DI FUSCO Joseph [dit Albert]

Par Daniel Grason

Né le 8 septembre 1906 à Marseille (Bouches-du-Rhône), fusillé comme otage le 15 décembre 1941 à Caen (Calvados) ; cantonnier à la Ville de Paris ; militant communiste ; résistant.

Joseph Di Fusco
Joseph Di Fusco
Collection Jean Quellien

Fils de Cosmo et de Maria, née Di Macco, Joseph Di Fusco était marié et eut un enfant en 1936. La famille demeurait à Marseille. Il adhéra et milita de 1936 à 1938, puis fut mobilisé de décembre 1939 à juillet 1940 dans un régiment colonial à Toulon (Var). Le 23 mai 1940, il comparut devant le 2e tribunal militaire à Marseille, fut condamné à trois ans de prison pour « outrages à supérieur ». La peine fut-elle amnistiée ? Il quitta la ville.
À leur départ de Marseille, la famille habita au 127 rue Saint-Charles à Paris (XVe arr.), puis au 24 rue de l’Église dans le même arrondissement, sa femme était la concierge de l’immeuble. Il demeurait dans le même immeuble que Jean Morvan, également militant communiste. Cantonnier à la Ville de Paris dans le XVIe arrondissement, il était apprécié pour son sérieux et sa ponctualité, ses chefs l’estimaient.
Il prit une part active à la diffusion de la propagande du Parti communiste dans le XVe arrondissement de Paris, était responsable d’un secteur de trois groupes de diffuseurs de la propagande clandestine. Le 22 juin 1941 les troupes nazies envahirent l’Union soviétique, et la police française remarqua une recrudescence de la propagande clandestine.
Des policiers des Renseignements généraux interpelèrent Émile Billot le 18 juillet 1941. Jean Morvan fut appréhendé le même jour ainsi que François Langouët et Georges Jensen, chargés de la diffusion des tracts dans d’autres secteurs, et Joseph Di Fusco le 19 juillet. Interrogé dans les locaux des Brigades spéciales, il déclara qu’il ne militait plus depuis l’interdiction de septembre 1939. Un carnet de souscription au profit du Comité populaire des chômeurs du XVe arrondissement fut saisi à son domicile et il affirma : « Ce carnet est ancien. » Un autre carnet trouvé sur lui portait des indications manuscrites sur l’activité de l’organisation. Il rétorqua qu’il l’avait trouvé un mois plus tôt dans une rue. « Pourquoi l’avez-vous gardé ? » demanda un inspecteur. « Parce que ce carnet avait encore des pages vierges », répliqua-t-il.
Devant le Juge d’instruction, le 14 août 1941 Fosco Di Fusco reconnut qu’il continua à militer au Parti communiste jusqu’en décembre 1940. Il précisa qu’il s’occupait du matériel et des cotisations. Dans son réquisitoire définitif en date du 26 août 1941, le Procureur général relevait que « Di Fusco avait « commencé à nier toute activité communiste récente » en faisant observer « que les documents découverts à son domicile étaient « des documents anciens antérieurs à la dissolution du parti. »
Le 28 août 1942 le Procureur général estimait « qu’en raison de la gravité des faits, il y a lieu d’intenter contre le nommé Di Fusco Joseph une action en déchéance de nationalité. »
Tous comparurent le 24 septembre 1941 devant la Section spéciale de la cour d’appel de Paris. Le tribunal apprécia que la « détention de documents [à son domicile] établissait sa participation à la propagande clandestine ». Joseph Di Fusco fut condamné à vingt ans de travaux forcés et son transfert à la centrale de Caen s’effectua à une date inconnue. Le 25 septembre, sous le titre « La répression de la propagande communiste », le quotidien collaborationniste Le Matin annonça le verdict. Le 1er octobre, il fut envoyé à la centrale de Caen.
En représailles aux attentats des résistants contre les militaires allemands, le 14 décembre 1941, le général Von Stülpnagel fit paraître dans la presse collaborationniste un « Avis » : « Ces dernières semaines, des attentats à la dynamite et au revolver ont à nouveau été commis contre des membres de l’Armée allemande. Ces attentats ont pour auteur des éléments, parfois même jeunes, à la solde des Anglo-Saxons, des Juifs et des Bolcheviks et agissant selon les mots d’ordre infâmes de ceux-ci. Des soldats allemands ont été assassinés dans le dos et blessés. En aucun cas, les assassins ont été arrêtés. »
Le lendemain soixante-dix otages étaient fusillés au Mont-Valérien, neuf à Châteaubriant, trois à Fontevrault-l’Abbaye (Fontevraud, Maine-et-Loire) et treize à Caen, dont Joseph Di Fusco et Lucien Sampaix.
Son nom figure sur le mur commémoratif rue du Capitaine-Guynemer à Caen.
Après la Libération une plaque commémorative fut apposée à l’entrée de l’immeuble où il vécut : « Ici habitaient Morvan Jean 1888-1941 et Di Fusco Albert fusillés par les nazis le 15 décembre 1941. »
Rouge-Midi publia des lettres de Di Fusco à sa famille, particulièrement à sa femme, Lucienne Dufréchou. Il est prénommé tantôt Joseph, tantôt Albert. Il était peut-être de la famille de Di Fusco, qualifié de militant communiste marseillais et secrétaire du syndicat CGT confédéré des Bouches-du-Rhône pour les lithographes, qui appela ceux-ci à la grève pour le 12 février 1934. Les listes électorales de 1939 à Marseille mentionnaient l’inscription d’un Di Fusco Sauveur, Joseph, né à Marseille le 16 juin 1902, navigateur, demeurant 22 rue des Ferrats.
Son nom fut donné à une rue du 7e arrondissement de Marseille par une délibération du 27 juillet 1946.
Sa fille lui a consacré un ouvrage en 2014, avec la publication de ses lettres de juillet à décembre 1941.

Pour citer cet article :
https://maitron.fr/spip.php?article22721, notice DI FUSCO Joseph [dit Albert] par Daniel Grason, version mise en ligne le 25 octobre 2008, dernière modification le 19 juillet 2022.

Par Daniel Grason

Joseph Di Fusco
Joseph Di Fusco
Collection Jean Quellien

OEUVRE : Joseph-Albert di Fusco, Fusillé à Caen en 1941. Lettres d’un otage à sa famille (19 juillet-15 décembre 1941), correspondance réunie par sa fille Claude Llucia di Fusco, L’Harmattan, 2014, 307 p.

SOURCES : AN Z/4/6 dossier 77. – Arch. PPo. 77W 69, 77W 1708, BA 2057. – DAVCC, Caen, B VIII dossier 2 (Notes Thomas Pouty). – Bureau Résistance GR 16 P 185439 (non homologué). – Adrien Blès, Dictionnaire historique des rues de Marseille , Marseille, Éd. Jeanne Laffitte, rééd. 2001. ⎯ Jean Quellien (sous la dir.), Livre mémorial des victimes du nazisme dans le Calvados, op. cit. (Notes Jean-Pierre Besse). – Arch. com. Marseille, listes citées. – Rouge-Midi, 5 septembre et 15 décembre 1944. – Le Petit Provençal, 10 février 1934 (Notes Antoine Olivesi). – Le Matin, 25 septembre 1941. – Site Internet ONAC Caen. – Mémorial GenWeb.

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