DELHAYE Gilbert, Alexis alias DASSONVILLE, alias BOMBLED

Par Daniel Grason

Né le 24 juillet 1905 à Saint-Sulpice (Oise), mort le 3 mai 1945 dans la baie de Lübeck (Allemagne) ; receveur à la Société des transports de la région parisienne ; militant communiste ; résistant ; déporté à Neuengamme (Allemagne).

Fils de Gustave et de Marie Lévêque, Gilbert Delhaye alla à l’école primaire, il obtint à l’issue de sa scolarité le CEP. Il épousa Denise Alchamolac le 30 juin 1928 à Abbecourt (Oise). Le couple eut un enfant né en 1932. Gilbert Delhaye était de la classe 1925 recrutement de Beauvais (Oise).
Domicilié 40 rue Richelieu à Gennevilliers (Seine, Hauts-de-Seine), sympathisant du Parti communiste, il adhéra en 1938 à l’Association des amis de l’Union soviétique, il n’eut pas de responsabilité. Il travaillait comme receveur à la Société des transports en communs de la région parisienne (STCRP) au dépôt d’Asnières (Seine, Hauts-de-Seine).
Mis en disponibilité en janvier 1941, il perçu une demi-solde jusqu’en mai 1942. Il partit en province travailler chez des cultivateurs. Il loua en octobre 1941 sous le nom de Bombled une chambre au 171 boulevard de la Gare à Paris (XIIIe arr.). Selon un témoignage écrit de sa femme « Le 15 mai 1942, alors que mon mari était encore au lit il était 6 heures, la police française venant pour l’arrêter, il ne perdit pas son sang-froid, en quelques minutes il sauta le balcon du 2ème étage, pendant ce temps la police frappait continuellement. »
« S’étant blessé grièvement il parvint à se réfugier chez des vieux amis, souffrant terriblement, ont dû le transporter dans une clinique ayant le bassin fracturé, il fut très bien soigné et pu au bout de trois mois [poursuivre] la lutte, vivant dans l’illégalité à Paris, jusqu’au 1er mars 1943, où il fut arrêté à nouveau par la police française. »
Des inspecteurs de la BS1 filaient Pierre Brossard responsable national des cadres. Le 1er mars 1943, il rencontra à 8heures du matin Gilbert Delhaye dans le Bois de Vincennes. Les deux militants furent interpellés par trois inspecteurs de la BS1. Fouillé lors de son arrestation il portait sur lui une somme de sept mille francs, une fausse carte d’identité revêtue de sa photographie, une fausse attestation d’emploi et deux fausses cartes d’adhérent du Parti populaire français établie au nom de Dassonville, un carnet annoté, ainsi que des documents. Dans sa chambre les policiers saisissaient deux cents tracts édités par le parti communiste, une fausse carte d’identité vierge avec la photographie d’un homme, d’adresse d’une militante, Angèle 56 rue Notre-Dame de Nazareth.
Interrogé dans les locaux des Brigades spéciales, il déclara qu’il était sans travail depuis dix mois. Membre de l’organisation clandestine depuis deux mois, il était payé 1 500 francs par mois plus les frais de déplacement.
Il ne connaissait Pierre Brossard que sous le pseudonyme de Philibert, il était chargé du ravitaillement des clandestins. Il remettait à « Jeanne » des colis de victuailles, lapins, poulets, haricots, œufs… Les policiers lui demandèrent des explications sur la provenance des sept mille francs qui avait été saisi sur lui. Il répondit qu’il s’agissait « d’une avance de fonds sur mon travail ».
Sur son carnet figurait des notes en français et en allemand écrites au crayon à papier. Un policier lui en demanda la raison, il affirma que c’était dans le but de comprendre la langue allemande. Une grille avec des mots écrits verticalement et horizontalement intrigua les policiers. Il répondit qu’il s’agissait d’un jeu. Un inspecteur rétorqua qu’il s’agissait d’un code secret qui avait d’ailleurs été découvert sur un codétenu.
Sous le feu roulant des questions, la capacité de Gilbert Delhaye à dissimuler les faits s’amenuisait. Tout était codé les sommes qui lui étaient remises pour les achats chez des cultivateurs des Côtes-du-Nord (Côtes-d’Armor), mais aussi le poids des marchandises.
Interrogé Pierre Brossard affirma qu’il ne connaissait pas d’identité de « Jeanne ». Quant à « Delhaye que je connaissais sous le prénom de « Jean » devait m’être adjoint. J’avais l’intention de le mettre en liaison avec le fournisseur de cartes d’alimentation, de le charger du ravitaillement des militants et de l’achat du matériel. »
« Au moment de notre arrestation commune je venais de lui remettre en vue de ces achats éventuels une somme de 7 000 francs. »
Gilbert Delhaye a été incarcéré après son interrogatoire à la prison de La Santé, le 13 avril 1943 il a été transféré à la prison de Blois (Loir-et-Cher). Le 21 mai 1944 il était dans le convoi de 2004 hommes à destination du camp de concentration de Neuengamme (Allemagne). Les déportés arrivèrent au camp le 24 mai.
Le parcours concentrationnaire de Gilbert Delhaye demeura inconnu. Fin avril 1945 les dix mille déportés qui restaient au camp furent embarqués par les SS sur des « bateaux concentrationnaires » ancrés dans la baie de Lübeck. Le 3 mai 1945 les britanniques qui suspectaient que les navires transportaient des troupes allemandes bombardaient le Cap Arcona et le Thielbek. Dans les cales près de huit mille déportés, quatre cent cinquante survivront, les autres mourront sous les bombes, dans les incendies où noyés en mer. Gilbert Delhaye était parmi les victimes.
Son épouse Denise déposa plainte en 1945 devant la commission d’épuration de la police. Lors de la perquisition des vêtements disparurent, elle demanda la restitution des 7 000 francs dérobés quand son mari a été interpellé. Un membre de la commission lui répondit que la « somme de 7 000 francs a été placée sous scellé. »
Le nom de Gilbert Delhaye a été gravé sur monuments aux morts et sur la stèle commémorative dédiée « À la mémoire de tous ceux qui ont donné leur vie pour la défense et la libération de la France et dont les corps ne reviendront pas » au cimetière de Gennevilliers. Une plaque a été posée au dépôt des autobus 19 avenue Gabriel-Péri à Asnières dédiée « À la mémoire des agents du dépôt d’Asnières Mort pour la France », quinze noms ont été gravés dont celui de Gilbert Delhaye. Une stèle avec sa photographie a été posée au cimetière d’Abbecourt arrondissement de Beauvais, canton de Noailles dans l’Oise.

Pour citer cet article :
https://maitron.fr/spip.php?article222198, notice DELHAYE Gilbert, Alexis alias DASSONVILLE, alias BOMBLED par Daniel Grason, version mise en ligne le 28 janvier 2020, dernière modification le 28 janvier 2020.

Par Daniel Grason

SOURCES : 77 W 3101-219674, KB 48, PCF carton 14 rapport hebdomadaire des Renseignements généraux du 8 mars 1943. – Bureau Résistance (pas de dossier). – AM Gennevilliers témoignage écrit non daté de sa femme. – Livre-Mémorial, FMD, Éd. Tirésias, 2004. – Site internet GenWeb. – Bureau Résistance (pas de dossier).

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