DESTOUCHES Gilbert, Jean

Par Michèle Rault

Né le 10 janvier 1909 à Paris (Ve arr.), mort le 5 avril 2005 au Kremlin-Bicêtre (Val-de-Marne) ; stéréotypeur-galvanoplaste ; syndicaliste CGTU ; militant communiste ; volontaire en Espagne républicaine ; résistant, membre du Front national ; conseiller municipal (1959-1977) et adjoint au maire (1969-1974) d’Ivry-sur-Seine (Seine, Val-de-Marne).

Gilbert Destouches en 1965
Gilbert Destouches en 1965
[Arch. com d’Ivry-sur-Seine]

Gilbert Destouches, aîné de quatre enfants, appartenait à une famille venue de province en région parisienne pour trouver du travail et qui s’était installée à Sèvres (Seine-et-Oise, Hauts-de-Seine). Sa mère travailla dans un restaurant puis dans une fabrique de conserves. Son père, ouvrier de la métallurgie, fut gazé pendant la Première Guerre mondiale et mourut des suites de ses blessures en 1929. Gilbert Destouches passa toute son enfance à Sèvres et fréquenta l’école communale jusqu’à l’âge de treize ans. Puis il décida de faire l’apprentissage d’un métier : il apprit celui de stéréotypeur-galvanoplaste à l’imprimerie de Vaugirard dans le XVe arrondissement de Paris.

À l’âge de vingt ans, Gilbert Destouches, formé à la lutte syndicale par un militant du Secours rouge international, adhéra à la CGTU. Il travailla dans différentes entreprises parisiennes avant d’être embauché en 1932 à l’Imprimerie nationale où il développa son activité militante. Dans cette entreprise, il constitua un comité du mouvement Amsterdam-Pleyel contre la guerre et le fascisme. Il partageait les positions anti-fascistes du Parti communiste français dont il rejoignit les rangs à partir de 1935. Il devint secrétaire adjoint de la cellule de l’Imprimerie et milita à la section du XVe arrondissement où il eut d’importantes responsabilités. En 1936, avec ses camarades de travail en grève, il aida les ouvriers des usines voisines et notamment ceux de chez Citroën au quai de Javel. Il suivit les cours de l’Université ouvrière à la Maison des syndicats de Paris.

En novembre 1936, Gilbert Destouches décida de s’engager dans les Brigades internationales : « Ma mère était veuve, mon père était décédé alors que j’avais une vingtaine d’années, des suites de la guerre 14-18. Donc j’avais déjà une volonté de lutter contre la guerre. [...] J’ai pris la décision avec des camarades antifascistes du livre, après discussions. On a dit il faut aller aider les Républicains, c’est normal parce que si le Front populaire est écrasé en Espagne, notre tour viendra après », témoigna-t-il. Le 18 novembre 1936, il partit d’Ivry avec plusieurs centaines de volontaires pour l’Espagne républicaine réunis au patronage municipal. Au passage de la frontière, il avait pour nom d’emprunt Théophilo Lunas. Il rejoignit à Albacete la garde de l’État-major puis fit l’école des Brigades. Au mois de février l937, aspirant au 10e Bataillon Henri Vuillemin de la 13e Brigade (Dombrowski) puis commandant de compagnie, il participa aux combats du front de Grenade, puis en avril sur celui de Cordoue et enfin, en juillet, à Brunete. Il fut blessé à la tête à Romanillos (front de Brunete) et conserva toute sa vie des éclats dans la nuque. Opéré d’abord en Espagne à l’hôpital anglais de Huete, un bras paralysé, il dut être rapatrié par l’intermédiaire de l’ambassade de France et soigné, à l’hôpital de la Pitié de Paris, pendant près d’un an. Il participa alors aux réunions du comité d’aide à l’Espagne républicaine du XVe arrondissement et écrivit des articles dans la presse locale sur ce qu’il avait vécu en Espagne.

Fin 1938, sans travail, il accepta à la demande de Jacques Duclos de se charger de l’impression des documents du comité central du Parti communiste français jusqu’à sa mobilisation en septembre 1939 à Nancy. Démobilisé en août 1940, il reprit contact avec des militants communistes de Sèvres. Il participa à la formation des Comités populaires chargés du ravitaillement et accompagna une délégation de femmes à la kommandantur de Saint-Cloud pour y réclamer une plus juste répartition de la nourriture. Clandestinement, alors qu’il travaillait dans une usine de lessive, il assura en papier la presse clandestine, diffusa des tracts et se chargea de ravitailler ses camarades illégaux. Arrêté en novembre 1940 par la police française, Gilbert Destouches fut interné à Aincourt (Val-d’Oise), puis à Compiègne (Oise) jusqu’à sa libération en avril 1942. De retour à Sèvres, il tenta de reprendre contact avec des communistes et de trouver du travail. Ayant compris qu’il était dangereux de rester en région parisienne, il décida de partir dans l’Yonne, travailla chez un vigneron puis dans une fromagerie comme aide maçon. Par l’intermédiaire de républicains espagnols réfugiés dans la région, il reprit contact avec le Parti communiste et se vit confier la responsabilité du mouvement de résistance Front national à Flogny (Yonne) en 1943 puis en Côte-d’Or en juillet 1944 jusqu’à la libération de Dijon. Il fut alors désigné membre puis vice-président du Comité départemental de Libération de la Côte-d’Or en septembre 1944.

De retour à Paris, Gilbert Destouches rejoignit la direction nationale du Front national. Il y fut secrétaire à l’Éducation sous la direction de Roger Garaudy. Il participa à de nombreux meetings et congrès du Front national qu’il représenta comme juré ou assistant juré à plusieurs procès et notamment au procès Pétain. En septembre 1945, il reprit ses activités professionnelles, toujours à la demande de Jacques Duclos, au secteur propagande du comité central du Parti communiste où il resta jusqu’en 1969. Il vint habiter Ivry en 1954, fut secrétaire de la cellule du quartier Mirabeau et y anima un comité de Paix qui diffusait un journal, L’Espoir. Membre de l’AVER (Association des volontaires en Espagne républicaine), il devait être secrétaire général du CISE (Centre d’information et de solidarité à l’Espagne) qui organisa des manifestations de solidarité en faveur de Julian Grimau (communiste espagnol condamné à mort en 1963) et des emprisonnés de Burgos (1970). Élu conseiller municipal en 1959 sur la liste de Georges Marrane, il fut reconduit en 1965 puis en 1971 et siégea en tant qu’adjoint au maire de 1969 à 1974. Déchargé de son mandat municipal en 1977, il créa l’ARILS (Association des retraités d’Ivry pour les loisirs et la solidarité).

Marié en 1946, père de deux enfants, Gilbert Destouches, victime d’un accident de la circulation en 2002, mourut le 5 avril 2005 au Kremlin-Bicêtre (Val-de-Marne).

Il fut reconnu comme membre de la résistance intérieure française (RIF) et du mouvement Front national. Les archives du Service historique de la Défense de Vincennes possèdent des éléments le concernant sur ce sujet.

Pour citer cet article :
https://maitron.fr/spip.php?article22566, notice DESTOUCHES Gilbert, Jean par Michèle Rault, version mise en ligne le 25 octobre 2008, dernière modification le 14 mars 2022.

Par Michèle Rault

Gilbert Destouches en 1965
Gilbert Destouches en 1965
[Arch. com d’Ivry-sur-Seine]

SOURCES : SHD Vincennes, GR 16 P 181173 (nc). — Gilbert Destouches, militant communiste, témoignage recueilli et annoté par André Destouches, 1998. — Arch. com. Ivry-sur-Seine. — Témoignage de Gilbert Destouches, 1995. — Rémi Skoutelsky, L’espoir guidait leurs pas. Les volontaires français dans les Brigades internationales, 1936-1939, Grasset, 1998. — Notes de Renaud Poulain-Argiolas.

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