DESCOMPS Hector, Henri, Robert. Surnom : Tod. Pseudonymes dans la Résistance : Delacroix (pour le Front National), Gréco (pour le colonel Rémy)

Par Daniel Virieux

Né le 17 mai 1900 à Paris (XIVe arr.), mort le 4 juillet 1972 à l’hôpital Cochin ; médecin phtisiologue, praticien des hôpitaux et sanatoriums parisiens et médecin du travail ; pionnier de la Résistance médicale (Médecin Français, Service Sanitaire des FTP) et du Front National des médecins (printemps 1941), puis du Comité médical de la Résistance (octobre 1943) ; chargé de mission et conseiller technique au ministère de la Santé et de la Population puis au ministère du Travail et de la Sécurité sociale jusqu’en avril 1948 ; membre du Conseil national de l’ordre des médecins jusqu’en 1952 ; membre du PCF (1945-1958), membre du comité directeur de l’Union des médecins français et de l’Union nationale des médecins pour la paix ; fondateur (1953) de l’Association médicale internationale pour l’étude des conditions de vie dont il devint le vice-président.

Hector Descomps vécut toute sa vie à Paris. Son père, Joé Descomps, fils d’un Receveur de l’Enregistrement, voulait, depuis l’enfance, devenir sculpteur. Pour y parvenir, il s’engagea comme apprenti ciseleur, fonda son propre atelier puis, l’aisance atteinte, se consacra à la sculpture sous le pseudonyme de Cormier. Sa mère, Augustine Franchet, fille d’un enfant remis à l’Assistance Publique devenu directeur d’école, était institutrice comme la plupart de ses nombreux frères et sœurs. Hector Descomps fut ainsi élevé dans une culture familiale humaniste et républicaine, privilégiant le dévouement au service public. Trop jeune pour être mobilisé ou s’engager - ce que fit son frère aîné Daniel -, Hector Descomps tira de la Première Guerre Mondiale une leçon de pacifisme, teinté d’une sympathie, partagée avec ses amis surréalistes, pour la révolution russe. Bachelier en juillet 1917, il obtint son PCN en mai 1918 et, bien que très attiré par les arts plastiques, opta finalement pour la faculté de médecine. Très sportif, Hector Descomps pratiquait aussi bien le foot, le tennis, l’athlétisme, le ski, ou l’aviron ; ses performances en alpinisme lui ouvrant même les portes du ’Groupe de Haute Montagne’. En fréquentant la librairie d’Adrienne Monnier, rue de l’Odéon, il fit la connaissance de Paulette Duceux, également étudiante en médecine, qu’il épousa le 13 février 1924 et dont il eut deux filles : Sylvie (9 juillet 1927) et Claude (3 octobre 1928) - l’une parrainée par Robert Worms, l’autre par Marc Nédelec et Charlotte Aman-Jean. Sylvie et Claude Descomps reçurent une éducation d’esprit humaniste et laïc, aux « Éclaireuses neutres de France » comme à l’école de Paul Vasseur, fondateur de la gymnastique eurythmique. Familiers des manifestations culturelles les plus diverses, dès avant la guerre, les Descomps comptaient dans leur entourage proche nombre d’écrivains, artistes, savants et ingénieurs.
Ayant échoué au concours de l’Internat des Hôpitaux Publics de Paris, Hector Descomps entra en mars 1927, comme interne dans un établissement privé - l’hôpital Saint-Joseph. En mai 1927, il soutint sa thèse de doctorat en médecine sur le pneumothorax puis effectua son service militaire en compagnie de Marc Nédélec. Rendu à la vie civile en avril 1928, Hector Descomps reprit son poste à l’hôpital Saint-Joseph, où il fut promu médecin-assistant en février 1930. À partir de mai 1929, il exerçait en outre au sanatorium de Villepinte, où il fut nommé médecin-chef en novembre 1931. Associé, entre autres, à son ami Raymond Leibovici pour la création, en mai 1931, de la clinique Rémy de Gourmont, Hector Descomps y côtoyait notamment Philippe Soupault, Fritz Busser, Geneviève Leibovici et Isabelle Zimmer. À partir de 1933, Hector Descomps fut aussi appelé à travailler pour l’Hygiène scolaire puis, deux ans plus tard, à intervenir en chirurgie thoracique dans le service du Professeur Émile Sergent à l’hôpital Broussais. Dans le même temps il donnait des consultations à son domicile, au 42 rue Denfert-Rochereau où il avait emménagé en janvier 1929, puis au 1 rue Le Nôtre à partir de janvier 1934. Parallèlement, Hector Descomps participait à la réflexion scientifique sur la connaissance et le traitement de la tuberculose, en publiant régulièrement dans diverses revues médicales (treize articles entre 1929 et 1939). En 1934, il siégeait aux côtés de médecins comme Thérèse Bertrand-Fontaine, Germaine Dreyfus-Sée, André Laporte, au comité de rédaction du Bulletin général de thérapeutique et de Thérapeutiques Médicales d’actualité, son complément annuel, revues animées par le Professeur Gilbert-Dreyfus.
La crise de février 1934 conforta Hector Descomps dans ses convictions antifascistes sans le conduire à prendre des positions politiques précises ni même à voter aux élections de 1936, dont il se félicita pourtant des résultats. Il admirait son ami Henri Grandjouan pour son engagement au soutien de l’Espagne républicaine et il aida des intellectuels espagnols réfugiés comme Rafaël Alberti. Observateur attentif de l’environnement de ses malades, tuberculeux pour la plupart, Hector Descomps vécut les événements de l’entre-deux-guerres en donnant à ses choix politiques une traduction militante essentiellement sur le terrain professionnel. Ainsi, la période du Front Populaire fut surtout pour lui la découverte de la condition ouvrière, à l’occasion d’une visite des ateliers des usines Citroën en 1937. Cette même année, un article sur « la réadaptation des tuberculeux au travail » paru dans le Bulletin général de thérapeutique signalait l’intérêt désormais porté par Hector Descomps à la médecine sociale.
À l’été 1939, les vacances que passaient près de Briançon les familles Picard, Houdia et Descomps furent écourtées par la déclaration de guerre. Mobilisé le 8 septembre 1939 dans la IXe armée ; Hector Descomps, qui avait horreur de la guerre, était cependant convaincu que cette dernière s’opposait au fascisme. Il passa la « drôle de guerre » à l’hôpital de Laon où il retrouva, notamment, ses amis François Aman-Jean, Jean Dalsace et Jean Bernard. Pendant ce temps, Paulette Descomps faisait fonction d’interne à l’hôpital Cochin et soutenait, en avril 1940, sa thèse de doctorat en médecine sur un cas de fibrome du poumon. Médecin-capitaine depuis le 10 mai 1940, Hector Descomps se porta volontaire pour des missions périlleuses : il revint ainsi à Laon assurer, les 17 et 18 mai 1940, sous le feu ennemi, l’évacuation des blessés et du matériel sanitaire vers Soissons, ce qui lui valut une citation à l’ordre-du-jour du régiment et la Croix de Guerre. Le 13 juin 1940, sa femme le retrouva au Havre, et tous deux décidèrent l’évacuation de la famille chez leurs cousins, Léon et Marie Vasseur, à Sauxillanges (Puy-de-Dôme). Faisant étape à Vichy, le 17 juin 1940, chez les Dalsace, Paulette Descomps y manquait de peu son mari, parti à La Châtre avec Jean Dalsace. Hector Descomps ne rejoignit les siens à Sauxillanges qu’après sa démobilisation le 22 juillet 1940 à Montignac-sur-Vézère (Dordogne). Alors tenté par le choix du général de Gaulle qu’il avait connu dans la poche de Laon et dont il avait entendu par la suite l’appel dans son ambulance, Hector Descomps n’écartait pas l’hypothèse d’une expatriation. Le 12 août 1940, il accompagnait son père à son domicile de La Charité-sur-Loire, pendant que sa femme partait avec les enfants vers Ax-les-Thermes (Ariège), proche de la frontière espagnole. Le 13 août 1940, Hector Descomps se rendait à Paris où il retrouvait bientôt patients, amis et collègues - en particulier Germaine Dreyfus-Sée, déjà impliquée dans une action résistante. Il décida alors de rester en métropole et reprit ses activités professionnelles, finalement rejoint en septembre 1940 par sa femme et ses enfants.
À l’automne 1940, Hector Descomps fit la connaissance de Jean Jérôme par l’intermédiaire de Raymond Leibovici, lui-même mis en contact avec le dirigeant communiste clandestin par Isabelle Zimmer. Après un temps de réflexion, Hector et Paulette Descomps acceptèrent de « planquer » Jean Jérome. En mars 1941, Paulette Descomps entrait dans l’équipe des agents de liaison de l’Organisation Spéciale (OS), pendant que, par le canal de Raymond Leibovici, Hector Descomps participait au lancement du Médecin Français dont Jean-Claude Bauer coordonnait la rédaction et assurait le tirage. Il écrivit probablement, l’article sur la « gravité actuelle de la tuberculose » paru dans le numéro de juillet 1941 de la feuille clandestine. À l’été 1941, Hector Descomps fut co-fondateur du premier comité de Front National des médecins qui commença par réunir chez lui Gaston Cordier, André Laporte, Lucien Bonnafé et son ami Fritz Busser. N’appartenant à aucune organisation, Hector Descomps était tout particulièrement chargé des contacts avec les personnalités non-communistes, notamment celles du groupe de Pasteur-Vallery-Radot, bientôt affilié au mouvement de résistance Organisation Civile et Militaire (OCM). Hector Descomps participa également à la construction du service sanitaire des Francs-Tireurs et Partisans (FTP) ébauchée par Raymond Leibovici au printemps 1942 et soigna dans ce cadre bien des combattants blessés.
Hector Descomps exerçait toujours au 1 rue Le Nôtre, à l’hôpital Saint-Joseph et au sanatorium de Villepinte. Il devint également médecin-assistant - stagiaire en mars 1941, titulaire à partir d’avril 1942 -, au service des dispensaires antituberculeux de l’Office Public d’Hygiène Sociale. Au début juillet 1944, Hector Descomps fut habilité par le secrétariat d’état à la Santé à pratiquer la chirurgie thoracique dans tous les sanatoriums publics. Parallèlement, à partir de janvier 1942 Hector Descomps entrait comme médecin-remplaçant dans les usines d’aviation de la SNCASO (Suresnes-Courbevoie-Montrouge), succédant là à Jean Bernard, passé en Zone non occupée (ZNO) à la suite du démantèlement de son réseau résistant - Combat Zone occupée (ZO). Ce poste de médecin du travail permit à Hector Descomps de réformer de nombreux ouvriers menacés par la réquisition de la main-d’œuvre. Pendant les années de guerre, il cessa de publier dans les revues médicales légales - à l’exception d’un article, paru en septembre 1943 dans la Revue de la tuberculose, marquant le point de départ d’un traitement nouveau et efficace de l’asthme.
Avec sa double entrée, sa « crypte » - une pièce en sous-sol -, ses 250 m_ et le va-et-vient des consultants, le 1 rue Le Nôtre se prêtait remarquablement à l’accueil des clandestins : « toute la résistance active défila dans le cabinet du Dr Hector Descomps » a pu écrire Yves Farge. Outre Jean Jérome, Hector et Paulette Descomps hébergèrent pendant plusieurs semaines leurs amis Max et Fanny Petit, menacés après le départ de Rémy de la capitale le 12 juin 1942. C’est peut-être par ce canal que furent renoués les contacts entre Georges Beaufils et Pierre Brossolette fin juillet 1942. C’est en tout cas chez les Descomps que Max Petit conduisit le colonel Rémy, de retour à Paris le 14 octobre 1942. Une partie des négociations sur l’envoi d’un mandataire du PCF à Londres se déroula au 1 rue Le Nôtre : l’entrevue exploratoire du 20 novembre 1942 entre Jean Jérome et Rémy et, début décembre 1942, après la signature de l’accord conclu entre Forces Françaises Combattantes et PCF, la réunion préparatoire Jean Jérome - Fernand Grenier et l’entretien au cours duquel Jean Jérome dévoila à Rémy l’identité de son futur partenaire. Ce soir là Hector Descomps avait auparavant emmené Rémy chez Robert Debré pour l’aider à convaincre les médecins OCM - Pasteur-Vallery-Radot, Paul Milliez, Robert Merle d’Aubigné et Thérèse Bertrand-Fontaine - d’accepter une entente de Front National avec l’équipe du Médecin Français. Par Hector Descomps, le chef de Confrérie Notre-Dame fit également la connaissance de Pierre Villon, alors responsable des groupements de Front National dans les milieux intellectuels. À la Noël 1942, Hector Descomps reçut la visite de son ami Jean Prévost alors résistant en région lyonnaise, puis les adieux de Lucien Bonnafé, contraint de quitter Paris pour la Lozère. Début 1943, en accord avec Jean Jérome, Hector Descomps prépara avec Marc Nédélec le départ à Londres de Serge Huard, ancien secrétaire d’état à la Santé à Vichy mais opposant à Pétain depuis l’occupation de la Zone Sud (ZS). L’opération ne put avoir lieu mais, avant de mourir d’un cancer, Serge Huard donna à Hector Descomps l’accès aux « planques » de la Croix-Rouge. La chute de Jean Jérome, le 14 avril 1943, ne compromit pas la sécurité des Descomps qui continuèrent de recevoir des résistants. Raymond Leibovici et le général Paul Bloch-Dassault étaient tous deux familiers du mercredi (jour de consultations). Jean Bernard revenu à Paris après le démantèlement de son réseau (Carte), n’hésita pas à se présenter après son internement à Fresnes au printemps 1943. Hébergé chez les Descomps pendant la première quinzaine de juin 1943, Pierre Dalloz s’entretenait, le 6 juin 1943, dans la « crypte » du 1 rue Le Nôtre, avec le général Delestraint, chargé du commandement de l’Armée Secrète (AS). Peu après, Hector Descomps facilitait l’organisation, chez ses amis Robert et Lucienne Houdia, 26 avenue Marceau, d’une rencontre, portant sur le Vercors, entre Pierre Villon et Pierre Dalloz. À la mi-octobre 1943, les Descomps hébergèrent à nouveau ce dernier et le guidèrent vers l’appareil technique central du PCF grâce auquel il obtint les faux-papiers nécessaires pour son voyage, entrepris vers Alger le 22 octobre 1943.
Depuis mai 1943, Paulette Descomps effectuait des liaisons pour le service d’aide aux réfractaires, officiellement institué sous le nom de Comité d’action contre la déportation (CAD) lors d’une réunion au 1 rue Le Nôtre, le 14 juillet 1943. C’est elle qui fut chargée de la gestion des fonds, des faux-papiers et des cartes d’alimentation. À l’automne 1943, au sein du Front National des Médecins désormais structuré en une organisation autonome affilié au mouvement de résistance Front National (FN), Hector Descomps s’effaçait devant Robert Debré, promu président du comité directeur de la nouvelle formation. Le 8 octobre 1943, à la 2e séance du Comité médical de la Résistance (CMR) où, aux côtés de Raymond Leibovici mandaté par les FTP, il avait accepté de représenter le FN des Médecins, Hector Descomps plaidait pour l’entrée au CMR de représentants d’autres Mouvements, tel Libération-Nord. Au comité directeur du FN des Médecins, parfois réuni au 1 rue Le Nôtre, il participa activement aux débats sur la préparation de l’après-Libération et la réforme de la médecine, préconisant notamment le plein temps hospitalier. Mais, dans l’action clandestine comme dans la vie professionnelle, Hector Descomps se consacra surtout au traitement des questions de médecine sociale. En février 1944, il portait ainsi à son terme le projet, initié au début novembre 1943, d’une enquête nationale sur la tuberculose dans les usines aéronautiques. Parallèlement, il présentait au comité directeur du FN des Médecins un rapport sur « Le développement de la tuberculose en France depuis l’occupation allemande », destiné à être envoyé à Londres.
A partir du printemps 1944 l’étau se resserra autour des familiers du 1 rue Le Nôtre. Le 6 avril, Hector Descomps aida Raymond Leibovici à réaliser le périlleux sauvetage de Pierre Villon accidenté qu’il porta sur son dos jusqu’à l’ambulance préparée à cet effet. À leur retour au 1 rue Le Nôtre, ils étaient accueillis par Robert Debré et Elisabeth de la Bourdonnaye. Le 10 mai 1944, gravement atteint de pleurésie, Hector Descomps ne put se présenter à un rendez-vous convenu avec Pierre Milliez et ne reconnut pas au téléphone la voix de ’Monsieur Olivier’. Doublement inquiet ce dernier ne rentra pas chez lui, échappant ainsi au coup de filet qui s’abattit le lendemain sur la résistance médicale. Lors de cette perquisition par la Sipo-SD (Gestapo), Paulette Descomps obtint cependant un répit pour son mari. Assuré de l’hébergement de ses filles chez le cinéaste Pierre Bost, dans la soirée du 12 mai 1944, aidé par Robert Houdia, Hector Descomps gagnait en vélo une « planque » d’Yves Farge à Auteuil où il demeura jusqu’au débarquement. Le 25 mai 1944, pressé par Raymond Leibovici, Jean Bernard acceptait de remplacer Hector Descomps à son poste de chef de secteur du Service Sanitaire FFI en Ile-de-France. Au cours de la période insurrectionnelle, Jean Jérome, libéré le 18 août de la Santé, fit transférer au 1 rue Le Nôtre l’état-major national FTP qui siégea là du 21 au 25 août 1944. Promu au grade de Médecin-commandant à compter du 19 août 1944, au nom du CMR, Hector Descomps occupait les locaux du Conseil National de l’Ordre des Médecins, le 23 août 1944.
Le 5 septembre 1944, il participa à la réunion du comité directeur élargi du FN des Médecins, présenta un rapport sur la lutte contre la tuberculose à la séance du 15 septembre 1944 puis, épuisé, partit se reposer en région lyonnaise. Revenu à Paris le 30 septembre 1944, Hector Descomps reprit sa place au CMR et son poste d’adjoint de Raymond Leibovici au Service Santé FFI Ile-de-France, sans retrouver son mandat de « gérant du Conseil National de l’Ordre » attribué, en son absence, par le CMR, à André Plichet. Pendant que Paulette Descomps, capitaine FFI, s’engageait dans les Auxiliaires Féminines de l’Armée de Terre (AFAT), Hector Descomps était attaché au cabinet du Ministère de la Santé et de la Population, disposant à ce titre d’un laisser-passer permanent signé par Pierre Rouquès, chef de cabinet. Dès le 30 septembre 1944, Hector Descomps participa ainsi à la 1re séance de la Commission d’Etudes sur la lutte contre la tuberculose créée par ce Ministère, puis, à partir du 23 février 1945, à la section tuberculose du Conseil Permanent de l’Hygiène Sociale. Dans l’intervalle, à l’assemblée générale du CMR de la mi-janvier 1945, Hector Descomps avait rendu compte de sa mission au Ministère du Travail auprès duquel il avait été chargé, en novembre 1944, de négocier les termes d’une réforme du statut médical des assurances sociales. Membre du Conseil Supérieur des Médecins, substitué en décembre 1944 au Conseil National de l’Ordre, Hector Descomps participa aussi au « conseil restreint » de cette instance, réuni par André Plichet, à partir du 10 mars 1945, pour préparer auprès du Ministère du Travail l’ordonnance destinée à réglementer les professions médicales et à instituer un Ordre des médecins de type nouveau. Dans le même temps, Hector Descomps se révélait particulièrement actif dans le traitement des questions relatives à l’encadrement sanitaire des déportés et prisonniers, en cours de rapatriement. Partisan d’un traitement par hydrolysats de protéines pour la ré-alimentation, au moyen de sondes ou d’injections intraveineuses, des déportés rapatriés, il organisa l’importation (Angleterre) - puis la fabrication en France -, et la répartition de ces aliments prédigérés dans les hôpitaux et jusque dans les camps. Parallèlement, il joua un rôle prépondérant dans la Mission Française de Rapatriement Aérien (MFRA) au sein de la Commission interministérielle associant le Ministère de la Santé Publique, celui des Prisonniers de Guerre, Déportés et Réfugiés et celui de l’Air. Au nom de ces instances il fit plusieurs voyages à l’étranger (Royaume-Uni, Allemagne, Autriche, Suède, Tchécoslovaquie, Hongrie). La guerre terminée, Hector et Paulette Descomps recevaient tous deux la Médaille de la Résistance et la Croix de Guerre - « avec étoile de vermeil » pour lui, « avec palmes » pour elle - et Hector Descomps était fait Chevalier de la Légion d’Honneur.
En mai 1945, il siégeait encore au CMR et acceptait d’entrer au comité directeur de l’Union des médecins français, héritière du FN des médecins et du Comité national des médecins français, mais il n’occupait pas de postes à responsabilités dans ces instances. De même, tout en continuant de publier dans Le Médecin Français, Hector Descomps ne figurait pas dans le comité de rédaction de la revue dont il avait pourtant été l’un des fondateurs. Ayant accepté d’exercer des missions de service public au nom d’un Ministère confié au communiste François Billoux, Hector Descomps jugea cohérent de s’inscrire au PCF courant 1945, mais cette adhésion ne s’accompagna pas, là non plus, d’un militantisme particulier. Par contre, l’engagement d’Hector Descomps au service de la chose publique ne cessa de croître. À partir du 5 décembre 1945, Hector Descomps fut chargé de mission contractuel dans le cabinet d’Ambroise Croizat. Il siégea à ce titre au Comité technique d’action sanitaire et sociale (CTASS) à partir de janvier 1946. Attaché à la fois au cabinet du Ministère de la Santé et à celui du Ministère du Travail, Hector Descomps participa à la rédaction des projets de lois, ordonnances et décrets d’application concernant aussi bien l’organisation de la Sécurité Sociale que la réorganisation des professions médicales - notamment l’ordonnance du 24 septembre 1945 -, et des diverses instances de médecine sociale - en particulier, la loi du 11 octobre 1946 instituant la Médecine du Travail. L’implication d’Hector Descomps s’accentua encore avec sa nomination comme conseiller technique médical au Ministère du Travail et de la Sécurité Sociale, le 20 décembre 1946. Bien qu’il dût quitter ce poste en avril 1948, jusqu’au 31 janvier 1952, il continua de représenter le Ministère au Conseil National de l’Ordre des Médecins et siégea jusqu’à sa mort au CTASS et au Conseil Permanent d’Hygiène Sociale, devenu Conseil Médical Supérieur en décembre 1965. À ces charges, Hector Descomps ajoutait, le 19 décembre 1956, celle de membre du Comité d’action sanitaire et sociale institué auprès du Conseil supérieur de la Sécurité sociale puis celle d’expert près la Cour d’Appel de Paris, le 17 février 1964. En dépit de la multiplicité de ces missions, Hector Descomps n’abandonna jamais ses activités professionnelles qui évoluèrent cependant notablement. En octobre 1946, il avait démissionné de l’hôpital Saint-Joseph pour entrer, en janvier 1947, comme vacataire à l’hôpital Beaujon. Devenu médecin-assistant, il y exerça jusqu’en 1967, participant aux progrès décisifs de la lutte antituberculeuse liés à la mise au point des antibiotiques. Hector Descomps poursuivit là l’expérimentation de son traitement de l’asthme et de certaines affections allergiques et aborda l’étude de son mécanisme d’action. Il apporta ainsi des résultats qui mettaient en évidence l’intervention de certains éléments du système endocrinien, mais après sa mort, cette méthode ne connut pas la diffusion qu’elle aurait méritée. Hector Descomps publia régulièrement dans les revues médicales (15 articles entre 1955 et 1970), dirigea plusieurs thèses de doctorat et inspira d’autres travaux de recherches. Parallèlement, bien que son contrat avec la SNCASO ait pris fin le 30 septembre 1947, Hector Descomps ne renonça pas à l’exercice de la médecine du travail : inscrit, le 23 juin 1949, sur la liste d’aptitude aux fonctions de médecin-conseiller de la Sécurité Sociale dans les mines, il fit par la suite de nombreux rapports d’expertise en matière de silicose comme médecin-inspecteur du travail spécialisé en matière de pneumoconiose.
Médecin dévoué au service public, Hector Descomps ne limita pas son action aux seules instances étatiques et administratives. Ne trouvant, ni au PCF - qu’il quitta après 1958 - ni à l’Union rationaliste, ni ailleurs, les instruments adaptés à son militantisme pour la médecine sociale, Hector Descomps fut la cheville ouvrière d’une organisation mondiale : L’Association médicale internationale pour l’étude des conditions de vie et de la santé (AMIEV) dont l’acte fondateur fut les Assises Nationales de la Santé tenues, le 27 mai 1951, sous les auspices de l’Union Nationale des Médecins pour la Paix, elle-même fondée le 31 janvier 1951. Hector Descomps fit à cette occasion une communication sur « Le retentissement des conditions de vie sur la santé ». Familiarisé aux échanges internationaux par sa participation à diverses délégations médicales - au Royaume-Uni (avril 1945), en Suède (mai 1946), en URSS (septembre 1951), il présida les séances du Ier congrès mondial sur l’étude des relations entre conditions de vie et santé, tenu à Vienne les 23-25 mai 1953, où il intervint avec Henri Desoille. Hector Descomps participa activement au lancement en octobre 1956, de la revue trimestrielle Les conditions de vie et de santé dont le siège social fut situé au 1 rue Le Nôtre. C’est là que fut implanté, sous sa responsabilité, le secrétariat d’organisation du 2e congrès mondial, tenu à Cannes les 27-29 septembre 1957. À partir de 1959, le siège social de la revue, déjà internationale, fut transféré à Vienne et, au 3e congrès mondial qui se tint à Saint-Vincent (Italie) les 29 septembre et 1er octobre 1961, Hector Descomps représentait la France dans le comité international de rédaction. Il assuma les mêmes fonctions à la 1re conférence sur les conditions de vie et de santé dans le Bassin méditerranéen et la mer Noire, tenue les 17-20 septembre 1963 à Palerme. Il avait prévu de rapporter les 6-9 avril 1971 au Ve congrès de l’Association Médicale Internationale pour l’Etude des Conditions de Vie (AMIEV) dont il était devenu l’un des deux vice-présidents mais il était déjà terrassé par l’hépatite virale dont les suites l’emportèrent le 4 juillet 1972, alors qu’il donnait encore des consultations et rédigeait une grande « Histoire de la Médecine Sociale ».

Pour citer cet article :
https://maitron.fr/spip.php?article22448, notice DESCOMPS Hector, Henri, Robert. Surnom : Tod. Pseudonymes dans la Résistance : Delacroix (pour le Front National), Gréco (pour le colonel Rémy) par Daniel Virieux, version mise en ligne le 25 octobre 2008, dernière modification le 29 avril 2022.

Par Daniel Virieux

ŒUVRE : « Contribution à l’étude du pneumothorax artificiel. Modifications morphologiques, topographiques et cinématiques apportées par l’insufflation aux organes et aux parois limitant la cavité pleurale », thèse de doctorat en médecine, soutenue à Paris le 17 mai 1927 (directeur de thèse : J. Genévrier ; président du jury : Étienne Sergent. Médaille de bronze le 26 janvier 1928) — Publications non spécialisées : « L’urgence antituberculose », Le Médecin Français, n° 27, 25 octobre 1944 ; « Le retentissement des conditions de vie sur la santé », Le Médecin Français, XIe année, n° 7-8, 1951 ; « La Médecine des Mines à la Renaissance », Les conditions de vie et la santé, n° 1, octobre 1956 ; « Influence des conditions de vie et de travail sur la santé », Les Cahiers Rationalistes, n° 170, mars 1958. — « Le développement de la tuberculose en France depuis l’occupation allemande », rapport présenté au CD du FN des Médecins, février 1944. — « La lutte antituberculeuse doit être reprise d’urgence en France libérée », rapport présenté au CD du FN des Médecins, 15 septembre 1944. — « Les responsabilités du médecin - leur sens à notre époque », intervention prévue pour le Ve congrès de l’AMIEV et lue par un confrère à cette réunion (6-9 avril 1971)

SOURCES : Arch. Nat., Hector Descomps, témoignage (AN 72 AJ 80). — Bibliothèque nationale, Le Médecin Français, édition clandestine. — Arch. du musée de la Résistance nationale, Presse clandestine, Fonds Isabelle Leibovici, Fonds Lucien Bonnafé. — Archives privées (Sylvie Descomps), livres de comptes, diplômes, certificats, attestations et bordereaux d’envois divers, écrits personnels divers, notes et rapports, tirés à part, correspondance et dédicaces, papiers personnels (cartes d’identité, passeport, etc), carnets de Joé Descomps, presse (Le Médecin Français). - Témoignages : Sylvie Descomps, 1er semestre 1999, Pierre Descomps, 1er semestre 1999, Isabelle Leibovici, 1989 et 1er semestre 1999, Lucien Bonnafé, 1er semestre 1999. — Jean Bernard, Mon beau navire, Éditions Buchet-Castel, 1980. — Pierre Dalloz, Vérités sur le drame du Vercors, Éditions Lanore, 1979. — Robert Debré, L’honneur de vivre, Hermann et Stock, 1974. — Jacques Debû-Bridel, La Résistance intellectuelle, Julliard, 1970. — Jacques Decourt, Un sentier dans le siècle, La Pensée Universelle, 1985. — Pierre Durand, Joseph et les hommes de Londres, Le Temps des Cerises, 1994. — Yves Farge, Rebelles, soldats et citoyens, Grasset, 1946. — Ania Francos, Il était des femmes dans la Résistance, Stock, 1978. — Fernand Grenier, C’était ainsi, Éditions sociales, 1978 (8e édition). — Jean Jérome, La Part des hommes, Acropole, 1983. — Jean Jérome, Les clandestins 1940-1944, Acropole, 1986. — Docteur Malleray, d’un secteur du CMD, compte d’auteur, Paris, 1945. — Robert Merle d’Aubigné, Une trace, La Table Ronde, 1987. — Paul Milliez, Médecin de la liberté, Seuil, 1980. — Adrienne Monnier, Rude de l’Odéon, Alnin Michel, 1960. — Marc Nédélec, Essai sur la réforme de la médecine, Julliard, 1er trimestre 1944. — Colonel Rémy, Mémoires d’un agent secret de la France Libre (juin 1940-juin 1942), Raoul Solar, 1946. — Colonel Rémy, Le Livre du Courage et de la peur (juin 1942-novembre 1943), Raoul Solar, 1946. — Charles Tillon, On chantait rouge, Laffont, 1977. — Charles Tillon, Les FTP, soldats sans uniforme, Edilarge SA-Éditions Ouest-France, Rennes, 1991 (1re édition : 1962). — Pierre Vellay, Un homme libre, Grasset, 1985. — Pierre Villon, Résistant de la première heure, Messidor, 1983.

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