DOIZY Henri, Louis, Aimé

Par Didier Bigorgne

Né le 3 janvier 1869 à Charleville (Ardennes), mort le 3 août 1952 à La Blotinière, commune de Lunay (Loir-et-Cher) ; médecin généraliste ; militant socialiste, pacifiste et associatif ; président du groupe des Ardennes de la Paix par le droit (1901-1914) ; président de la Fédération ardennaise de la Ligue des droits de l’homme (1906-1920) et membre du comité central (1910-1923) ; conseiller général (1904-1919) et député des Ardennes (1910-1919).

Fils d’un artisan peintre en bâtiment et d’une mère au foyer, Henri Doizy vécut dans une famille modeste. Après avoir fréquenté l’école primaire à Charleville, il poursuivit ses études secondaires au lycée Chanzy ; élève brillant, il reçut le prix d’honneur du lycée et le prix de l’Association des anciens élèves en 1888. Il fit ensuite ses études de médecine à Paris, puis à l’école militaire de Lyon. A la suite d’un accident, il rejoignit la Faculté de médecine de Lille où il présenta sa thèse sur la consolidation des fractures anciennes par l’aluminium, en 1894.

Après avoir effectué son service militaire, Henri Doizy s’installa comme médecin à Flize (Ardennes), chef lieu d’un canton mi-rural mi-industriel longtemps considéré comme une « Vendée ardennaise ». Influencée par les idées de son père, militant socialiste de longue date, il se dévoua pour les ouvriers, ne ménageant ni son temps ni sa peine pour les soigner. Il découvrit aussi leurs conditions de travail et de vie, ce qui le révolta. Cette prise de conscience fut suivie d’un engagement socialiste en 1898.

Henri Doizy se révéla vite par son action. Il apporta ses conseils et son appui aux ouvriers pour fonder un syndicat, des sociétés coopératives et surtout le cercle d’études sociales de Boutancourt et des environs, L’Humanité sociale ; celui-ci s’affilia à la Fédération des Travailleurs socialistes des Ardennes qui avait quitté le POSR à la fin de l’année 1897 pour retrouver son autonomie avant de rejoindre le PSF de Jaurès en 1901
.

Aux élections pour le conseil général des 28 juillet et 4 août 1898, Henri Doizy fut candidat dans le canton de Flize. Il échoua au premier tour face au marquis de Wignacourt en recueillant750 voix sur 2361 inscrits et 1940 votants. Elu conseiller municipal de Flize en mai 1904, il tint sa revanche le 31 juillet en devenant conseiller général. Il l’emporta au premier tour avec 986 voix sur 2357 inscrits et 1947 votants. Le 24 juillet 1910, il fut réélu, dans les mêmes conditions, avec 1351 suffrages sur 2514 inscrits et 1570 votants. Au conseil général des Ardennes, il siégea dans la première commission dite de l’Instruction, de l’Assistance publique et de la mutualité.

Henri Doizy, qui avait adhéré au Parti socialiste SFIO en 1905, fut. réélu conseiller municipal de Flize, avec quatre de ses colistiers, en mai 1908. Aux élections municipales de 1912, il conduisit la liste de son parti à Charleville ; celle-ci remporta huit sièges sur vingt-sept. Malgré ses tâches d’élu local et départemental, il resta un militant actif au sein de la fédération socialiste SFIO des Ardennes. Il la représenta au congrès nationaux qui se tinrent à Paris les 15 et 16 juillet 1910, et à Amiens du 25 au 28 janvier 1914.

Henri Doizy s’investit dans tous les combats républicains. Après avoir pris la défense du capitaine Dreyfus et militer pour la révision de son procès, il fonda la section régionale du Nord des Ardennes de la Ligue des droits de l’homme en 1901. La même année, il créa le groupe des Ardennes de la Paix par le droit. Il présida alors les deux organisations qui menèrent la lutte pour gagner la population de cette marche de l’Est aux idées pacifistes. Avec le groupe de la Paix par le droit, il donnait chaque année une grande fête de la Paix. A partir de 1913, il s’opposa à la loi des « trois ans » en organisant une série de meetings et de conférences dans le département qui culmina avec la venue de Jean Jaurès à Sedan et à Charleville les 29 et 30 novembre 1913.

Entre temps, Henri Doizy fonda en 1906 la fédération des Ardennes de la Ligue des droits de l’homme. Il en devint le président, fonction qu’il occupa jusqu’en 1920. Sous son impulsion, la Ligue prit une grande ampleur pour compter jusqu’à mille cinq cents adhérents en 1911. Pendant ces années, il siégea au comité central de la Ligue de 1910 à 1923. Il donna aussi une priorité aux œuvres laïques : il était président d’honneur de l’Amicale des instituteurs et vice-président de l’Association pour la défense de l’école laïque. Dans le même temps, il était membre du comité ardennais de l’Union française pour le suffrage des femmes, au côté de Jeanne Melin qui avait été vice-présidente du groupe de la Paix par le droit.

Henri Doizy entreprit une carrière politique nationale en 1910. Aux élections législatives des 24 avril et 6 mai 1910, il représenta le Parti socialiste SFIO dans la première circonscription de Mézières. Il fut élu député des Ardennes au premier tour en obtenant 5542 voix sur 12 890 inscrits et 10 461 votants. Au Parlement, il siégea à la Commission d’assurance et de prévoyance sociale et à celle de l’hygiène publique. Cependant, son activité s’exerça en priorité dans le domaine de la législation sociale. Il s’intéressa particulièrement à la réglementation des accidents du travail et à la protection de la santé publique, ce qui lui valu d’être élu à la Chambre des députés au comité consultatif des assurances contre les accidents du travail. Il intervint sur les questions sanitaires lors de la discussion du budget des exercices 1911, 1912 et 1913.

Après un échec aux élections sénatoriales du 7 janvier 1912 dans lesquelles il conduisit la liste socialiste SFIO et réalisa le meilleur score, Henri Doizy fut réélu député le 26 avril1914, en recueillant 5743 suffrages sur 13 432 inscrits et 10 791 votants. A l’Assemblée nationale, il devint président de la Commission de l’hygiène publique et appartint aux Commissions d’assurance et de prévoyance sociales, de réparation des dommages de guerre et des régions libérées. Avec Marcille, chirurgien des hôpitaux de Paris, il créa les « autochir », ces ambulances automobiles qui permirent d’installer des centres opératoires en première ligne. En 1917, Clémenceau avait envisagé de le nommer ministre de la Santé, mais le Parti socialiste SFIO s’y serait opposé. Le 31 mars 1919, Henri Doizy fit voter à la Chambre la loi en faveur des blessés de guerre, y compris les tuberculeux. Il fut aussi le promoteur de la loi du 31 juillet 1919 qui accordait aux instituteurs les congés de longue durée (trois année) dans le cas de tuberculose ou de troubles mentaux.

Henri Doizy perdit son siège de député lors des élections législatives du 16 novembre 1919 avec un scrutin à la représentation proportionnelle. Chef de file de la liste socialiste SFIO, il obtint 20 821 voix (pour une moyenne de liste de 19 886 voix) sur 81 878 inscrits et 57 433 votants. Il subit une seconde défaite aux élections cantonales des 14-21 décembre 1919. Il obtint 765 voix sur 2402 inscrits et 1583 votants au premier tour, mais il fut battu de 15 voix au scrutin de ballottage en réunissant 781 suffrages sur 1625 votants.

Dans le courant de l’année 1920, Henri Doizy quitta le Parti socialiste SFIO. Il se représenta comme candidat isolé aux élections sénatoriales du 8 janvier 1921. Il ne fut pas élu, mais il obtint 275 voix sur 827 inscrits et 819 votants, devançant nettement les trois candidats du Parti socialiste SFIO.. Aux élections législatives du 11 mai 1924, Henri Doizy conduisit la liste du cartel d’Action républicaine et de reconstitution qui n’eut aucun élu

.Après ce sévère échec, Henri Doizy abandonna la vie politique. Il se consacra alors à l’organisation de la médecine dans le département des Ardennes. Celle-ci se concrétisa à la fin de sa vie avec la création de la Société de prévoyance des médecins.

Pour citer cet article :
https://maitron.fr/spip.php?article221417, notice DOIZY Henri, Louis, Aimé par Didier Bigorgne, version mise en ligne le 20 décembre 2019, dernière modification le 20 décembre 2019.

Par Didier Bigorgne

SOURCES : Arch. Dép. Ardennes 3M5 et 1J12. — Arch. Assemblée nationale (dossier biographique). — Arch. Fédération des Travailleurs socialistes des Ardennes .— Le Socialiste Ardennais, 1898 à 1919. — L’Humanité, 29 avril 1910. — L’Ardennais, 12 août 1952.— DBMOF,notice de Justinien Raymond. — Etat civil de Charleville-Mézières.

rebonds ?
Les rebonds proposent trois biographies choisies aléatoirement en fonction de similarités thématiques (dictionnaires), chronologiques (périodes), géographiques (département) et socioprofessionnelles.
Version imprimable