BURLOT René, André

Par Frédéric Stévenot

Né le 3 mars 1901 à Saint-Denis (auj. Seine-Saint-Denis), mort le 26 mars 1968 à Hirson (Aisne) ; marié, deux enfants ; agriculteur, commerçant, officier d’administration ; lieutenant FFI au sein de l’OCM (Organisation civile et militaire) ; déporté.

René Burlot naquit au domicile de ses parents, Gaston Louis Burlot, âgé de vingt-neuf ans, et Alphonsine Louise Canoville, son épouse, âgé de vingt-quatre ans. Ils exerçaient alors la profession de vendeurs de chaussures, et étaient domiciliés au 31 rue de Paris. Les témoins qui signèrent l’acte de naissance furent le grand père paternel de René Burlot, Jean Burlot, rentier domicilié aussi à Saint-Denis au 62 de la rue de Paris, et son oncle, Raoul Félix Burlot, négociant domicilié à Paris au 17 de la rue Bouchardon.
Diplômé de l’Institut technique de pratique agricole, il travaille à Vervins (Aisne) où il aurait rencontré sa future épouse. Marié, le couple eut deux enfants : Madeleine (décédée à Hirson le 8 juillet 2019, à l’âge de 89 ans), et d’un fils, Jean (décédé en 1982), qui fut arrêté et déporté en même temps que son père.

Quand René Burlot fut appelé au service militaire, il demeurait alors à Saint-Ouen, au 61 rue de Montmartre, et il était agriculteur. Il fut incorporé au 160e régiment d’infanterie, où il arriva le 13 avril 1921. Affecté de troubles névropathiques, il fut néanmoins jugé en « très bon état général » et par conséquent apte au service. Il passa au 36e escadron du train le 28 janvier 1922, puis dans une autre section le 4 novembre suivant. René Burlot fut promu caporal le 25 février 1922 puis sergent le 16 octobre suivant. Il fut renvoyé dans ses foyers le 25 avril 1923, muni d’un certificat de bonne conduite, et affecté ultérieurement dans la classe 1917 car père de deux enfants.

Le registre matricule indique qu’il passa dans le ressort du bureau de recrutement de Saint-Quentin (Aisne) le 29 janvier 1929, puis dans celui de Laon (Aisne) le 1er octobre 1930 (lors de la suppression du précédent bureau). De fait, René Burlot déclara résider le 7 décembre 1923 à Vervins (Aisne), au 3 de la rue du Général-Foy. Le 10 novembre 1924, il habitait à Marle (Aisne), et se fixa à Hirson au 61bis de la rue Émile-Zola à partir du 19 décembre de la même année. Il reprit la maison Nollevalle, marchand grainetier, qui devient lors les établissements Burlot-Jorand.

Promu sous-lieutenant d’administration (subsistances) par décret du 10 août 1938 (JO du 13 août), René Burlot fut rappelé à l’activité du 24 septembre au 6 octobre 1938. Il le fut à nouveau le 24 août 1939, au centre de fabrication de pain de Sissonne (Aisne). Le 15 mai 1940, il fut déplacé à la station-magasin de Mantes (Seine-et-Oise) et se replia dans la 16e région le 20 juin 1940, à Saint-Sulpice-la-Pointe (Tarn).
Démobilisé le 25 juillet 1940, il déclara se retirer à Ferrussac (Haute-Loire). Il fut maintenu pendant trois mois en qualité de gérant de la succursale de la coopérative de Périgueux (Dordogne), puis en stage aussi pendant trois mois. Il fut ensuite affecté à Laon, au service départemental du ravitaillement général de l’Aisne, du 14 novembre 1940 jusqu’en janvier 1941.
René Burlot s’engagea alors dans les FFI (mouvement OCM), groupement C, du 15 novembre 1943 au 4 juin 1944, comme lieutenant (grade ratifié par la commission régionale de Lille, décision n° 1881/R, du 17 février 1948 ; homologation de la commission nationale n° 1576/FFCI/FI140 du 18 mars 1948). Il fut homologué FFI et DIR (GR 16 P 98038).

Il fut l’une des dix-neuf personnes arrêtées à Hirson dans la nuit du 4 au 5 juin 1944. Le groupe était composé de :

  1. Bellanger ;
  2. Jean Burlot ;
  3. René Burlot ;
  4. Alexandre Carlier ;
  5. Jean Clouet ;
  6. Charles Clément père ;
  7. Charles Clément fils ;
  8. Georges Cobast ;
  9. André Colpin ;
  10. André Foulon ;
  11. Maurice Gaillard ;
  12. Gérard Harboux ;
  13. Maurice Haussy ;
  14. Jean Mercier ;
  15. Paul Millot ;
  16. Esther Poteau ;
  17. Henri Poulat
  18. Pascal Troude ;
  19. Paul Verdelet.

Les résistants furent d’abord rassemblés de la Feldgendarmerie, rue de Guise, avant d’être transférés à la prison de Saint-Quentin le 5 juin. Ils furent envoyés au camp de Royalieu (Oise) le 15 juillet, avant d’être déportés.

René Burlot (matr. 40047) et son fils Jean (matr. 40050) furent du convoi (liste I.250) qui emmena 1651 hommes vers le camp de Neuengamme, le 28 juillet 1944, dont une bonne partie des résistants arrêtés à Hirson le 4 juin 1944. Le trajet fut stoppé à de nombreuses reprises suite aux bombardements et aux tentatives d’évasion. Quatre détenus sont fusillés à Soissons et Reims pour ce motif.
La majorité des déportés fut arrêtée quatre mois avant le départ pour les camps. Les motifs d’arrestation étaient variés : cinquante-deux personnes furent arrêtées pour sabotage dans le Finistère, quatre-vingt dans le Jura en représailles, trente-neuf otages le furent en raison de leur statut social ou professionnel. C’est le cas de onze personnalités de la ville de Reims : le maire, les adjoints, le procureur de la République ou encore le président du tribunal de commerce. Le convoi transporta également de nombreux résistants appartenant à des réseaux ou des mouvements divers.
Les otages furent envoyés à Therensienstadt avec les déportés arrivés le 18 juillet 1944. Les autres détenus furent transférés vers d’autres Kommandos de travail. Quatre cent cinquante partirent à Watenstedt, quatre cent à Osterort (dont René Burlot), cent dix à Bremen-Farge et cent vingt à Kaltenkirchen. Beaucoup de ces déportés moururent pendant l’évacuation de la structure de Neuengamme et même après la libération des camps. Soixante prisonniers furent ainsi tués dans la baie de Lübeck par les Alliés qui les avaient pris pour des Allemands.
Quelques personnalités frirent partie du convoi : Maurice Guillaudot, chef de l’armée secrète dans le Morbihan, Gustave Bariot, membre du service BCRA de la France Libre, et Jean Gosset, chef par intérim des réseaux Buckmaster.

René Burlot fut affecté au kommando de Bremen-Osterort (qui porte également les noms de Riespott et d’Hornisse), et fit ainsi partie des 900 détenus qui travaillèrent à la réalisation d’un bunker pour les sous-marins de la base. Il semble qu’il ait aussi été du kommando de Schutzenhof, dans lequel près de 600 déportés travaillèrent pour les chantiers navals de la ville depuis septembre 1944, comme celui de Brême-Blumenthal. Les sources du fonds pour la mémoire de la déportation indique que Jean Burlot y fut placé en premier lieu, avant de rejoindre Osterort ; il aurait ensuite été déplacé vers Dachau, alors que son père l’était vers Ravensbrück, vers la fin de la guerre. Un point aussi éloigné de la mer du Nord semble cependant peu probable.
En effet, le 3 mai 1945, René et Jean Burlot furent parmi les survivants de la tragédie de la baie de Lübeck-Neustadt. La RAF avait bombardé des bâtiments, provoquant le naufrage du Cap Arcona, du Thielbek et du Deutschland, ce qui fit 7 000 à 8 000 morts.
Le registre matricule précise que René Burlot fut déporté au camp de Neuengamme (et ses kommandos) jusqu’au 22 mars 1945 (classé en première partie par le jury d’honneur chargé de l’examen du cas des déportés politiques rapatriés). C’est très probablement à partir de cette date qu’il fut transféré à Ravensbrück.
Le statut de déporté-résistant lui fut reconnu pour la période du 5 juin 1944 au 20 mai 1945, par certification de validation n° 01508 PM 6 K du 27 juin 1951.

Il rentra de déportation très affaibli. Son état physique dégradé fut reconnu par différentes commissions de réforme : diabète avec glycosémie (avec séquelles de rétinite : perte de la vision bilatéraleà, troubles cardiaques, asthénie dite « des déportés », édentation complète, atonie intestinale, troubles circulatoires des membres inférieurs, tuberculose pulmonaire.

Rapatrié avec son fils, René Burlot fut nommé lieutenant d’administration (subsistances) le 8 juin 1948 (homologation n° 30156), pour prendre effet au 1er mai 1944. Par décret du 18 octobre suivant (JO du 19 oct.), il fut promu définitivement à ce grade, avec effet rétroactif au 25 juin 1943. Le même décret lui attribua le grade de capitaine d’administration (effet au 25 juin 1947). À sa demande, René Burlot fut maintenu dans les cadres après la libération définitive de sa classe. Il fut rayé des cadres par décret du 21 septembre 1951, et admis à l’honorariat de son grade par décision ministérielle du 20 octobre suivant (JO du 26 oct.).

René Burlot s’impliqua dans les associations de résistants et déportés. Il se mit ainsi à leur service et à celui de leurs familles en les aidant dans leurs recherches pour l’identification des corps retrouvés dans les fosses communes en Allemagne. Il contribua à leur rapatriement en France. René Brulot (puis Jean, après son décès en 1968) s’investit en particulier au sein de l’Association des Déportés, Internés et Familles de l’Aisne.

Plusieurs décorations furent remises à René Burlot : la médaille de la Reconnaissance française (décret du ministre de l’Intérieur, JO du 25 juin 1948), chevalier de la Légion d’honneur, au titre de déporté-résistant (décret du président de la République, 1er septembre 1957, JO du 20 sept. p. 79013. Le dossier 19800035/928/8147 n’est pas encore consultable). Il devint par la suite officier de la Légion d’honneur.

Le 14 juillet 2007, la municipalité d’Hirson honora leur mémoire commune en attribuant leur nom à une place de la ville. L’inauguration se fit en présence de Madeleine Burlot.

Pour citer cet article :
https://maitron.fr/spip.php?article219668, notice BURLOT René, André par Frédéric Stévenot, version mise en ligne le 20 octobre 2019, dernière modification le 19 février 2020.

Par Frédéric Stévenot

SOURCES. Dossiers adm. résistants, GR 16 P 98038. Arch. de Paris, D4R1 2243, reg. matr. — Sites Internet : Fonds pour la mémoire de la déportation ; Mémorial de Compiègne ; blog de J.-J. Thomas (1 et 2)— État civil de Saint-Denis (arch. mun. E 313), acte de naiss. n° 298. — N’oublions jamais, bull. de l’Amicale de Neuengamme, n° 244, oct. 2019, p. 8.

ICONOGRAPHIE. Blog J.-J. Thomas

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