DAVIAULT Lucien, Arthur

Par Josette Ueberschlag

Né le 18 février 1912 à Rochefort (Charente-Inférieure-Charente-Maritime), mort le 24 novembre 1989 à Toulon (Var) ; instituteur public en Algérie et dans le Doubs ; militant syndicaliste du SNI, militant du mouvement Freinet, militant communiste, conseiller municipal de Gonfaron (Var).

Lucien Daviault et son épouse Suzanne
Lucien Daviault et son épouse Suzanne

Lorsque Lucien Daviault vit le jour, son père Émile, Arthur Daviault (1878-1972), fils de charcutiers à Airvault (Deux-Sèvres), était sergent au 3e régiment d’infanterie coloniale stationné à Rochefort ; sa mère, Jeanne Amblard (1882-1956), était tailleuse de costumes pour hommes. Il avait une sœur aînée Denise, Alexandrine, Marie, née le 19 mars 1909 ; un frère cadet, Robert, Jean (1914-1995), qui devint cheminot. Ses parents s’étaient mariés à Rochefort le 6 juillet 1908. Son père, engagé volontaire au 3e RIC à trois reprises, en 1902, 1905, 1907, ce qui l’avait conduit en Chine, en Indochine et en Crète, termina son troisième engagement en 1912 et fut "affecté spécial" aux chemins de fer de l’État où il devint commis en 1913. Remobilisé au 3e RIC en 1914, gravement blessé lors de la bataille de Ville-sur-Tourbe (Marne) en mai 1915, il repartit en Indochine jusqu’en 1917, puis fut à nouveau affecté spécial aux chemins de fer de l’État où il poursuivit sa carrière à Niort, puis Thouars (Deux-Sèvres). Ayant des convictions politiques à gauche, il devint communiste probablement dès les années 1930.

Lucien Daviault fut reçu au concours d’entrée à l’École normale d’instituteurs de Parthenay (Deux-Sèvres), l’année où il obtint le brevet élémentaire (Niort, 1928). Trois ans plus tard, sans doute sous l’influence paternelle et du cheminot Henri Barthélémy, il voulut partir en Algérie pour y effectuer son année d’études terminales (1931-1932) à l’École normale d’Alger-Bouzaréa, ce qui lui fut accordé. Stagiaire à Kouinine dans le sud Constantinois à la rentrée 1932, il obtint en novembre son certificat d’aptitude professionnel, mais appelé pour effectuer son service militaire, il n’y termina pas l’année scolaire et fut affecté à la compagnie de météorologie maritime d’Algérie en avril 1933. De retour à la vie civile, il fut nommé à la rentrée 1934 dans l’école de garçons « indigène » d’El Oued, localité proche de Kouinine.

Lucien Daviault épousa Camille, Charlotte Brillaud dont il divorça le 9 novembre 1937 par jugement du tribunal civil de Batna. L’année précédente, il avait rencontré Suzanne, Amélie Carmillet, chez un ami commun pratiquant les techniques de Célestin Freinet, (vraisemblablement Maurice Boisbourdin). Tous les deux étaient communistes, ayant adhéré en 1937. Nommés dans des postes très éloignés, la guerre et la répression anticommuniste ne leur permirent pas d’espérer un rapprochement et ils ne se marièrent que le 27 mars 1942, à Oran. Mobilisé de septembre 1939 à juillet 1940 en Algérie puis au Maroc, il fut remobilisé après le débarquement américain de novembre 1942 en Algérie, de juillet 1943 à septembre 1945.

En 1945, sa femme et lui, toujours communistes, demandèrent à rentrer en métropole et obtinrent un poste double à Vanclans, village du Doubs, département dont était originaire son épouse. Elle eut la charge des petits, de la section enfantine jusqu’au CE2, lui des grands jusqu’à la section de fin d’études primaires. Ils restèrent huit ans dans ce poste et terminèrent leur carrière à Besançon (Doubs) ; lui, comme directeur de l’école de garçons dans le nouveau quartier de Palente-Cités, prit sa retraite à la rentrée 1963.

Lucien Daviault fut l’animateur du groupe d’Éducation nouvelle du Doubs (créé le 29 avril 1948, regroupant à ses débuts une quinzaine d’imprimeurs) et délégué départemental de la Coopérative de l’enseignement laïc (CEL) de 1948 à 1963. Il succéda à Honoré Alziary à la rentrée 1964, comme animateur-coordinateur du service des correspondances interscolaires de l’École moderne (ICEM).

Plusieurs instituteurs militants des Groupes Freinet et communistes du nord-est de la France devenus amis en raison de luttes communes, décidèrent de se retirer à Gonfaron dans la décennie 1960. Leur groupe, désigné comme la « petite colonie Freinet de Gonfaron », était composé, outre de Suzanne et Lucien Daviault, d’Édith et Roger Lallemand (premiers installés), de Simone et Émile Sence et de Lucienne Balesse divorcée du Belge Jean Mawet. Leurs demeures à Gonfaron furent construites le long d’une voie qui, par arrêté municipal de 1971, fut baptisée « chemin Célestin Freinet ».

Partout où il passa, en Algérie, à Vanclans, à Besançon ou comme retraité à Gonfaron, Lucien Daviault fut estimé pour la qualité de son travail, son dévouement auprès de la population et surtout son militantisme pédagogique, social et politique. Écrivant à un camarade le 10 novembre 1966, il lui confia les raisons profondes de son engagement : « Mon père spirituel, ce fut Henri Barthélemy, l’un des vingt-sept du camp de Châteaubriant [fusillés le 22 octobre 1941]. Jamais, je ne lui ai vu commettre une action vile […]. Par lui, j’ai mis le communisme, la pensée et l’action communistes sur un haut piédestal. Depuis hélas, j’ai eu pas mal de désillusions ; celles-ci ont débuté avec les attaques de La Nouvelle Critique contre la pédagogie Freinet ». Lors de la parution du premier article signé par Georges Snyders, Lucien Daviault avait en effet exprimé vigoureusement sa désapprobation dans une lettre adressée à la revue qui la publia en novembre 1950.

Comme d’autres camarades instituteurs communistes : Fernand Deléam, Henri Guillard, Roger Lallemand, Paul Le Bohec, André Leroy auxquels Freinet adressait des lettres collectives au sujet du différend qui l’opposait au Parti, il demeura un de ses fidèles défenseurs s’opposant aux critiques qui continuèrent dans L’Ecole et la Nation. À la mort de Freinet, il connut un nouveau désappointement avec l’article de Fernande Seclet-Riou paru dans l’Humanité du 19 octobre 1966. Son épouse et lui, fidèles parmi les fidèles de Freinet, tinrent à honorer sa mémoire en 1971, en se rendant à Bar-sur-Loup (Alpes-Maritimes) pour la pose d’une plaque commémorative sur le mur de son ancienne école.

Par ailleurs, dès son arrivée à Gonfaron, Lucien Daviault s’impliqua dans la vie locale et fut élu conseiller municipal en 1965 et 1971 sur la liste communiste de Charles Carrassan. Non réélu en 1977 et 1983, il fut élu une dernière fois en 1989 sur la liste socialiste-communiste de M. de Bengy (socialiste). Il décéda au cours de son mandat, alors qu’il était premier adjoint en charge des finances.

Pour citer cet article :
https://maitron.fr/spip.php?article218998, notice DAVIAULT Lucien, Arthur par Josette Ueberschlag, version mise en ligne le 13 septembre 2019, dernière modification le 18 octobre 2019.

Par Josette Ueberschlag

Lucien Daviault et son épouse Suzanne
Lucien Daviault et son épouse Suzanne

ŒUVRE : « Le Souf (sud constantinois) », Bibliothèque de travail, n°53, 15 nov. 1947. — « Le gruyère », coauteur avec Pierre Bernardin, Bibliothèque de travail, n°109, 1er avril 1950. — Plusieurs articles dans la revue L’Éducateur sur les correspondances interscolaires (n°13-14, 1er-15 mars 1965 ; n°1, 1er oct. 1966, p. 21 ; n°6, 15 déc. 1966, p. 37-38 ; n°16-17, 15 mai-1er juin 1967, p. 63 ; n°8, 1er mai 1968, p. 52-53 ; n°9-10, 1er juin-1er juillet 1968, p. 53-54).

SOURCES : Arch. dép. 25, cote 2200 W 52. — État civil de Rochefort (Charente-inférieure-Charente-Maritime). — Fiche matricule n°1129 enregistrée le 15 avril 1933 à Niort (Deux-Sèvres). – « Groupe du Doubs », L’Éducateur n°3, 1er nov. 1948, p. 72. — Lettre de Lucien Daviault publiée dans La Nouvelle Critique, n°20, novembre 1950, p. 112-116. — Lettre à un camarade, 10 novembre 1966. — Élise Freinet, Naissance d’une pédagogie populaire (méthodes Freinet), François Maspero, 1969, p. 350. — Bulletin des Amis de Freinet, n°9, janv. 1972, p. 21, n°54, déc. 1990, p. 71-70. — Claude-Robert Ageron, « Le Parti communiste algérien de 1939 à 1943 », in revue d’Histoire, Vingtième-siècle, n° 12, année 1986, p. 39-50. – Notes d’Alain Dalançon, Jacques Girault, Jean Vigreux.

ICONOGRAPHIE : Lucien et Suzanne Daviault au congrès d’été de l’École moderne à Vanves, 1954 (fonds Jean Poquet-Lallemand).

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