DE ZANGRONIZ Georges, Joseph

Par Madeleine Singer

Né le 29 mars 1910 à Bordeaux (Gironde), mort le 1er octobre 1980 à Floirac (Gironde) ; agrégé de lettres classiques ; membre du comité national du SGEN (1948-1962).

Georges de Zangroniz avait seize mois lorsqu’il perdit sa mère, née Marthe Rocharrière, qui était la fille d’un médecin de Bordeaux. Lui-même était le fils aîné de Joseph de Zangroniz, bibliothécaire-archiviste de la ville de Pau, qui eut une fille d’un deuxième mariage, treize ans plus tard. L’enfance fut marquée par des deuils : sa soeur et plusieurs autres membres de sa famille moururent noyés à Mimizan.
G. de Zangroniz fit de brillantes études au lycée de Pau, puis au lycée Montaigne à Bordeaux. D’abord étudiant à la faculté des lettres de cette ville, il prépara l’agrégation à la Fondation Thiers à Paris et fit connaissance de Senghor. Il fit alors partie des Équipes sociales à Arcueil. Reçu troisième à l’agrégation de lettres classiques en 1934, l’année où Georges Pompidou fut le premier, il envisagea une thèse sur André Mauriac. Il enseigna d’abord au lycée de Pau, puis fut muté en 1948 au lycée Montaigne à Bordeaux. Il termina sa carrière comme professeur à la faculté des lettres de cette ville, université Bordeaux III, devenu Bordeaux Montaigne. Il avait épousé en 1941 Guillemette de Cours Saint-Gervasy à Clermont (Gers)dont il eut sept enfants.
Sa femme déclare qu’au lycée de Pau, il était déjà militant SGEN. En effet, présent au congrès de 1947 d’après École et éducation, il fit partie de la délégation qui, au cours du congrès de mars 1948, se rendit en audience chez M. Biondi, secrétaire d’État à la Fonction publique. P. Vignaux* avait voulu associer à cette démarche deux représentants des académies (l’autre était Madeleine Singer, de Lille) car à cette époque les syndicats du Second degré et de l’Enseignement technique réclamaient la suppression du cadre supérieur auquel on n’accédait que par choix.
Élu au comité national lors du congrès de mars 1948, G. de Zangroniz devint l’année suivante secrétaire académique de Bordeaux. Pendant treize ans, il se dépensa sans compter. Dans une lettre écrite trente ans plus tard, Henri Bouygard* qui avait été nommé en 1950 au lycée de Talence en qualité de surveillant, se souvient de ce secrétaire académique par lequel leur équipe de surveillants était « parfaitement soutenue », alors que « rien pourtant n’avait préparé ce dernier à comprendre (leurs) mentalités, si différentes de celles des universitaires catholiques de l’époque ». Effectivement au congrès SGEN de 1947, G. de Zangroniz s’était montré très réticent devant la critique des solutions « pluralistes », c’est-à-dire des subventions à l’enseignement privé.
Il avait en effet des origines familiales conservatrices, peut-être monarchistes. Mais très intelligent, érudit, ayant beaucoup de finesse littéraire, il avait une grande capacité d’évolution. Il devint un des soutiens les plus fermes de la politique menée en matière scolaire par le bureau national. Lorsqu’au comité national du 25 juin 1949, P. Vignaux indiqua que la question des subventions avait failli se poser au congrès confédéral et qu’elle pourrait y revenir, G. de Zangroniz déclara : « Si la CFTC prend position sur les subventions, notre place n’y est plus. » Le comité national renouvela alors le mandat donné aux responsables nationaux du SGEN « de faire écarter des débats de tous les organismes interprofessionnels de la CFTC le problème de l’attribution de fonds publics à l’enseignement privé », texte qui fut seulement publié dans la note ronéotypée du 8 juillet, afin de ne pas constituer une sorte de chantage à l’égard de la Confédération. On comprend qu’au congrès de 1955, H. Bouygard, devenu secrétaire national des surveillants, ait pu rendre hommage à l’action de G. de Zangroniz car « l’essor des catégories jeunes au SGEN date de 1951, c’est-à-dire du moment où les positions laïques du SGEN ont été bien connues » par les critiques du Syndicat à l’égard des lois Marie et Barangé. Ce congrès de 1955 devait juger la grève du 23 mars contre le projet Saint-Cyr qui proposait de subventionner l’enseignement agricole privé : la grève fut massivement approuvée (10,5 % d’opposants). « Venant remplir un mandat qu’il lui coûte de remplir », G. de Zangroniz exposa "les raisons - qu’il ne fait pas siennes - des adversaires de la grève dans son académie" et conclut : « Personnellement j’estime que cette grève a été bonne en raison même du rôle essentiel qu’a le SGEN quand il s’agit de faire interpréter correctement la laïcité de l’enseignement public. »
Lorsqu’on lit les comptes rendus des comités nationaux et des congrès auxquels il participait toujours activement, on constate qu’il prenait en charge l’ensemble des problèmes. Continuant à suivre la question laïque, notamment en 1959 au moment de la loi Debré, il se montrait sur les problèmes revendicatifs à la fois énergique et réaliste. S’indignant par exemple en 1955 de ce que la prime accordée aux enseignants ne fut pas aussi élevée que celle des magistrats, il était partisan de la grève, notamment pour des objectifs limités qui pouvaient être atteints. Mais il souhaitait qu’on ne mette pas en difficulté par des consignes trop rigides les instituteurs isolés, dès lors que le SGEN était le seul syndicat de l’Éducation nationale à donner l’ordre de grève. Cette action revendicative devait être à ses yeux à la fois corporative et politique : il demandait en 1951 que la CFTC présentât un programme législatif aux candidats et fit connaître leurs réponses. Aussi soutint-il avec énergie la défense des libertés menées par le bureau national du SGEN pendant la guerre d’Algérie, notamment en 1958, car il avait parfaitement épousé les thèses du SGEN sur la décolonisation. Quant à sa participation aux nombreuses discussions sur la réforme de l’enseignement, il faudrait pour l’évoquer, pouvoir rappeler les projets et contre-projets qui fleurirent tout au long de ces années.
Secrétaire académique, G. de Zangroniz se préoccupait de toutes les catégories, pas seulement des instituteurs et des surveillants dont nous avons déjà parlé. Certes il s’élevait contre l’emploi des maîtres d’internat pour la surveillance des épreuves écrites du baccalauréat. Mais il réclamait en même temps, pour tous les candidats à l’agrégation, des « congés décents » avant les épreuves. Il demandait qu’on attribuât aux licenciés figurant sur le « plan de liquidation », des postes aussi nombreux que ceux qui étaient réservés aux inscrits du CAPES, notamment grâce à la transformation en postes des heures supplémentaires très nombreuses dans son académie. Il rappelait à cette occasion la motion SGEN qui tendait à modifier le CAPES en un concours de classement afin d’accroître le nombre des élus. Cela ne l’empêchait pas de soutenir les revendications des titulaires du CAEC (certificat d’aptitude à l’enseignement dans les collèges) qui était en fait une petite agrégation : ceux-ci réclamaient donc des mesures compensatoires (bonification d’ancienneté par exemple). Bref il voulait que personne ne fut lésé. C’est pourquoi il suivait de près le fonctionnement des Commissions administratives paritaires académiques : il réclamait la réception des convocations suffisamment à l’avance ainsi que la documentation relative aux promotions ; il s’élevait contre la non-péréquation à cette époque des notes administratives, contre l’absence d’instruction sur la façon de noter, tout en demandant avec son congrès académique la suppression de la note chiffrée.
On comprend qu’en 1962 il ait jugé bon de laisser sa place de secrétaire académique et de membre du comité national à un militant, Pierre Bianchi, qui depuis longtemps était son suppléant dans cet organisme ainsi que le trésorier de l’académie ; ce dernier est d’ailleurs décédé depuis de longues années. Mais G. Zangroniz ne se désintéressait pas pour autant du Syndicat, car on le retrouve tête de liste des agrégés que le SGEN présenta, le 16 mars 1966, lors des élections au Conseil de l’enseignement général et technique. Ses qualités intellectuelles lui conféraient un prestige considérable aux yeux des jeunes du SGEN de Bordeaux qui formaient l’essentiel de ses « troupes », prestige qui impressionnait aussi l’administration rectorale de l’époque. Il était officier de l’Instruction publique.
Il subit une attaque d’hémiplégie et dût arr^téer sa carrière et ses activités.

Pour citer cet article :
https://maitron.fr/spip.php?article22664, notice DE ZANGRONIZ Georges, Joseph par Madeleine Singer, version mise en ligne le 25 octobre 2008, dernière modification le 19 février 2017.

Par Madeleine Singer

SOURCES : M. Singer, Histoire du SGEN, PUL, 1987. — École et Éducation (1947-1955). — Syndicalisme universitaire (1955-1966). — Lettres de Madame de Zangroniz à M. Singer, 20 mars 1995, 3 mars 1996. — Témoignage de H. Bouygard dans ses lettres à M. Singer, 9 février 1979, 20 janvier 1997 (Arch. privées). — Notes de Karin Etcheverria, une de ses petites-filles.

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