ROUCH Cyprien [Jean, Cyprien]

Par André Balent

Né le 4 août 1886 à Ventenac (Ariège), mort le 12 juin 1944 au Merviel (Ariège) ; cultivateur à Ventenac puis limonadier cafetier au Merviel ; résistant ; exécuté sommairement

Jean, Cyprien Rouch (1886-1944)
Arch. dép. Ariège, 64 J 23, fonds Clade Delpla

Cyprien Rouch était l’enfant naturel de Marie Rouch, sans profession âgée de 26 ans. Elle vivait avec sa mère dans leur maison du hameau de la Malevieille, dans la commune de Ventenac. Sa mère le reconnut le 16 août 1886. Cyprien Rouch vécut donc avec sa mère et sa grand-mère.

La commune de Ventenac est située dans la partie supérieure de la vallée du Crieu, affluent de la rive droite de l’Ariège. Elle est séparée de la vallée du Douctouyre, par le col de la Chioulade dans le massif pré-pyrénéen du Plantaurel. D’abord cultivateur à Ventenac, il se maria avec une native du Merviel, commune de la vallée du Douctouyre. Le15 septembre 1905, il épousa Élodie, Imma Durand née le 25 février 1887 au Merviel (commune rattachée à celle de Dun en 1973). Celle-ci était la fille de Lucien, un marin de quarante-quatre ans originaire de la commune maritime de Gruissan (Aude) et de Joséphine Maurat, son épouse, âgée de vingt-cinq ans demeurant chez ses parents au Merviel. Joséphine, décédée à Dun le 25 janvier 1982, survécut à son mari. Le couple et quatre filles : Eugénie, née 1909 ; Suzanne, née en 1919 ;Lucienne, née en 1925 ; Éliette, née en 1928. Peu après son mariage, Cyprien Rouch devint limonadier au Merviel, profession qui était toujours la sienne en 1944. À noter cependant, que, lors du recensement de la population de 1936, la profession notés sur la fiche était celle de propriétaire exploitant. En 1936, un domestique, Jean Malecamp né en 1862, vivait avec la famille Rouch.

Au conseil de révision, il avait un « degré d’instruction générale 3 », c’est à dire qu’il possédait une « instruction primaire plus développée » (avait-il commencé , sans l’achever, un cursus dans une école primaire supérieure après avoir obtenu le certificat d’études primaire ?). Le conseil de révision détecta chez lui un état de « faiblesse » et le classa comme soutien de famille. Cyprien Rouch effectua son service militaire au 59e régiment d’Infanterie (RI) encaserné à Foix et à Pamiers. Incorporé le 8 octobre 1908, il réintégra la vie civile le 25 septembre 1910.

Mobilisé le 1er août 1914, il rejoint le 4 son corps d’affectation, le 59e RI. Mais il ne rejoignit le front que le 31 décembre 1914 lorsqu’il fut affecté au 14e bataillon de Chasseurs à pied (BCP) alors positionné en Alsace dans le massif des Vosges. Il fut blessé le 8 février 1915 au pouce droit. Il le fut à nouveau le 5 août 1915 pendant la bataille du Linge, dans les Vosges (20 juillet-16 octobre 1915). Une balle provoqua des « plaies multiples de la face » et un corps étranger pénétra dans on œil gauche. Le 6 septembre 1915, il fut cité à l’ordre du bataillon : « a rempli son devoir avec calme et dévouement sous le bombardement ». Il reçut la Croix de guerre avec étoile de bronze. Le 26 novembre 1915, il fut muté à la 14e section d’infirmiers militaires mais, convalescent, il resta à l’arrière jusqu’au 24 janvier 1916. Il revint ensuite au front.
Il passa devant une commission de réforme à Soissons (Aine) le 9 septembre 1917 car il souffrait des séquelles de ses blessures de 1915 : ankylose du pouce droit et acuité de l’œil gauche diminuée. Mais il fut maintenu dans le service armé. Il en fut de même lors de son passage devant la commission de réforme de Toulouse, le 20 octobre 1919. Celle-ci proposa qu’il bénéficiât d’une pension d’invalidité de 10 %. Mais, à cette date, il était déjà retourné à la vie civile. La pension ne lui fut pas encore accordée lors d’un nouveau passage devant la commission de réforme de Toulouse le 22 février 1922 ; elle renouvela sa proposition de pension à 10 %.
Entre temps, Cyprien Rouch continua de participer à la guerre. Alors qu’il était passé à la réserve, il se trouva à nouveau dans un secteur difficile lorsqu’il se trouva à Montigny-sur-Vesle (Marne) à partir du 9 mars 1918. Dans ce village était implanté un l’hôpital d’orientation et d évacuation (HOE) n° 15 auquel Cyprien Rouch fut affecté du 6 mas au 26 avril 1918. Lors de leur offensive du printemps 1918, les Allemands occupèrent dce village et Cyprien Rouch se retrouva, toujours dans cette bataille au HOE de Tramony ( ?). Le 14 juin 1918 il passa à la 11e section d’infirmiers militaires au quartier général de la 6e armée dans le 22e GBD (groupement de brancardiers divisionnaires). Il passa à l’hôpital temporaire de Longwy le 11 mars 1919 avant d’être démobilisé à Toulouse le 13 mars 1919 au dépôt de la 17e section d’infirmiers militaires. Le 13 novembre 1931, il reçut la médaille militaire.

Cyprien Rouch n’a pas été mobilisé en 1939. En 1943-44, il était en contact avec la Résistance et, sans doute membre d’une de ses organisations. Il accueillait dans son café les maquisards (FTPF ou AGE : Agrupación de guerrilleros españoles) présents sur le territoire du Merviel. Les maquisards de l’AGE étaient installés dans une ferme camouflée par les bois, le Couderc. Ils fréquentaient aussi une cabane, dans le bois de Cénant, propriété de la famille de Noël Rescanières qui avait, pour sa part rejoint les FTPF, comme beaucoup de jeunes du village et des autres localités de la vallée. Plus tard, ils s’établirent dans la ferme de Cénant. Des Juifs trouvèrent refuge dans des familles paysannes au Merviel et d’autres villages du secteur. Lorsque , le 9 juin, les Allemands occupèrent momentanément Vira, l’officier qui commandait le détachement allemand dit au curé du village, devant témoins, que Le Merviel était « un centre de terroristes ». Il cita nommément, parmi les résistants du village, « le maire, M. Bosc ; l’institutrice, Mlle Serres ; le cafetier, M. Rouch » (Delpla, op. cit., 2019, p. 69). Il était bien informé car Camille Rouch (qui n’avait de lien de parenté avec Cyprien), fils d’un paysan du village était affilié à la Milice et était depuis peu agent de la Sipo-SD. Un groupe de miliciens, parmi lesquels Camille Rouch, vint camper à proximité du Merviel les 10 et 11 juin (le 11 juin, les Allemands détruisirent, dans le voisinage, le moulin d’Embayourt, dans la commune d’Engraviès, où état établi l’état-major de la 1er compagnie des FTPF de l’Ariège et propriété d’Aimé Gos, un des chefs de cette formation armée).

Le 13 juin 1944, trois cents Allemands et miliciens arrivèrent de Foix par le col de Saint-Cristaut, un des hameaux de la commune. Commandés par Walter Buchman, un Sarrois, et Walter Gross [ou Grossle] (qui avait assassiné le 14 décembre 1943 le résistant ariégeois des Mouvements unis de la Résistance et de l’Armée secrète Irénée Cros), ils encerclèrent Le Merviel et pénétrèrent dans le village. Ils se dirigèrent vers le café de Cyprien Rouch qu’ils tabassèrent. Après avoir pillé sa maison, ils l’enfermèrent dans une pièce et incendièrent la maison qui communiqua le feu à la maison mitoyenne. Cyprien Rouch mourut brûlé vif. D’autres maisons furent incendiées. Théophile Charry également recherché fut assassiné. D’autres maisons du village et du hameau de Sainte-Croix furent aussi incendiées. Des habitants du Merviel furent conduits à Foix et furent relâchés, sauf l’un d’entre eux, de nationalité andorrane, Antoine Pons (né le 24 septembre à Blagnac, Haute-Garonne) qui fut déporté à Dachau (convoi parti de Toulouse le 3 juillet 1944 et arrivé au camp le 28 août1944. Transféré à Mauthausen, il mourut le 29 novembre 1944 à Melk (Autriche), camp annexe de Mauthausen.

Le nom de Cyprien Rouch figure sur le monument commémoratif de Vira érigé à l’intersection des routes départementales 12 et 48 érigé à la mémoire des morts « de la résistance et victimes du nazisme de la vallée du Douctouyre » (17 noms dont 8 pour les seules victimes des Allemands le 9 juin 1944). Il fut homologué membre des FFI (Forces françaises de l’intérieur. Il y a un dossier à son nom, au Service historique de la Défense, à Vincennes, non consulté, cote 16 P 512946.

Pour citer cet article :
https://maitron.fr/spip.php?article226548, notice ROUCH Cyprien [Jean, Cyprien] par André Balent, version mise en ligne le 23 avril 2020, dernière modification le 20 février 2022.

Par André Balent

Jean, Cyprien Rouch (1886-1944)
Arch. dép. Ariège, 64 J 23, fonds Clade Delpla

SOURCES : Arch. dép. Ariège, 64 J 23, fonds Claude Delpla ; 4 E 4137, état civil de Ventenac, acte de naissance de Jean, Cyprien Rouch ; 4 E 2320, état civil du Merviel, acte de mariage entre Cyprien Rouch et Élodie Durand ; 10 M 4/20, recensement fr la population, 1936, Le Merviel ; 129 33, f° 714, registre matricule du recrutement militaire de Jean, Cyprien Rouch. — Claude Delpla, La Libération de l’Ariège, Toulouse, le Pas d’Oiseau, 2019, 514 p. [pp. 62-64 ]. — Olivier Nadouce, L’Ariège, terre de résistance. La bataille de Vira Saint-Cyr-sur-Loire, Alan Sutton, 2008, 157 p. [. pp. 69-71]. Ce livre rassemble un grand nombres de témoignages d’acteurs du combat de Vira ou ayant assisté à des phases de celui-ci. Olivier Nadouce les a recueillis et mis en forme. — Site MemorialGenWeb consulté le 23 avril 2020. — Site Mémoire des hommes consulté le 23 avril 2020.

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