BONNAFOUS Raoul, Joseph

Par André Balent

Né le 11 novembre 1924 à Argeliers (Aude), mort le 9 juin 1944 en action de combat à Vira (Ariège) ; réfractaire au Service du travail obligatoire (STO) ; résistant de l’Ariège (FTPF)

Raoul Bonnafous (1924-1944)
Source : MemorialGenWeb

Raoul Bonnafous naquit à Argeliers, une commune viticole du Minervois, limitrophe du département de l’Hérault. Il suivit sa scolarité primaire à Argeliers jusqu’au certificat d’études primaires. Il fréquenta ensuite l’école pratique de Narbonne (Aude) jusqu’en 1941. Décidé à intégrer l’armée d’armistice en Afrique du Nord, il se rendit à cet effet à Lyon (Rhône) et se trouvait dans cette ville, lorsque les Allemands envahirent la zone sud le 11 novembre 1942. Il revint à Argeliers mais fut menacé par le STO car, à cet effet, il fut convoqué pour passer une visite médicale.

Il quitta donc Argeliès le 26 février 1944, il gagna le Pays d’Olmes, en Ariège, et intégra, dès le lendemain (27 février) le maquis (FTPF) en formation au Croquié, hameau de la commune de Mercus-Garrabet, dans la moyenne vallée de l’Ariège, au pied du Mont Fourcat, dans les Monts d’Olmes. Son cousin, François Andreu, était déjà membre de ce maquis et c’est lui qui lui indiqua le point de chute. Bonnafous et Andreu n’étaient pas les seuls Audois présents dans la future 3101e compagnie des FTPF, la 1er de l’Ariège. Il y retrouva, à Vira, un autre Audois, Gleyzes, originaire de Sainte-Valière commune du Minervois viticole proche d’Argeliers et marié en Ariège.

Le témoignage de Marguerite Gos (in Nadouce, op. cit., 2008, pp. 39-40) — épouse du meunier Aimé Gos militant clandestin du PC qui œuvrait par ailleurs à la logistique des FTPF et, aussi, à celle des Espagnols de l’ Agrupación de guerrilleros españoles (AGE) — indique cependant que Bonnafous était venu en Ariège pendant l’été 1943. Marguerite Gos (née Bonnefont) est formelle : elle l’a bien rencontré au moulin d’Embayourt, à Engraviès, dans la vallée du Douctouyre, sur le versant nord du Plantaurel oriental chaîne pré-pyrénéenne, le 15 août 1943. Elle se souvient de détails précis qui ne peuvent tromper : il n’était pas allé à la messe et l’avait aidée à enterrer des parachutes récemment récupérés. Cette visite anticipée dans des lieux qui devinrent le cœur du dispositif de la 3101e compagnie des FTPF peut très bien avoir été suivie d’un retour à Argeliers et avoir inspiré son départ précipité vers l’Ariège en février 1944.

Après Croquié, le maquis cantonna à Merviel (commune fusionnée avec Dun en 1972) dans la vallée d’un affluent du Douctouyre, puis plus en aval, à Vira. L’état-major s’installa à Engraviès (entre Vira et Dun), au moulin d’Embayourt, tenu par Aimé et Marguerite Gos. Depuis le 8 avril, le Sétois Amilcar Calvetti, muté en Ariège, était devenu le responsable des maquis. Il était plus particulièrement présent dans la 3101e compagnie qu’il structura lorsque ce dernier était à Vira. Calvetti était donc présent au moulin d’Embayourt dans les jours qui précédèrent l’attaque du 9 juin. Bonnafous retrouva donc des lieux qu’il avait sans doute fréquentés l’été précédent.

Le 9 juin 1944, vers 16 heures, les Allemands attaquèrent Vira. La veille, les FTPF, lors d’un de leurs raids (gendarmerie de Pamiers) avaient capturé un milicien, Barnola, de Saint-Amadou (Ariège), à l’est de Pamiers, celui-ci fut ramené le soir à Dun et ligoté. Il réussit cependant à s’enfuir (ou fut libéré ?). On suppose que ce fut lui qui prévint les Allemands et la Milice. Les FTPF avaient pris position pour parer à toute éventualité. Trois jeunes, Bonnafous, Fernand Roubichou et Paul Balasc avaient pris position dans un pré pentu dominant la route entre Vira et Engraviès. Ils servaient une mitrailleuse, abrités par un tas de pierres. Raoul Bonnafous était venu le matin du 9 juin chercher la mitrailleuse au moulin d’Embayourt. Marguerite Gos (Nadouce, op. cit., p. 40) pense, qu’avec ses compagnons, il n’eut pas le temps de l’installer dans le bosquet au dessus du terrain découvert au milieu duquel fut finalement établi le poste de combat. Maurice Daudé — de Calzan (Ariège), commune limitrophe de Vira — qui a pu assister à cette phase précise, dans son témoignage (in Nadouce, op. cit., 2007, pp.121-123), que la mitrailleuse était en fait servie par quatre hommes et non trois : Jean Authier, de la ferme du Cordier à Coussa (Ariège), mobilisé en 1939-1940, était ce quatrième homme. Les Allemands furent surpris par le tir de maquisards postés au pont de la Goffio. Ils forcèrent le passage, s’emparant de l’un d’eux, Jean-Jacques Neuville. La mitrailleuse servie par Bonnafous, Roubichou et Balasc se mit à tirer sur la colonne allemande. Ils furent bientôt repérés. Mais leurs ripostes n’étaient guère efficaces, car leur arme s’enrayait. Les Allemands les neutralisèrent et se lancèrent à l’assaut de leur position. Ils résistèrent jusqu’au bout.

Il y a deux versions de la mort de Raoul Bonnafous. Selon la première, il fut tué d’un coup de revolver dans la nuque. On retrouva son corps le lendemain à l’endroit où se trouvait la mitrailleuse que les Allemands amenèrent avec eux. Paul Balasc, blessé fut fait prisonnier. Il fut achevé sur le bord de la route à l’entrée du village de Vira. Quant à Roubichou, son corps fut retrouvé une semaine plus tard au milieu de broussailles (Aimé Gos in Nadouce, op. cit., 2008, p. 29). Mais Bénito Pérez qui participa au combat, affirma cependant dans son témoignage (in Nadouce, op. cit., p. 58), que deux ou trois Allemands « attaquèrent les trois tireurs à l’arme automatique à bout portant à la grenade ; ils furent tués sur place. Les servants de la pièce furent magnifiques et se battirent jusqu’à leur dernière minute ».

Les maquisards commandés par Aimé Gos tinrent tête aux Allemands depuis les hauteurs du bois de Thuriège, les empêchant momentanément d’atteindre un de leurs principaux objectifs, le moulin d’Embayourt. Les FTPF furent aidés, dans cette phase du combat par des éléments de la 3e brigade (Ariège) de l’AGE (Agrupación de guerrilleros españoles). Les Allemands eurent, semble-t-il, des pertes conséquentes. Mais les FTPF durent décrocher car, succombant sous le poids du nombre, ils risquaient d’être encerclés. L’état-major installé au moulin put se replier à la ferme du Viviès.le 11 juin, les Allemands accompagnés par des miliciens détruisirent la ferme et le moulin d’Embayourt, en le dynamitant et en l’incendiant.

Après le combat du 9 juin 1944, la 3101e compagnie des FTPF prit le nom de « compagnie Raoul Bonnafous ».

Raoul Bonnafous, déclaré « mort pour la France » fut homologué sergent des FFI. Il fut inhumé au cimetière d’Argeliers dans la tombe familiale. À Argeliers, il existe une rue Raoul-Bonnafous. Son nom figure sur le monument aux morts d’Argeliers (Aude). Il figure aussi (avec le prénom erroné de « Paul ») sur le monument commémoratif érigé à Vira (Ariège) à l’intersection des RD 12 et 48 « Aux morts de la résistance et victimes du nazisme de la vallée du Douctouyre ».

Voir : Vira (Ariège) et Les Issards (Ariège), 9 et 10 juin 1944

Pour citer cet article :
https://maitron.fr/spip.php?article219155, notice BONNAFOUS Raoul, Joseph par André Balent, version mise en ligne le 24 septembre 2019, dernière modification le 10 janvier 2022.

Par André Balent

Raoul Bonnafous (1924-1944)
Source : MemorialGenWeb

SOURCES : Claude Delpla, La Libération de l’Ariège, Toulouse, le Pas d’Oiseau, 2019, 514 p ; [pp. 63-64 ; p. 370]. — Olivier Nadouce, L’Ariège, terre de résistance. La bataille de Vira, Saint-Cyr-sur-Loire, Alan Sutton, 2008, 157 p. [pp. 29, 39-40, 58, 112, 130, témoignages d’Aimé Gos, Marguerite Gos, Fernand Gouiric, Bénito Pérez recueillis entre 1997et 2008 ; témoignage de Germaine Canal, institutrice à Vira, recueilli en 1945] — Site MemorialGenWeb, consulté le 23 septembre 2019.

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