CELSI Aristide

Par Julia Valat-Bodin

Né le 17 octobre 1918 à L’Aquila (Abbruzes, Italie), mort entre le 11 mars et le 15 avril 1945 au camp de Bergen-Belsen (Allemagne) ; tourneur ; militant communiste ; résistant, déporté.

Aristide Celsi était le fils d’Ermidio Celsi, ébéniste, décédé en 1921, et de Giuseppina Steffenone. La famille fit de nombreux allers retours entre l’Italie et Paris au gré des contrats de travail pour se fixer définitivement en France en juillet 1930, à Sarcelles, où elle demeura jusqu’en 1934. Après quelques mois en transit à Vincennes, 25 rue des Laitières, elle déménagea à Paris (128 rue Brancion puis 2 bis cité Popincourt). Aristide Celsi s’installa au 113 boulevard Voltaire, dans le XIe arrondissement de Paris, avec sa mère et sa sœur Pierrette en octobre 1937.

Membre des Jeunesses communistes de 1937 à 1939, il était dans le même temps proche de l’Union populaire italienne. En janvier 1939, il fut naturalisé Français et mobilisé en novembre de la même année. Démobilisé en novembre 1941, il reprit contact avec les milieux communistes italiens de la région parisienne.

Tourneur de profession, Aristide Celsi travailla désormais comme livreur, une remorque accrochée à sa bicyclette Alcyon.

Agent de liaison pour le Front national de lutte pour la libération et l’indépendance de la France, il approvisionna plusieurs groupes en tracts, participa à la reconstitution des groupes communistes de langue italienne du XIe et fit partie du groupe conduit par Antonio Tonussi et Gino Passotti. Des réunions clandestines se tenaient au 56 rue de la Folie-Regnault, dans l’atelier désaffecté de la SMETA (Société de mécanothérapie des établissements thermal d’Aix-les-Bains) pour laquelle Attilio Basso avait travaillé et dont il avait toujours les clés après l’évacuation du matériel en zone libre.

Marino Mazetti, qui dirigeait depuis l’été 1942 le détachement FTP italien de la région parisienne et que Celsi connaissait sous le pseudonyme de « Serge », le désigna comme responsable politique du XIe. Aristide Celsi monta alors un nouveau groupe avec Attilio Basso et mena une propagande active pour appeler à la manifestation du 20 septembre 1942 à l’occasion du 150e anniversaire de la bataille de Valmy, acte de naissance de la Première République. Le rassemblement prévu à 18 h 30 place de la République ne put avoir lieu, les Allemands ayant imposé un couvre-feu à partir de 15 heures.

L’un des membres du réseau, qu’ils connaissaient comme « le socialiste », avait infiltré le groupe et, le 3 septembre 1942, c’est lui qui devait lancer une bouteille incendiaire contre le bureau de recrutement de travailleurs pour l’Allemagne au 10 rue Faidherbe, toujours dans le XIe. Aristide Celsi avait été tenu à l’écart de cette action afin de former un nouveau groupe si celui-ci venait à tomber.

Le membre infiltré avait préalablement prévenu la Préfecture de police et la 2e Brigade spéciale (BS2) tendit une souricière, quinze agents quadrillant le quartier. Antonio Tonussi, Gino Passotti et Marco Brasca parvinrent à s’échapper, non sans essuyer des coups de feu.

Ce même indicateur donna par la suite le seul nom qu’il connaissait, celui d’Aristide Celsi qui fut pris en filature durant presque un mois. Entre le 29 septembre et le 2 octobre 1942, la BS2 arrêta 16 personnes repérées durant les filatures ou dont le nom fut lâché sous la torture.

Transférés au dépôt le 4 octobre, incarcérés à la Santé puis à Fresnes, la plupart furent relâchés le 23 décembre 1942.

Le 24 février 1943 Aristide Celsi, Antonio Tonussi, Gino Passotti, Marco Brasca, Cleto Meneghinello et Attilio Basso furent transférés au fort de Romainville.
Regroupés dans la casemate 22, ils purent enfin se parler et ne tardèrent pas à nommer le traître. Ils furent tous les six déportés NN (Nacht und Nebel). Seuls Tonussi, Brasca et Basso allaient revenir vivants de déportation.

Aristide Celsi fut déporté le 15 juillet 1943 au camp de Natzweiler-Struthof en Alsace. Les 57 hommes du convoi furent conduits à la gare de l’Est. Considérés comme dangereux et, pour prévenir toute tentative d’évasion, ils partirent en voiture voyageurs aux fenêtres grillagées, menottés deux par deux. Six hommes de ce convoi décédèrent avant la fin du mois. Aristide Celsi était devenu le matricule 4568.
Devant l’avance des Alliés, le camp fut évacué début septembre 1944. Le 4 septembre, Aristide Celsi fut enregistré à Dachau sous le matricule 99274 et affecté au Kommando extérieur d’Augsburg.

Le 29 septembre 1944, il fut transféré à Leonberg, un camp annexe de Natzweiler près de Stuttgart où les déportés travaillaient à la production d’ailes pour le chasseur à réaction Me 262 dans deux tunnels autoroutiers qui abritaient une usine Messerschmitt.

Le 11 mars 1945, Aristide Celsi (désormais matricule 29159) fit partie du transfert de 258 déportés malades au camp-mouroir de Bergen-Belsen. Il fut l’un des 80 déportés de ce convoi qui ne revinrent pas de déportation sans que l’on sache s’ils décédèrent durant le transfert ou à Bergen-Belsen avant la libération du camp le 15 avril 1945.

Gino Passotti décéda à Ebensee, un des camps annexes de Mauthausen, le 30 avril 1945. Cleto Meneghinello mourut à Eckartshausen le 8 mai 1945, il fut inhumé à la nécropole du Pétant.

À la Libération, Nello, frère d’Aristide, arrêté le même jour que lui mais rapidement relâché, porta plainte contre les inspecteurs de la BS2 : « Il portait de nombreuses traces de coups au visage, il saignait aux lèvres et à l’œil gauche, il m’a dit que les inspecteurs lui avaient écrasé les doigts des pieds. De la salle où j’étais, j’entendais ses cris de douleur. »

Dans les années suivant la Libération, Aristide Celsi fut homologué membre de la Résistance intérieure française, déporté-interné-résistant et déclaré « Mort pour la France ».

Le délateur du groupe, arrêté en mai 1943 pour vol avec effraction lors d’une fausse perquisition et bien qu’offrant ses services à la Gestapo, avait été quant à lui déporté à Dora puis à Bergen-Belsen d’où il fut libéré le 15 avril 1945. Il déclara alors être un résistant arrêté probablement suite aux aveux de son chef Aristide Celsi. En mai 1946, il fut condamné à 20 ans de travaux forcés, incarcéré à la prison de Toulouse puis libéré au bout de sept ans. Il décéda en 2002 à l’âge de 81 ans.

Pour citer cet article :
https://maitron.fr/spip.php?article217683, notice CELSI Aristide par Julia Valat-Bodin, version mise en ligne le 1er juillet 2019, dernière modification le 5 avril 2021.

Par Julia Valat-Bodin

SOURCES : Arch. PPo NUM GB 1.— Arch. Nat. Z/6/203-2496 ; F/9/5578 ; 736/MI/44-NAT 54/3. — DAVCC 21P434421. — SHD Vincennes GR16P114728. — SIR Bad Arolsen. — Robert Steegmann, Struthof, le KL-Natzweiler et ses Kommandos : une nébuleuse concentrationnaire des deux côtés du Rhin, Strasbourg, La Nuée Bleue, 2005. — Thomas Fontaine, Les Oubliés de Romainville, un camp allemand en France (1940-1944), Paris, Tallandier, 2005.

rebonds ?
Les rebonds proposent trois biographies choisies aléatoirement en fonction de similarités thématiques (dictionnaires), chronologiques (périodes), géographiques (département) et socioprofessionnelles.
Version imprimable