MEDEIROS António Tomás

Par Constantin Katsakioris

Né en 1931 à São Tomé, décédé le 8 septembre 2019 à Lisbonne. Médecin, poète et écrivain, militant anticolonialiste et marxiste-léniniste, il a été formé au Portugal (1947-61) et en Union soviétique (1961-64). Il fut un des fondateurs du Mouvement populaire de libération de l’Angola (MPLA), ainsi que cadre du Mouvement pour la libération de São Tomé e Príncipe (MLSTP). Il fut aussi un des fondateurs des organisations d’étudiants africains en Union soviétique et en Europe.

Né dans une famille modeste de São Tomé, d’un père aide-pharmacien et d’une mère couturière, António Tomás Medeiros fréquenta l’école primaire Ricardo Vaz Monteiro, alors qu’il faisait plusieurs petits boulots. En 1944, il émigra en Angola, où vivaient ses cousins et un de ses frères, pour poursuivre des études secondaires à l’école catholique de Huambo, à l’époque Nova Lisboa. Élève assidu et charismatique, il bénéficia du soutien de sa famille pour continuer ses études au Portugal. Arrivé à Lisbonne en 1947, il s’inscrivit à l’école Luís de Camões, alors qu’il vivait chez un cousin communiste. En 1951 il passa son bac au lycée Escola Portugália et entra à la Faculté de Médecine qui était attachée à l’hôpital Santa Maria.

C’est la même année que Mário de Andrade, Amílcar Cabral, Francisco Tenreiro, Marcelino dos Santos et António Domingues fondèrent le Centre d’études africaines (Centro de Estudos Africanos) pour faire connaître aux étudiants et travailleurs originaires des colonies la littérature, l’histoire et la culture du monde africain. Medeiros fréquenta ces hommes et se lia d’amitié avec Mário de Andrade et Amílcar Cabral. Il participa aux séminaires et activités culturelles du Centre à la Maison des étudiants de l’Empire (Casa dos Estudantes do Império) et devint même éditeur de la revue de culture africaine Mensagem. En même temps, il se lança dans la lecture des textes marxistes et s’engagea dans les débats politiques en faveur de l’indépendance : en particulier, durant la seconde moitié des années cinquante, il fit partie du milieu des Angolais qui constituèrent le noyau politique lequel plus tard donna naissance au MPLA. Cette activité mit Medeiros dans le collimateur de la police secrète portugaise. En février 1961, grâce à l’aide de l’organisation protestante CIMADE (Comité Inter-Mouvement auprès des Évacués), il fit partie du groupe d’environ cent étudiants africains qui s’évadèrent du Portugalà travers l’Espagne vers la France pour participer à la lutte anticolonialiste.

De Paris, Medeiros se rendit au Maroc et ensuite en Union soviétique pour poursuivre ses études de médecine d’abord à l’Institut médical de la Crimée et ensuite à l’Université Patrice Lumumba à Moscou. D’après son témoignage à Elsa Sertório, ses années en URSS étaient parmi les meilleures de sa vie. Il obtint le statut de chercheur à l’Académie des Sciences, travailla pour le programme de Radio Moscou en langue portugaise et profita de la vie culturelle de la capitale soviétique. Sur le plan politique, en mars 1962 Medeiros fut parmi les fondateurs de la Fédération des étudiants africains en Union soviétique. En août 1962, il fut délégué de la Fédération au congrès des étudiants africains en Europe qui se tint à Belgrade et qui aboutit à la fondation de l’Union des étudiants africains en Europe.

Après avoir obtenu sa thèse en URSS, il se rendit en 1964 à Cabinda pour contribuer à la libération de l’Angola en tant que médecin de guerre et instructeur politique. Il fit pourtant face à la méfiance des combattants qui résistaient aux ordres d’une personne éduquée et métisse comme lui. Sur décision du MPLA, il quitta Cabinda pour le Ghana.Toutefois, suite au coup d’état contre le Président Kwame Nkrumah, il partit en Algérie sur invitation du gouvernement du FLN. Là, il vécut jusqu’en 1974 et travailla dans plusieurs hôpitaux. Il fréquenta de nouveau Mário de Andrade, l’épouse de Frantz Fanon Marie-Josèphe Dublé, l’écrivain Kateb Yacine et des nombreux militants anti-impérialistes. En tant que Santoméen, il représentait le MLSTP (Movimento de Libertação de São Tomée Príncipe), un parti qui pourtant n’existait pas par delà les conférences anti-impérialistes. En Algérie, il rencontra son épouse française, Rose-Marie, elle aussi militante anti-impérialiste et internationaliste.

Après la Révolution des Œillets en avril 1974 et l’indépendance de São Tomé-et-Principe en juillet 1975, António Medeiros retourna à son pays natal pour mettre en place un mouvement politique marxiste sans pour autant réussir. En 1976, les Medeiros avec leurs deux petites filles s’installèrent à Luanda pour servir l’Angola alors en pleine guerre et crise. António Medeiros travailla à l’hôpital. Sur le plan politique, il fut pourtant tenu à l’écart par les dirigeants du MPLA. Plus est, après le coup d’état manqué de Nito Alves contre Agostinho Neto, il entra dans le collimateur du parti et essuya des brimades de la police. Désillusionnés de ces expériences, les Medeiros quittèrent l’Angola en octobre 1977 et s’installèrent à Lisbonne.

Le docteur António Medeiros se présenta deux fois sur la liste électorale du Parti communiste portugais pour le conseil municipal de Vila Franca. Il publia un essai sur Amilcar Cabral, une petite nouvelle et il contribua à la réédition des poèmes et textes de Mensagem, avant de s’éteindre le 8 septembre 2019 à Lisbonne.

Pour citer cet article :
https://maitron.fr/spip.php?article220172, notice MEDEIROS António Tomás par Constantin Katsakioris, version mise en ligne le 7 novembre 2019, dernière modification le 17 janvier 2022.

Par Constantin Katsakioris

SOURCES : António Tomás Medeiros : Entrevistado por Elsa Sertório, Lisbonne, Universidade de Coimbra/Centro do documentação25 Abril, 2015. Entretien accessible en ligne.
P. Borges et al., MENSAGEM : Casa dos Estudantes do Império, 1944-1994, Lisbonne, União das Cidades Capitais de Língua Portuguesa,2015.
António Tomás Medeiros, A Verdadeira Morte de Amílcar Cabral, Lisbonne, Althum.com, 2012.
António Tomás Medeiros, Quando os Cucumbas Cantam, Lisbonne, Althum.com, 2016.
A. Freudental et al. (dir.), Antologias de Poesia. Da Casa dos Estudantes do Império, 1951-1963, volume 1, Lisbonne, União das Cidades Capitais de Língua Portuguesa, 2014.

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