DEROGY Jacques [né WEITZMANN Jacques, Julien, dit]

Par Claude Pennetier

Né 24 juillet 1925 à Paris, mort le 30 octobre 1997 à Neuilly-sur-Seine (Hauts-de-Seine) ; journaliste, écrivain ; militant de la Maternité heureuse et du Planning familial ; militant communiste jusqu’en 1956.

Jacques Derogy fit des études au lycée Henri IV mais les menaces contre les juifs l’obligèrent à quitter Paris. Il passa la guerre en Ardèche, dans la clandestinité.
Revenu à Paris, il fut étudiant en philosophie à la Sorbonne jusqu’à la licence, mais il interrompit ses études pour devenir journaliste à Franc-Tireur. Il s’était marié avec la secrétaire du rédacteur en chef. Il fut d’abord stagiaire à la rubrique « faits-divers » du quotidien puis eut l’occasion de faire, en 1947, un reportage sur l’affaire de l’Exodus qui marqua sa carrière. Devenu communiste, il entra au journal Libération Emmanuel D’Astier de la Vigerie* lui demanda en 1955 une enquête consacrée à la question de l’avortement, qui fut publiée dans le journal puis aux Éditions de Minuit sous le titre Des enfants malgré nous avec une préface de la doctoresse Marie-Andrée Lagroua Weill-Hallé*. Celle-ci fonda en 1956, avec Évelyne Sullerot la Maternité Heureuse. Le succès de ces publications provoqua les foudres du Parti communiste qui, par la voix de Maurice Thorez* et de son épouse Jeannette Vermeersch* dénonça le néo-malthusianisme. Les premières attaques vinrent de Marie-Claude Vaillant-Couturier lors du meeting du 7 mars 1956 à la Mutualité, puis l’Humanité du 2 mai publia la « Lettre de Maurice Thorez à Jacques Derogy », avant de répondre le 18 mai 1956 à Marie-Andrée Lagroua Weill-Hallé. Le Parti communiste ne s’était pas associé à la proposition de loi des députés progressistes du 24 février 1956 demandant l’abrogation des articles 3 et 4 de la loi de 1920, ni à celle des radicaux le 16 mars 1956, ni à celle des socialistes le 25 mai, se limitant à déposer, fin mai, une proposition de loi autorisant un élargissement de l’avortement thérapeutique pour les mères mariées de trois enfants tout en réaffirmant son hostilité au contrôle des naissances.

Jacques Derogy quitta le Parti communiste et orienta alors son militantisme, dans le cadre de la Maternité Heureuse devenu Mouvement français pour le Planning familial (MFPF) en 1960. Le 10 juin 1961, avec le docteur Jean Dalsace*, il assista, à Grenoble, à l’ouverture du premier centre du Planning familial qui connut un succès considérable et ouvrit la voie à une multiplication des centres.

Après la loi Neuwirth libéralisant la contraception de 1967, il accompagna Anne-Marie Dourlen-Rollier* dans la demande d’une libéralisation partielle de l’avortement dans le cadre de l’Association nationale pour l’étude de l’avortement (ANEA) crée en 1969.

Journaliste à L’Express, Jacques Derogy gagna ses galons de journaliste d’investigation lors de l’affaire Ben Barka. Il suivit en Israël la guerre des Six-Jours (1967), et consacra une grande partie de sa production au conflit israélo-palestinien. Enquêteur perspicace, il permit à son journal de faire des révélation, ainsi dans l’affaire Paul Touvier.

Pour citer cet article :
https://maitron.fr/spip.php?article22367, notice DEROGY Jacques [né WEITZMANN Jacques, Julien, dit] par Claude Pennetier, version mise en ligne le 25 octobre 2008, dernière modification le 5 mars 2024.

Par Claude Pennetier

ŒUVRE : Des enfants malgré nous, Les Éditions de Minuit, 1956, 255 p. — Vaincre le cancer, Les Éditions de Minuit, 1958, 143 p. — Population sur mesure (avec Paul Lescaut), Éditions du Seuil, 1965, 126 p. — Les secrets du ballottage : le récit heure par heure de la course à l’Élysée (avec Jean-François Kahn), Fayard, 1966, 283 p. — La loi du retour, la secrète et véritable histoire de l’Exodus, Fayard, 1970, 441 p. — Cent mille Juifs à la mer, Stock, 1973, 249 p. — Israël, la mort en face (avec Jean-Noël Gurgand), R. Laffont, 1974, 383 p. — Enquête sur un juge assassiné : vie et mort du magistrat lyonnais François Renaud, R. Laffont, 1977, 265 p. — Histoire secrète d’Israël (avec Hesi Carmel), O. Orban, 1978, 394 p. — Le Cas Wallenberg, Ramsay, 1980, 246 p. — La Traque : une enquête, O. Orban, 1980, 245 p. — Enquête sur les affaires d’un septennat (avec Jean-Marie Pontaut), R. Laffont, 1981, 336 p. — Enquête sur les mystères de Marseille (avec Jean-Marie Pontaut et la coll. de Robert Arduin), R. Laffont, 1984, 393 p. — Enquête sur trois secrets d’État (avec Jean-Marie Pontaut et la coll. d’Alain Louyot), R. Laffont, 1986, 361 p. — Opération Nemesis, Fayard, 1986. — Enquête sur un Carrefour dangereux (avec Jean-Marie Pontaut), Fayard, 1987, 282 p. — Histoire de l’« Exodus » : la loi du retour, Fayard, 1987, 426 p. — Israël ultra-secret (avec Hesi Carmel), R. Laffont, 1989, 334 p. — Enquête sur les ripoux de la Côte (avec Jean-Marie Pontaut), Fayard, 1991, 510 p. — Bonaparte en Terre sainte, Fayard, 1992, 494 p. — Investigation passion (avec Jean-Marie Pontaut), Fayard, 1993, 570 p. — Le siècle d’Israël, les secrets d’une épopée (1895-1995), Fayard, 1994, 854 p. — Ils ont tué Rabin : enquête sur une mort annoncée (avec Hesi Carmel, sous la dir. de Ch. Ronsac), R. Laffont, 1996, 238 p. — Une ligne de chance, : autobiographie interrompue, Fayard, 1998, 156 p. — Ils ont tué Ben Barka (avec Frédéric Ploquin et la collaboration de René Derogy-Weitzmann), Fayard, 1999, 455 p.

SOURCES : L’Humanité, 1er novembre 1997. — Sylvie Chaperon, Les années Beauvoir 1945-1970, Fayard, 2000. — Christine Bard, Janine Mossuz-Lavau (direction), Le planning familial : histoire et mémoire (1956-2006), Rennes, PUR, 2007. — D’une révolte à une lutte, 25 ans d’histoire du Planning familial, collectif, éditions Tierce, 1983.

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