CHATEL Hippolyte

Par Benoit Willot

Né le 9 mars 1857 à Saint-Denis (Seine, Seine-Saint-Denis), mort le 21 juin 1935 à Joinville-le-Pont (Seine, Val-de-Marne) ; ouvrier tréfileur puis directeur d’usine ; syndicaliste.

Hippolyte Chatel était le fils d’Appoline Chappellier et de son époux Charles Chatel, forgeron mécanicien.
Devenu ouvrier tréfileur, comme son frère aîné Xavier, Hippolyte Chatel, qui résidait chez ses parents, épousa en octobre 1882 à Saint-Denis Eugénie, Anaïs Boyer, fille d’un cultivateur de Vauchassis (Aube).

Il s’installa à Joinville-le-Pont (Seine, Val-de-Marne) suite à la création, en décembre 1892, de la compagnie du Bi-Métal, société métallurgique exploitant un brevet déposé par un ingénieur lyonnais, Édouard Martin, et qui produisait des fils mêlant le cuivre et l’acier. Son frère Xavier y travaillait également mais résidait dans la commune voisine de Saint-Maurice, tandis qu’Hippolyte Chatel, son épouse et son fils vivaient à Joinville, d’abord rue de Créteil (actuellement avenue du maréchal Leclerc) puis rue Pasteur.

C’était probablement Hippolyte qui était, en janvier 1894, le Chatel assurant la fonction de secrétaire de la section de Joinville de l’Union des tréfileurs, pointiers et lamineurs de France. Il s’agit du premier syndicat connu à Joinville-le-Pont, dont l’existence était attestée au sein de l’usine de Joinville en octobre 1893. Cette union était basée à la Bourse du travail de Saint-Denis, où elle était officiellement enregistrée en novembre de la même année par son secrétaire général, Victor Guyot. La section de Joinville était active au sein du groupement, où Chatel joue un rôle mentionné dans plusieurs publications.

La section syndicale déclencha une grève, suivie par trente-cinq ouvriers tréfileurs, pour protester contre la réduction de 25% sur le prix de façon du tréfilage, décidée par la direction de l’usine le 19 octobre 1894. Une intervention de Jules Ferdinand Baulard, député radical-socialiste de la Seine et ancien conseiller municipal de Joinville, accompagné des maires de Nogent-sur-Marne (Émile Husson), de Joinville (Eugène Voisin) et de Saint-Maurice (François Gauthier), proposa une conciliation. Les ouvriers acceptèrent une réduction de salaire de 11%, mais elle fut refusée par les employeurs.
Le directeur de la compagnie, M. Heurtel, assurait que les ouvriers de Joinville étaient payés moitié plus chers que leurs homologues de province, et 25% de plus que ceux de Saint-Denis, ce que contestèrent les ouvriers de Joinville, arguant d’une plus forte productivité.
Avec le soutien d’autres salariés de l’entreprise, les grévistes organisèrent des manifestations dans les rues de Joinville. Ils obtinrent le soutien des municipalités de Saint-Maurice et Joinville, ainsi que celui du conseil municipal de Paris et de plusieurs quotidiens comme La Lanterne, Le Radical, Le Parti ouvrier ou de l’hebdomadaire local Voix des communes.

S’il était encore mentionné comme secrétaire du syndicat le 17 novembre, Hippolyte Chatel semble cependant avoir cédé la fonction à son frère Xavier, qui signe les appels à la solidarité publiés dans la presse à compter du 9 du même mois.
Un accord fut passé avec la direction après 52 jours de grève, le 15 décembre. La proposition des ouvriers de limiter la diminution à 11% était finalement acceptée. Le travail reprit le lendemain.

Au cours de son activité syndicale, Hippolyte Chatel était proche des militants de gauche du Parti ouvrier socialiste révolutionnaire. Cependant, ce fut sur une liste de droite, qualifiée de nationaliste par le journal radical Voix des communes, qu’il a été candidat lors des élections municipales de mai 1904 à Joinville. Conduite par deux conseillers sortants, Honoré Moulinet et François Provin, la liste s’opposait à celle du maire sortant, Eugène Voisin, soutenue par le comité radical-socialiste, et à une liste socialiste incomplète soutenue par le Parti socialiste français. Les radicaux obtinrent 49,1% des suffrages et ont 22 élus ; les nationalistes n’eurent qu’un seul siège avec 32,3%. Les socialistes n’ont pas eu d’élu, leurs 7 candidats recueillant 13,6% des voix. Chatel obtint 314 voix pour 1 119 votants (28,1%) et 1 343 électeurs inscrits.

Bien qu’il ait été âgé de 57 ans au début de la première guerre mondiale, Hippolyte Chatel semble avoir joué un rôle militaire, puisqu’il était, après la fin du conflit, adhérent à la 740e section de la société Les Vétérans des armées de terre et de mer qui indiquait, après sa disparition, qu’il était un soldat de la grande guerre.
Remarié en juillet 1919 au Vésinet (Seine-et-Oise, Yvelines) avec Augustine Augier, Hippolyte Chatel n’eut plus d’activités politiques publiques. Il contribua en avril 1927 à la caisse d’amortissement pour le relèvement du franc.
Toujours employé de la compagnie française du Bi-Métal, Hippolyte Chatel était devenu directeur d’usine dans une autre unité du groupe, à Alfortville (Seine, Val-de-Marne). Il fut décoré d’une médaille d’honneur à ce titre par le ministère du commerce et de l’industrie en février 1926.

Pour citer cet article :
https://maitron.fr/spip.php?article218769, notice CHATEL Hippolyte par Benoit Willot, version mise en ligne le 30 août 2019, dernière modification le 8 septembre 2021.

Par Benoit Willot

SOURCES : Arch. mun. Saint-Denis (état civil). — Arch. dép. Val-de-Marne (état civil, recensements). — Journal officiel, quotidien, 26 février 1919. — Basile Nivelet, Joinville-le-Pont, F. Huby, Joinville, 1910. — Conseil général de la Seine, État des communes : Joinville-le-Pont, Paris, 1906. — Voix des communes, hebdomadaire, 1894-1904. — Union régionale, hebdomadaire, 27 juin 1935. — Gazette de l’Est, hebdomadaire, 30 juin 1935. — Le Vétéran, 1927-1936.

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