SAC Paul

Par Eric Panthou

Né le 3 mars 1907 à Clermont-Ferrand (Puy-de-Dôme), mort le 5 février 1994 à Chanat-la-Mouteyre (Puy-de-Dôme) ; artisan radio-électricien ; membre du Parti communiste (PCF), résistant au sein du Front national de lutte pour la libération et l’indépendance de la France (FN) ; déporté ; conseiller municipal à Clermont-Ferrand.

Fils de Joseph et de Maria, Paul sac s’est marié à Elise Julien le 14 novembre 1932 à Clermont-Ferrand. Il habitait 11 rue Pascal à Clermont-Ferrand. Ils n’eurent pas d’enfant.
Il fut engagé comme électricien au Parc d’Artillerie des Gravanches à Clermont-Ferrand à partir du 31 janvier 1938.
Il fut mobilisé comme météo en 1939 en Syrie et fut atteint du paludisme.
Il aurait rejoint le Front national de lutte pour la libération et l’indépendance de la France (FN) à partir du 15 mai 1941.
Le café que son épouse tenait 11 rue Pascal était connu de la Résistance.
C’est lui qui devait recevoir un paquet de tracts du FN par André Voisse quand celui-ci fut arrêté à Clermont-Ferrand le 21 octobre 1941. Une attestation de Marcel Mugnier indique qu’il était agent de liaison, qu’il procédait à la réalisation, rédaction et distribution de tracts appelant à la lutte contre l’occupant. André Voisse et Maurice Jouanneau assurent que Paul Sac servait de boîte aux lettres aussi bien pour le Front national que pour le Mouvement Franc-Tireur.
C’est en janvier 1942 que Jouanneau, par intermédiaire de Lamaire (et nom Lambert comme il l’indique), fut mis en contact avec le couple Sac. Jouanneau, ainsi que MM. André Biet alias Michel et Jean Michel attestèrent que Paul Sac participait aussi au recrutement de jeunes réfractaires du STO, envoyés en particulier ensuite vers les maquis Franc-Tireur. Jouanneau ajouta que Paul Sac lui donnait de précieux renseignements sur les agissements de la Milice et du SD. Il pouvait fournir ces renseignements grâce à son travail à l’atelier militaire des Gravanches.

Il fut arrêté par des membres du SD le 24 juin 1943 chez lui, 11 rue des Gras. Selon lui, il avait été dénoncé par la tenancière d’un magasin de friperies rue des Gras. Il porta immédiatement plainte contre elle à son retour de déportation.
Il fut arrêté pour activité communiste. Furent arrêtés avec lui, sa femme, Elise, et Messieurs Bouton, électricien et Boulard, leur cousin, en instance de rejoindre le maquis comme réfractaire. Les 4 arrêtés furent conduits à la prison allemande du 92ème RI de Clermont-Ferrand et emmenés plusieurs fois pour interrogatoire au siège du SD. Le 6 juillet, ils sont transférés à la prison allemande de la Mal-Coiffée Moulins (Allier). L’épouse de Paul sac fut libérée ici le 6 octobre 1943.

Maurice Jouanneau, ex capitaine Yves Gaston dans la Résistance, certifia que Paul Sac agissait pour la Résistance au moment de son arrestation. Il hébergeait alors deux réfractaires au STO, l’un Roulard, qui couchait chez le couple Sac depuis 4 jours, l’autre qui parvint à s’enfuir et rejoindre le maquis d’Arlanc avec Maurice Jouanneau. Ce dernier confirme qu’il y a eu dénonciation du couple Sac ainsi qu’une autre personne. Jouanneau affirme qu’il s’agit de Robert Lambert, leur chef de sizaine. Selon Jouanneau, le SD avait été informé que Lambert devait ce 24 juin à 19 heures se rendre chez les Sac. Il fut informé juste à temps par Dumont alias Le Doré, rue du Port, que le couple venait d’être arrêté. Il put s’enfuir. Il est probable que Jouanneau commette une erreur et que la personne attendue était Jean Michel, alias Lamaire, responsable départemental des Ardents. Ce dernier atteste en effet qu’il devait ce même 24 juin se rendre chez les Sac avec deux réfractaires alsaciens qui devaient être pris en charge par le couple pour être ensuite envoyés vers un maquis Franc-Tireur. C’est en arrivant près de chez eux qu’il fut prévenu de l’arrestation et put s’échapper.
Selon une enquête du Ministère de l’Intérieur fin 1954, c’est le milicien et ex cagoulard Paul Kornprost, abattu par la Résistance le 5 mai 1944 à Olliergues (Puy-de-Dôme) qui aurait porté lui-même au SD la lettre signalant les époux Sac comme communistes, recevant en récompense un jambon trouvé lors de la perquisition du logement du couple.

Le 25 août, Paul Sac est envoyé à Compiègne et le puis le 15 septembre 1943 il est déporté à Buchenwald (Allemagne), affecté à un kommando travaillant dans une carrière. Il est libéré le 11 avril 1945 et est de retour en France le 16 mai.

En 1953, il reçu le titre de déporté politique mais on donna un avis défavorable à ce qu’il reçoive le titre de déporté résistant. Le ministère contestait le lien de cause à effet entre l’acte de résistance et la déportation. Le ministère s’appuyait notamment sur le fait que Paul Sac avait porté plainte contre sa dénonciatrice au nom du fait qu’il avait dénoncé pour "une activité communiste" et "politique". Paul Sac avait rempli également un formulaire pour faire valoir ses droits de déporté dans lequel il indiquait avoir été arrêté pour motif "politique".

Paul Sac fit donc un recours gracieux auprès du Ministre qui par notification du 21 décembre 1953 maintint l’avis défavorable. Paul Sac décida alors de se pourvoir auprès du Tribunal administratif le 19 mars 1954 et déposa un mémoire en défense (n°4361).
Le Ministère rejeta ce pourvoi, estimant qu’une des trois conditions pour obtenir le statut de déporté résistant n’était pas remplie (lien de cause à effet entre arrestation et déportation).
Paul Sac déposa un mémoire en réplique (n°4362), le 12 juillet 1955. Le Ministère obtint un délai supplémentaire pour répondre. Son Mémoire en réponse, daté du 30 avril 1956, rappela les objections initiales de l’Administration. Il reconnaissait le fait que Paul Sac ait pu faire acte de Résistance mais conteste que celui-ci fasse partie de ceux qualifiés de résistance à l’ennemi et reconnus par l’article R 287 du Code des Pensions militaires. Le mémoire en défense de Paul Sac, déposé au greffe le 28 mai 1956, attaqua la mauvaise foi évidente du rapport du Ministère voulant s’appuyer sur la plainte déposée par Paul Sac à son retour de déportation et ayant usé le terme "politique" pour évoquer le motif de sa dénonciation.
En outre, le Mémoire contestait les conclusions d’un rapport de la Direction générale de la Sûreté nationale en date du 29 novembre 1949 qui signalait l’arrestation de Paul Sac en 1943 pour "activité communiste", les rapports policiers de la période de l’Occupation ne pouvant être retenus suite à arrêt du Conseil d’État, comme preuves.

Le 28 février 1957, le Ministère déposa au greffe un dernier Mémoire qui maintenait ses conclusions défavorables. En particulier, le mémoire indiqua que le fait d’héberger des réfractaires du STO n’était pas constitutif d’un acte de résistance reconnu, seul l’hébergement de résistants traqués ou blessés, de militaires français ou alliés, évadés, ou de parachutistes des armées alliés étaient considérés comme acte de résistance par l’article R 287. Le Ministère précisa que Bouton et Roulard, arrêtés en même temps que les époux Sac n’avaient pas reçu le titre de déporté résistant mais d’internés politiques, confirmant par la même la non causalité entre leur activité résistante et leur arrestation. Le Ministère insista de nouveau pour dire que dans ses dossiers de reconnaissance de déportés (formulaire 32), Paul Sac n’avait pas à mentionner comme motif de la déportation une activité politique active s’il s’agissait de "Résistance", les deux termes étant alors clairement distingués au niveau juridique. Enfin, le fait d’être considéré comme "dangereux" pour l’ennemi, justifiant une arrestation, ne signifie pas qu’on a fait des actes de résistance reconnus par le Code des pensions militaires.

Paul Sac eut gain de cause après le rendu du jugement du tribunal administratif de Clermont-Ferrand du 17 mai 1957. Le Tribunal expliqua que la matérialité des faits de résistance reconnus par le Code des Pensions militaires était établi par l’appartenance de Paul Sac à la Résistance intérieure française (certificat délivré le 29 mai 1950). Il rappelle que si le liquidateur du FN dans son attestation n’a pas détaillé le contenu des tracts saisis chez Paul Sac et prouvant le lien de cause à effet avec sa déportation, le fait qu’il ait été boite aux lettres, et fut agent de liaison constituait des actes pouvant prouver ce lien, lien confirmé par les déclarations concomitantes de plusieurs résistants, en particulier celles de Maurice Jouanneau. La décision du Ministère en date du 19 janvier 1954 fut donc annulée pour excès de pouvoir par le Tribunal dans sa séance publique du 17 mai 1957. A côté du Président et d’un Conseiller, siégeait madame Andrée Thibout, l’avocate qui avait sous l’Occupation défendue plusieurs militant communiste, en particulier Robert Marchadier, premier condamné à mort en zone sud par la Section spéciale, en septembre 1941. Le Ministère fit néanmoins un recours, contestant l’absence de l’attestation d’Hubert Mugnier, liquidateur du FN, dans le dossier.
L’attention du Ministère avait été spécialement appelée sur le cas de Paul Sac, notamment par sa qualité de conseiller municipal. Ces démarches ont peut-être accéléré la procédure car pour de nombreux autres cas, il fallut souvent beaucoup plus longtemps pour que la Justice se prononce. Finalement, il eut gain de cause.

Il est titulaire de la carte de déporté résistant pour la période du 24 juin 1943 au 15 mai 1945. Il fut ensuite fait Chevalier de la Légion d’honneur.

Il fut également homologué DIR. Il est titulaire depuis le 29 mai 1950 du certificat d’appartenance à la Résistance intérieure française (RIF), en tant que membre du FN, pour la période du 15 mai 1941 au 16 mai 1945. Il obtint la carte de CVR le 28 janvier 1958, la carte de déporté résistant le 6 septembre 1957.
Il fut membre de la commission départementale d’attribution des cartes CVR, proposé en 1988 par l’Amicale des FTPF du Puy-de-Dôme.

En 1947, il est 16éme sur la liste d’Union Républicaine et Résistante et de Défense des intérêts de Clermont-Ferrand, présentée par la PCF. Il est alors artisan radio-électricien, ancien déporté politique, conseiller municipal sortant. La liste eut dix élus. Socialistes et communistes eurent chacun dix élus mais suite à des tractations et manœuvres, les communistes n’eurent aucun adjoint tandis que le socialiste Gabriel Montpied devenait maire.
A partir de 1948 il habita 27 rue de Châteaudun à Clermont-Ferrand.

Pour citer cet article :
https://maitron.fr/spip.php?article221721, notice SAC Paul par Eric Panthou, version mise en ligne le 3 janvier 2020, dernière modification le 20 décembre 2021.

Par Eric Panthou

SOURCES : AVCC Caen AC 21 P 668707. Dossier Paul Sac .— Arch. dép. du Puy-de-Dôme, 900 W 42 : Fiche de renseignements, arrestations, département du Puy-de-Dôme .— SHD Vincennes, GR 16 P 529324. Dossier Paul Sac (nc) .— SHD Vincennes, GR 19 P 63/1, dossier général. — Bulletin de vote élections du 19 octobre 1947 .— bddm.org

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