CARLOTTI Jean, Salomon

Par Annie Pennetier

Né le 12 octobre 1921 à Bastia (Corse, Haute-Corse), fusillé par condamnation le 19 août 1944 à Avignon (Vaucluse) ; maître d’internat ; résistant, réseau de renseignements Cotre.

Cliché Pennetier
Cliché Pennetier
Plaque à Bastia

Jean Carlotti était le fils de Antoine Marie Marcel Carlotti et de son épouse Marie Aurélie Cavalloni, domiciliés 9 avenue Carnot à Bastia.
Maître d’internat au lycée Mistral d’Avignon (Vaucluse), il fut incorporé dans les Chantiers de jeunesse à Cavaillon (Vaucluse) et affecté au groupe 16 du Muy (Var) en novembre 1942. Réfractaire au Service du Travail obligatoire (STO), il aurait sauté d’un train en marche vers Gréoux (Basses-Alpes, Alpes-de-Haute-Provence) en juin 1943 par crainte d’un contrôle. Résistant, il fut homologué agent P2 du réseau Cotre à partir de mars 1944, mais il est absent des listes de membres de ce réseau conservées dans le fonds Sénouillet des Archives départementales des Bouches-du-Rhône. Grâce à la complicité du sous-officier autrichien Walter affecté au service du chiffre à l’état major de la XIXe armée allemande à Avignon, il put procurer des informations très importantes provenant de l’état-major de la 19e Armée allemande qui avait son siège à Avignon. D’après Yves Sénouillet, fils du chef de réseau, il s’agissait de copies des télégrammes échangés entre l’état-major et le Grand Quartier général, de la grille, puis du code et enfin de l’ordre de bataille complet de la XIXe armée allemande. Cette dernière information aurait été transmise à Londres un mois avant le débarquement en Normandie. Selon l’historique du réseau établi par Yves Sénouillet, les documents auraient été passés en mai 1944 par Walter au dessinateur Chancel qui lui-même les auraient remis à son chef Lucien Grange. Or Jean-Louis Chancel est l’un des dirigeants de Phratrie qui regroupe plusieurs réseaux de renseignements dont Cotre et depuis mars 1944, il est passé au Royaume-Uni. En revanche, Grange était bien un agent du réseau. Jean Carlotti n’apparaît pas dans ce récit, mais, selon une autre source (probablement son dossier conservé au SHD), c’est lui qui aurait réussit a dérober le code chiffré en restant enfermé dans un placard de l’état-major allemand. D’après son ami Antoine Broca, maitre d’internat à Avignon lui aussi et membre du réseau Phalanx, Jean Carloti avait fait entrer à Cotre en juin 1944 un jeune Corse, Vincent Canuti, qu’il avait connu aux Chantiers de jeunesse et qu’il mit en relation avec Walter. Canuti fut arrêté par des agents du Sipo-SD et des feldgendarmes dans le bar de la place de l’Horloge qui servait de boîtes aux lettres au réseau. Il avait été trahi par un Allemand se faisant passer pour Alsacien avec qui il avait contact. Torturé, il avoua que Carlotti était son chef. Il est à noter que Pariétas alias commissaire Boyer, principal agent des polices allemandes à Avignon, assura qu’il n’avait trahi personne sous la torture. Après la Libération, déféré devant la cour de justice de Marseille, Canuti bénéficia d’un non-lieu. Carlotti, arrêté à son tour le 12 juillet, aurait accepté de travailler pour les Allemands et, selon Pariétas, aurait donné les membres de son réseau, d’où une série d’arrestations à Avignon et à Marseille (Bouches-du-Rhône) où se trouvait la centrale du réseau, le 17 juillet. Walter, qui agissait en tant qu’autrichien hostile à ‘Allemagne nazie, aurait été fusillé et au cimetière des Angles à Avignon. Remis en liberté et envoyé à Marseille, Carlotti aurait tenté de faire du double jeu. Arrêté à nouveau par les Allemands, il fut jugé par le tribunal allemand spécial siégeant à Avignon et condamné à mort en même temps que Paul-François Leonetti, résistant de l’ORA (Organisation de Résistance de l’Armée) condamné, lui, à la même peine mais par contumace. D’après ce dernier, il aurait été fusillé le 27 ou 28 juillet 1944. Une autre source donne le 19 août 1944, comme date de son exécution et précise que son cadavre fut retiré du Rhône le 22 août à 11h dans le quartier de Bonaventure, donc trois jours avant la libération de la ville. Mais, le 19 août, avaient été découverts sur les rives du Rhône quatre corps dont, d’après la police française, l’un était celui d’un informateur dont les Allemands s’étaient « débarrassés » et un autre peut-être celui de Carlotti.
Reconnu Mort pour la France le 24 janvier 1946, il a été homologué sous-lieutenant par le décret du 21 mai 1949 (JO du 13 mai 1949) puis le 20 avril 1956, interné politique (période du 12 juillet au 19 août 1944), l’attribution du titre d’interné résistant lui a été refusée. En 1947, Hélène Vianney, liquidatrice du réseau « Défense de la France » écrivait que Jean Carlotti ne figurait pas sur ses listes.

Il fut fait chevalier de la Légion d’honneur.
Une plaque honore sa mémoire à Bastia.

Pour citer cet article :
https://maitron.fr/spip.php?article221243, notice CARLOTTI Jean, Salomon par Annie Pennetier, version mise en ligne le 8 novembre 2021, dernière modification le 22 octobre 2022.

Par Annie Pennetier

Cliché Pennetier
Cliché Pennetier
Plaque à Bastia

SOURCES : Arch. Dép. Bouches-du-Rhône, 55 W 100, 56 W 25 (dossier Canuti) et 112 J 1 (fonds Sénouillet). — Mémoire des Hommes SHD Vincennes, GR 16 P 107221 (notes de Geneviève Delaunay), Caen DAVCC 21 P 38525 et Vincennes, GR 28 P 4 56 96 (nc). — Arch. René Hostache, dossier CVR Paul-François Léonetti. — Plaque de Bastia. — Notes Jean-Marie Guillon.

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