DENIAU Roger, Aurélien

Par Gilles Morin

Né le 29 juillet 1899 à Françay (Loir-et-Cher), mort le 14 mai 1971 à Trélissac (Dordogne) ; employé ; syndicaliste et militant socialiste : résistant ; membre du Comité parisien de Libération et de l’Assemblée consultative provisoire ; membre du bureau clandestin de la CGT puis secrétaire de la CGT (1945-1946) ; maire de Puteaux (1944-1947) ; député à la deuxième Assemblée constituante (1946).

Roger Deniau était fils de Désiré-Achille Deniau, journalier, et de Marie-Berthe-Désirée Ploux, ménagère. Il devint employé. Membre de la SFIO parisienne à partir de 1931, il fut un actif militant de la fédération des employés CGT confédérée dès avant la fusion syndicale de 1936, proche d’Oreste Capocci* et d’Albert Gazier*. Il ne semble pas avoir occupé de responsabilité de premier plan avant 1939. En effet, il ne figure pas sur la liste des candidats au renouvellement de la direction du syndicat en 1938. Pourtant, le conseil d’administration du 6 octobre 1940 le confirma dans ses fonctions de secrétaire de la Chambre syndicale des employés de la région parisienne, en même temps que Gazier. Ce qui signifie probablement qu’il accéda à la direction syndicale après l’éviction des anciens unitaires.
Dans le combat que livraient aux partisans de la Charte du travail les pionniers de la Résistance - très présents parmi les employés comme Gazier et Capocci, deux des douze signataires du « Manifeste du syndicalisme français » -, Deniau se rangea résolument dans les rangs des seconds. Ceux-ci ayant choisi de pratiquer une politique de « présence » en même temps qu’ils organisaient la résistance, Deniau fut chargé par la Chambre syndicale, sous l’égide du ministère de la Jeunesse, de mettre en place un centre de « commerce », dans lequel les employés recevaient une solide éducation professionnelle. Le centre comprenait 150 jeunes, occupés toute la journée, bénéficiant d’avantages matériels (indemnités et un repas par jour). Dans le même temps, à côté de cette action syndicale légale, il fut l’un des chefs de Libération-Nord sur la Région parisienne, l’organisant en cellules clandestines et se spécialisant dans le renseignement économique. Il entra à la direction nationale du mouvement au début 1943, après le départ de Pineau* et Cavaillès. Cette action était profondément imbriquée avec la reconstruction du mouvement socialiste clandestin. Membre du Comité d’action socialiste, il diffusait autant Le Populaire clandestin que les journaux syndicaux et Libération.
Deniau entra par ailleurs au bureau clandestin de la CGT et participa à ce titre aux négociations qui conduisirent aux accords du Perreux entre les anciens confédérés et les anciens unitaires. Au début de l’année 1943, il fut coopté au comité directeur du Mouvement Libération-Nord et il fut organisateur et chef du mouvement pour la région parisienne.
Au titre de Libération-Nord, Deniau, délégué au Comité parisien de Libération, accéda à la vice-présidence de cet organisme clandestin. Mais l’ancien confédéré affronta - sans concessions - les frères ennemis communistes. Léo Hamon écrivait à son propos : « Les heurts avec ses partenaires communistes étaient fréquents. Leur opposition s’était si banalisée qu’elle ne laissait plus place à l’imprévu. » Leurs rapports se tendirent encore après le 6 juin 1944, lorsque la question de l’insurrection fut posée. Avec Hamon et Marie-Hélène Lefaucheux, il s’opposa à l’appel à l’insurrection, jusqu’au 19 août.
La Libération vit Deniau cumuler les fonctions. Secrétaire de la CGT en 1945-1946 (où il remplaça semble-t-il Boulanger*), il fut tout d’abord confirmé au Comité parisien de Libération, qui lui attribua la délicate fonction de commissaire au ravitaillement de la région parisienne. Puis, il fut délégué à l’Assemblée consultative provisoire (ACP), au nom de la CGT. Dans l’ACP, il fut secrétaire de la commission des affaires étrangères, appartint à la commission de la France d’outre-mer et à la commission de coordination des affaires musulmanes. Il fut ensuite élu maire de Puteaux, conseiller général de la ville et vice-président de l’Assemblée départementale de la Seine en avril 1945. Il renforça cet enracinement en assurant la direction de l’hebdomadaire Paris-Ouest.
Deniau devait être candidat à la 2e Constituante en juin 1946 en Haute-Saône, le congrès fédéral de ce département ayant approuvé à l’unanimité sa candidature le 14 avril 1946. Mais, il se retira au dernier moment « sous la pression de sa section » de Puteaux qui voulait qu’il présente sa candidature dans le 5e secteur de la Seine sur la liste conduite par son camarade Albert Gazier. La SFIO présenta donc sa candidature et il fut élu député. Secrétaire de la commission des affaires étrangères, membre de la commission de la France d’outre-Mer et de la commission de coordination des Affaires musulmanes, il fut rapporteur de plusieurs textes importants, notamment sur la participation des colonisés aux élections parlementaires. Mais Deniau ne resta député que six mois. Il fut battu aux élections législatives de novembre et se présenta sans succès au Conseil de la République en décembre 1946 en deuxième position de la liste socialiste, puis en 1948 en quatrième position sur la liste de la SFIO.
Deniau fut désigné secrétaire adjoint de la fédération de la Seine en 1947, comme responsable de la propagande. Il fut candidat au comité directeur en 1947 et en 1948 et signa la motion Gazier au congrès national de 1960.
S’étant intéressé à l’Union française lors de son mandat de député, il entra au cabinet de Marius Moutet*, ministre de la France d’Outre-Mer dans le gouvernement de Paul Ramadier en janvier 1947. En 1955, on le retrouvait installé à Dakar, où il faisait en 1958 le lien entre les socialistes africains qui avaient obtenu leur autonomie politique et la direction de la SFIO (Ernest Cazelles*).
De retour en France, installé en Dordogne, il fut élu conseiller municipal de Trélissac en 1965. L’année suivante, il figura comme responsable de la Fédération de la gauche européenne du département et était représentant des clubs à la FGDS de la Dordogne. Au congrès fédéral du PS de juin 1970, il se prononça pour la rupture des pourparlers avec les communistes et défendait les thèses de Chandernagor*.
Deniau était médaillé de la Résistance avec rosette. Il s’était marié le 1er février 1926 à Margueritte Ferciot, mécanographe, née le 21 octobre 1902 à Saint-Laurent-du-Var. Le couple eut un fils.

Pour citer cet article :
https://maitron.fr/spip.php?article22251, notice DENIAU Roger, Aurélien par Gilles Morin, version mise en ligne le 25 octobre 2008, dernière modification le 25 octobre 2008.

Par Gilles Morin

SOURCES : Arch. Nat., F/1cII/113/B et 552. — Arch. PPo, BA2/1965, 66.33. — Arch. de l’Assemblée nationale, dossier personnel. — Arch. OURS, fonds Gazier, dossiers résistance. — Rapports des congrès de la SFIO, 1944-1967. — Bulletin intérieur de la SFIO, n° 27, 35, 116. — D. Mayer, Les socialistes dans la Résistance. — Profession de foi aux législatives de juin 1946. — Léo Hamon, Vivre ses choix, Robert Laffont, 1991. — Roussier, Conseillers municipaux et généraux, 1957. — Noguères, Histoire de la Résistance, t. III, p. 167 — Marc Sadoun, Les Socialistes dans la Résistance, PFNSP, 1982, p. 155. — Le Monde, 18 mai 1971. — Notice DBMOF. — Renseignements communiqués par son fils.

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