DELORME Marceau, Désiré, Louis

Par Jean-Pierre Besse, Daniel Grason

Né le 26 avril 1908 à Bémécourt (Eure), fusillé le 21 septembre 1942 au Mont-Valérien, commune de Suresnes (Seine, Hauts-de-Seine) ; menuisier ; militant communiste et résistant dans la région parisienne.

Le père de Marceau Delorme était ajusteur, sa mère « sans profession particulière », selon l’état civil. Titulaire du certificat d’études primaires, il commença à travailler à l’âge de douze ans. Il travailla de 1920 à 1928 en Basse-Normandie : Rugles et Évreux (Eure), L’Aigle (Orne), Dreux (Eure-et-Loir) avant de se fixer en 1928 dans la banlieue ouest de la région parisienne. Il travailla chez Renault à Boulogne-Billancourt pendant trois ans, deux ans chez Laffly à Asnières, puis il traversa neuf mois de chômage avant de retrouver du travail à la maison Tang Vald à Courbevoie. Du fait de sa profession de menuisier en voiture, il travaillait très souvent dans des petites maisons, autrement dit des artisans spécialisés dans les aménagements intérieurs des automobiles. Ainsi, au moment des grèves de 1936, il travaillait chez un artisan employant quatre ouvriers.
Il se maria en mai 1931, à Asnières, avec Madeleine Dewitte, conditionneuse en parfumerie. Il adhéra au Parti communiste en 1934, à la suite des événements de février ; Madeleine était membre du comité mondial des femmes.
Il se forma politiquement au contact des autres militants et il participa à une école régionale d’une dizaine de jours en avril 1937. Il regrettait de ne pouvoir consacrer davantage de temps à la lecture. Il milita dans différentes sections de la banlieue ouest. Il fut secrétaire permanent de la section d’Asnières et Bois-Colombes. Il habita dans ces deux villes et son dernier domicile était 18 rue Petit, à Clichy. Membre du comité régional de Paris Ouest, il assurait la permanence du député communiste de la circonscription, Émile Dutilleul, en 1937. Secrétaire du rayon, il fut l’un des orateurs d’une assemblée qui rassembla un millier de personnes à l’Alhambra à Asnières, en décembre 1936, sur la situation en Espagne. Il signa un article en mars 1937, dans lequel il appelait à lutter « contre les trusts de l’alimentation » et appelait à l’union avec les petits commerçants.
Il participa à la reconstitution clandestine du Parti communiste. Le 19 septembre 1941, le commissaire de Puteaux adressa un rapport, avec copies à la direction de la police municipale, à la direction des Renseignements généraux indiquant que la Brigade spéciale d’intervention (BSI) de son commissariat avait pris en filature un cycliste qui se rendait très souvent en fin de journée au 26 rue de Suresnes, à Nanterre (Seine, Hauts-de-Seine). Les locataires du pavillon, Ferdinand Hébert, tôlier, et sa femme Lucienne, avaient été arrêtés le 8 septembre. Lors de la perquisition furent saisis : une machine à ronéotyper, cinquante mille tracts ronéotypés et imprimés, deux cents kilos de papier et trois obus de 75 mm, ainsi qu’un pistolet automatique.
Plusieurs militants communistes furent arrêtés du 16 au 19 septembre : le cycliste Paul Lescop, employé de bureau, et Edmond Dubuis alors qu’ils venaient s’approvisionner, ainsi que André Chabenet ; René Muller, modeleur ; Daniel Becker, ajusteur ; Jean Lebon, ajusteur outilleur ; Florentine Berson ; Georges Hany, ajusteur – tous les huit de Nanterre – et René Muller, modeleur sur bois, de Boulogne-Billancourt.
Félix Pozzi, monteur en électricité, de Sannois (Seine-et-Oise, Val-d’Oise), ex-militant syndicaliste CGT chez Goodrich, à Colombes, ex-volontaire en Espagne républicaine, était appréhendé depuis le 11 septembre. Dans l’illégalité, il était responsable de la diffusion des tracts du Parti communiste dans une dizaine de villes de la banlieue ouest et de Seine-et-Oise. La perquisition de son pavillon permit la découverte de faux tickets d’alimentation pour les militants qui vivaient dans l’illégalité, d’un duplicateur, d’un pistolet automatique chargé de sept balles et d’une boîte de dix-neuf cartouches. Georges Lacaud, tourneur sur bronze, de Courbevoie, qui était chargé de la diffusion des tracts chez Willème, une usine de construction de camions, à Nanterre, et Daniel Baron, tôlier, de La Garenne-Colombes, qui faisait équipe avec lui, furent appréhendés ensemble, ainsi que Charles Wagner, ajusteur, de Bezons, membre du Comité populaire de l’usine Willème.
En septembre 1941, les policiers se présentèrent à l’usine où travaillait Marceau Delorme, à Paris, mais celui-ci avait quitté son emploi depuis deux mois. Le 16 octobre 1941, la police de Vichy lança un avis de recherche, les « communistes suivants ayant quitté leur domicile à la suite de la découverte à Nanterre de l’organisation illégale qu’ils avaient reconstituée ». Parmi eux figuraient : Delorme Marceau, dit Dédé, demeurant 14 rue Montmartre à Saint-Ouen ; Le Garrec Joseph, dit Garrigue, né le 17 juillet 1918 à Douarnenez, demeurant à Nanterre, et Meunier Marcel Philibert, dit Jacques, né le 15 octobre 1910 au Creusot, domicilié boulevard Jean-Jaurès à Boulogne-Billancourt, responsable du secteur ouest de la région parisienne.
Le 19 février 1942, deux inspecteurs de la BS1 l’arrêtèrent rue Lacépède à Paris (Ve arr.). Il était porteur de faux papiers au nom de Hébert Célestin, militant arrêté en septembre 1941. Présenté comme l’ex-chef de la cellule Renault, responsable de la section de Boulogne-Billancourt et de la région ouest du PCF, il était la liaison de Cadras avec le Sud-Ouest. Lors de son arrestation, il portait quatre documents sur l’organisation du Parti communiste clandestin dans la région ouest et sud-ouest et particulièrement dans les Basses-Pyrénées (Pyrénées-Atlantiques). Il fut incarcéré à Fresnes puis au Cherche-Midi, enfin à Romainville. Il fut, avec douze de ses camarades, condamné à mort, le 24 mars 1942, par un tribunal militaire allemand pour « intelligence avec l’ennemi » et fusillé le 10 avril 1942.
Comme les quarante-six fusillés de ce jour-là, il fut incinéré au Père-Lachaise et les urnes furent réparties dans différents cimetières parisiens. Des familles de fusillés dont celle de Marceau Delorme ne purent récupérer les affaires personnelles et demander le transfert de l’urne funéraire qu’en octobre 1943.
Dès la Libération, trois villes honoraient sa mémoire : une stèle au carré des fusillés au cimetière d’Asnières, où depuis septembre 1944, une rue porte son nom. Il en est de même à Bois-Colombes où Marceau Delorme était considéré comme un enfant de la ville. Enfin, il figure sur le monument aux morts des fusillés et des déportés place de la République, à Clichy.

Pour citer cet article :
https://maitron.fr/spip.php?article22115, notice DELORME Marceau, Désiré, Louis par Jean-Pierre Besse, Daniel Grason, version mise en ligne le 25 octobre 2008, dernière modification le 2 janvier 2022.

Par Jean-Pierre Besse, Daniel Grason

SOURCES : Arch. RGASPI, 495 270 4693. – Arch. PPo. BA 1720, rapport du 13 décembre 1937, Carton 3, activités communistes pendant l’Occupation, BA 1801, BA 2117, KB 10, KB 16, KB 30. – DAVCC, Caen. – Arch. Dép. Oise, 1439 W 4 (Renseignements généraux). – Témoignage de Mounette Dutilleul. – Arch. mun. Asnières. – Arch. mun. Bois-Colombes. – Arch. mun. Gennevilliers. – Le travailleur de la Banlieue Ouest du 19 décembre 1936 et du 6 mars 1937. – État civil.

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