DEDONDER Raymond, Auguste

Par Michel Pinault

Né le 30 août 1920 à Joinville-le-Pont (Seine, Val-de-Marne), mort le 5 septembre 2004 au Kremlin-Bicêtre (Val-de-Marne) ; chercheur scientifique ; ajiste ; résistant ; militant socialiste et syndicaliste.

Fils de Marcel Dedonder, ouvrier joaillier puis bijoutier, ruiné par la crise de 1929, puis ouvrier agricole (grainetier), et de Blanche Louvet, sans profession, Raymond Dedonder, après des études au lycée Lakanal à Sceaux puis au lycée Saint-Louis, obtint une licence ès sciences en 1943 à la Faculté des sciences de Paris, puis le doctorat ès sciences naturelles en 1951. Successivement vacataire au CNRS (1939-1940), instituteur suppléant (1941) puis boursier Arconati (1942), stagiaire au CNRS (1943) puis contractuel (1945), à la Libération, membre du cabinet de travail constitué auprès du directeur du CNRS (Frédéric Joliot), il devint responsable de l’échelon parisien de la Mission scientifique du CNRS dans les territoires occupés (Allemagne, Autriche). Il quitta ces fonctions après le départ de Joliot pour devenir chercheur à l’Institut national d’agronomie (1946) puis à l’Institut Pasteur (1948), au service des fermentations. Sa carrière continua au CNRS : attaché de recherches (1947), chargé de recherches (1952), maître de recherches (1957) puis directeur de recherches (1961) et directeur de recherches émérite. Chef de service à l’Institut Pasteur (1959-1965), directeur de l’institut de biologie moléculaire du CNRS (1970-1978), professeur à la faculté des sciences de Paris (1966-1976), il devint directeur scientifique du développement (1981-1982) puis directeur (1982-1987) avant d’être nommé directeur honoraire de l’Institut Pasteur.
Marié civilement le 14 novembre 1946 à Fontenay-aux-Roses (Seine, Hauts-de-Seine), avec Andrée Fouilloux, institutrice, Dedonder, sans convictions religieuses, fut un militant laïque. Le couple eut trois enfants.
Dedonder adhéra, en 1938, aux étudiants communistes. Il démissionna en 1939, à la suite du Pacte germano-soviétique, et adhéra à la IVe Internationale par l’intermédiaire d’Yvan Craipeau*. En 1941, il démissionna de la IVe Internationale par opposition à la consigne de fraternisation avec les soldats allemands. En 1942, réfractaire au STO, membre de la Ligue française des Auberges de jeunesse (AJ) qui regroupait, sous l’égide de Marc Sangnier, en zone occupée, les adhérents des AJ, « après la trahison de Marc Augier », il devint secrétaire du CLAJ et membre du Club Paris Luxembourg, regroupant en particulier des élèves des Écoles normales supérieures et de l’Institut agronomique, des instituteurs, des étudiants. En 1943-1944, à la suite de l’arrestation progressive des responsables puis des membres de la Ligue, dont celle de sa future femme qui faisait alors fonction de secrétaire de Marc Sangnier, il participa à l’organisation d’un réseau de solidarité. Le 20 août 1944, pendant l’insurrection parisienne, il procéda à l’occupation du local de l’ex-CLAJ, 15 rue de Valois, avec l’appui de René Parte, des Camarades de la Route, de zone sud, et participa à la création du Mouvement uni des auberges de jeunesse (MUAJ) dont il fut le premier secrétaire. Le MUAJ, devenu un important mouvement de jeunesse, créa les Caravanes ouvrières. En 1947-1948, le MUAJ devint le Mouvement laïque des auberges de jeunesse (MLAJ), que Dedonder présida.
Après la Libération, Dedonder milita au Parti socialiste SFIO jusqu’à ce qu’il appelât « la trahison de Guy Mollet ». Il définissait la suite de son itinéraire politique comme résultant de la « quête d’un idéal à la fois progressiste, humaniste et libéral. » À l’Institut Pasteur, il noua des liens amicaux avec des chercheurs comme Alain Bussard, Élie Wollman, Norbert Grelet, Adam Kepès, Claude Péaud-Lenoël, Jacques Monod, François Gros. Certains quittaient alors le PCF, souvent en raison de la campagne pro-lyssenkiste de la direction. Il appartint alors à la tendance Franc-Tireur de la SFIO. Plusieurs membres de ce groupe de pasteuriens se rapprochaient du Rassemblement démocratique révolutionnaire mais sortirent désappointés d’une rencontre avec David Rousset*. Il adhéra au Parti socialiste autonome, noua des liens amicaux étroits avec Édouard Depreux* et Gilles Martinet*, puis adhéra au Parti socialiste unifié. Plus tard, il indiquait : « En fait, nous étions mendésistes sans le dire. » Lors de la crise ministérielle de mai 1954, le même groupe de chercheurs décida d’adresser une lettre de 14 signataires aux députés soutenant la déclaration de candidature à la présidence du Conseil de Pierre Mendès France (13 mai 1954). Pendant les années suivantes, l’engagement syndical prit la première place dans son activité. Après cette période (1955-1959), il cessa toute activité militante et ne reprit une carte au Parti socialiste qu’après le congrès d’Épinay.
Le Syndicat national de l’enseignement supérieur et de la recherche scientifique FEN-CGT connut une grave crise dans l’après-guerre qui culmina en 1955-1956 et s’acheva par une scission lors du congrès de mars 1956. Celui-ci donna naissance au Syndicat national de l’enseignement supérieur d’une part, au Syndicat national des chercheurs scientifiques d’autre part. Cette crise trouvait son origine dans le développement d’un mouvement de jeunes chercheurs scientifiques désireux de faire reconnaître leur place, aux côtés des universitaires, dans la vie des laboratoires, et d’être mieux représentés au sein du syndicat, d’obtenir des rémunérations plus importantes (une prime de 50 %), la définition d’une carrière et d’un statut de chercheur : au total, ils revendiquaient la reconnaissance de la profession de chercheur scientifique. Avec les sections les plus en pointe (centre de Bellevue du CNRS, Institut Pasteur, Centre d’études sociologiques, Collège de France, Institut du Radium, Strasbourg), Dedonder et N. Grelet furent parmi les principaux animateurs de ce mouvement et furent membres du premier bureau élu en mars 1956. Grelet devint le premier secrétaire du nouveau syndicat, Dedonder lui succéda en 1957. Ils eurent aussi une part importante dans l’idée et dans l’organisation du Colloque de Caen sur l’avenir de la recherche scientifique (novembre 1956). Dedonder y prononça un des rapports. Parmi les douze points adoptés lors du colloque figurait la revendication d’un statut du chercheur. Selon Grelet : « Si l’on tient à reconnaître un réseau autour de R. Dedonder, il faut le voir dans la conjonction de chercheurs moins intégrés aux hiérarchies universitaires (laboratoires propres du CNRS : Bellevue en premier, Pasteur), sensibles à un certain esprit de mouvement et de liberté (mendésisme, colloque de Caen, mathématiques nouvelles, biologie moléculaire, etc.) avec l’appui de la FEN (Lauré, Ruff) et des anciens des AJ. »
Dedonder siégea au bureau national du SNCS de 1956 à 1960 et représenta son syndicat à la commission administrative nationale de la Fédération de l’éducation nationale entre 1957 et 1960. Membre élu à titre syndical de la commission de chimie biologique du CNRS (1957-1970), il fut membre du directoire (1959-1966) et du conseil d’administration (1963-1966) du CNRS.
Officier de la Légion d’honneur, commandeur de l’Ordre national du Mérite et commandeur des Palmes académiques, Dedonder obtint le Prix Nicloux de la Société de chimie biologique.

Pour citer cet article :
https://maitron.fr/spip.php?article21779, notice DEDONDER Raymond, Auguste par Michel Pinault, version mise en ligne le 25 octobre 2008, dernière modification le 25 octobre 2008.

Par Michel Pinault

SOURCES : Arch. SNCS. — Arch. FEN. — Presse syndicale. — Divers sites Internet. — Renseignements fournis par l’intéressé et par son fils. — R. Dedonder, « Le SNCS : origine et début », témoignage in Le SNCS, éléments d’histoire, 1956-1996, publication du SNCS, 1996, p. 117-132. — M. Pinault, « Les "chercheurs scientifiques" de la professionnalisation à la syndicalisation : Les conditions de la naissance et du développement du SNCS-FEN », Actes du colloque sur l’histoire de la FEN, Presses universitaires du Septentrion, 2007.

rebonds ?
Les rebonds proposent trois biographies choisies aléatoirement en fonction de similarités thématiques (dictionnaires), chronologiques (périodes), géographiques (département) et socioprofessionnelles.
Version imprimable