 2020.

Par Irène Petit

SOURCES : H. Gemkow, Paul Singer - ein bedeuten der Führer der deutschen Arbeiterbewegung, Berlin-Est, 1957. — Lexikon, op. cit.

rebonds ?
Les rebonds proposent trois biographies choisies aléatoirement en fonction de similarités thématiques (dictionnaires), chronologiques (périodes), géographiques (département) et socioprofessionnelles.
Version imprimable