Guéret (Creuse), 7 – 9 juin 1944.

Par Michel Thébault

La ville de Guéret, chef-lieu du département de la Creuse, connut le 7 juin 1944 une première libération par la Résistance. Le lendemain 8 juin, une première contre-attaque allemande venue de Montluçon échoua à reprendre la ville où s’était installé un Comité Départemental de Libération. Le 9 juin, une vaste offensive allemande appuyée par la division Das Reich venue du sud aboutit à la reprise de la ville par les troupes allemandes. Les combats de ces trois jours firent au total 15 victimes, 10 résistants morts au combat ou exécutés et 5 civils massacrés.

Le 7 juin 1944, Albert Fossey, alias commandant François, dirigea la première libération de Guéret à la tête des maquis de la Creuse. La ville fut ainsi la première préfecture métropolitaine libérée de France. Albert Fossey concentra pour cette opération plusieurs maquis creusois et obtint grâce à ses contacts personnels avec le directeur des études, le commandant Corberand, le ralliement à la Résistance de la majorité des effectifs de l’École de la Garde. Cette école créée par une décision du ministère de l’intérieur de Vichy le 29 octobre 1943, était la seule école militaire subsistant sous autorité française. Elle avait ouvert ses portes le 24 novembre 1943, à la caserne des Augustines à Guéret (Creuse), après de longues tractations entre le général directeur de la Garde et les autorités d’occupation. Ayant pour mission la formation d’élèves officiers, d’élèves gradés et de gardes, ses effectifs totaux étaient à la veille du 6 juin 1944, d’environ 500 hommes, ce qui en faisait la seule force militaire d’importance du département de la Creuse. Les élèves-gardes participèrent à la libération de Guéret au côté des FFI. Après avoir pris le contrôle de la plus grande partie de la ville, les FFI s’attaquèrent aux trois points de résistance des Allemands et de la Milice. Un premier assaut mené par les FFI contre la Kommandantur, installée dans l’hôtel Saint-François, place Bonnyaud échoua. L’escadron 1/5 du commandant Jouan fut chargé de prêter main-forte aux FFI. L’incendie de l’hôtel contraignit la garnison allemande à la reddition, suivie des deux autres points de combat.

Un Comité Départemental de Libération présidé par un instituteur résistant Roger Cerclier (futur député de la Creuse à la Libération) se mit en place tandis que l’ancien préfet de la Creuse Clément Vasserot, limogé par Vichy en mai 1944 et rallié à la Résistance se réinstallait lui aussi pour trois jours.

Pour les autorités de Vichy et l’État-major allemand, la situation ne pouvait être acceptée en particulier le passage d’une unité militaire constituée avec armes et bagages à la Résistance. Le gouvernement de Vichy proclama la déchéance de la nationalité française pour les militaires et l’État-major allemand prépara une offensive ayant pour but de rétablir la liaison stratégique Montluçon – Limoges, et d’éliminer les forces de la Résistance. Le 8 juin une compagnie allemande du 15ème régiment de la 189ème Division de réserve de la Wehrmacht venue de Montluçon se présenta en fin de matinée à l’entrée est de Guéret. Elle fut repoussée par plusieurs compagnies FFI et escadrons de l’école de la Garde passés à la Résistance. Le violent combat fit des victimes de part et d’autre, et trois civils furent massacrés par les forces allemandes.

Le 9 juin, une opération allemande massive fut organisée, avec l’assaut en provenance de Montluçon de troupes de la Wehrmacht appuyées par l’aviation. Au sud et à l’est des éléments blindés et motorisés de la division Das Reich (3ème bataillon du régiment Der Führer) furent chargées de contrôler les routes et d’empêcher le repli des résistants. Au vu de la disproportion des forces, Albert Fossey (AS) ordonna le repli et la dispersion des forces (un probable défaut de concertation avec les FTPF lui fut ensuite reproché par ceux-ci). Les maquis regagnèrent leurs lieux d’implantation et l’école de la Garde se replia vers Janaillat, 25 km au sud-ouest de Guéret. La ville abandonnée par la Résistance fut réoccupée par les troupes de la Wehrmacht venues de Montluçon. Le maire de Guéret, Adrien Arfeuillère, resté à son poste, parvint à obtenir des officiers allemands de la Wehrmacht qu’il n’y ait pas de représailles contre la ville, arguant du fait que les honneurs militaires avaient été rendus aux soldats allemands par les troupes de la Résistance lors de leur sortie de l’hôtel Saint-François après leur reddition du 7 juin et du fait que les blessés allemands avaient reçus aux côtés des résistants blessés les soins nécessaires à l’hôpital de Guéret. Le bataillon de la division Das Reich retardé, en particulier par le massacre de Combeauvert, ne parvint qu’en fin d’après-midi, vers 17 heures 30, à Guéret, alors que toutes les opérations militaires étaient terminées, ce qui évita également à la ville d’importantes représailles. Il y eut cependant deux victimes civiles.

Liste des victimes.

Résistants
BECKER Robert, CAMUS Pierre, CARRARD Jean, CHAPON Jean, GLICENSTEIN Wolf, JACOBOVITCH Maurice, JACQUET Paul, LENOIR Paul, LESEUR Jacques, QUELLIE Georges.

Civils massacrés.
BERGERON Georges, BERGERON née GIRAUD Jeanne, BRUNET Jean, LEBON Maurice, PARRAIN Philippe

Pour citer cet article :
https://maitron.fr/spip.php?article220195, notice Guéret (Creuse), 7 – 9 juin 1944. par Michel Thébault, version mise en ligne le 7 novembre 2019, dernière modification le 4 janvier 2020.

Par Michel Thébault

SOURCES : René Castille, Guy Avizou, Christophe Moreigne, Pascal Plas, La Creuse pendant la seconde guerre mondiale, Le Puy Fraud 2012 — Marc Parrotin, Le temps du Maquis, Histoire de la Résistance en Creuse, Ed. Verso 1984 et Mémorial de la Résistance creusoise, Ed. Verso 2000 — Claude Cazals, La Garde sous Vichy, Ed. La Musse 1997 — Philippe Davadie, Les Saint-Cyriens du premier escadron de l’école de la Garde de Guéret, Mémoire de DEA, École Pratique des Hautes Études, 2004.

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