DEGUENT Jean.

Par José Gotovitch

Berchem-Sainte-Agathe (pr. Brabant, arr. Bruxelles), 12 janvier 1907 – Ixelles (Région de Bruxelles-Capitale), 28 octobre 1992. Avocat, membre du Secours rouge international, membre du Conseil juridique à Londres, militant communiste, conseiller communal de Bruxelles.

Jean Deguent naît dans une famille bourgeoise dont le père, officier de carrière, meurt au front en 1917. Réfugié en France, il rentre en 1919. Boursier, il entame des études de droit à l’Université libre de Bruxelles (ULB) en 1924, y adhère au Groupe d’études marxistes. Docteur en droit en 1929, et licencié en sciences économiques, il devient stagiaire au cabinet d’Eugène Soudan où exercent également Robert Lejour et Andrée Grandjean. En 1930, il adhère au Secours rouge international (SRI) que dirige Lejour. En 1933, il effectue sous les auspices du SRI un voyage de deux mois en URSS via Batoum (Géorgie). Il est reçu par Elena Stassova, présidente du SRI. Il rentre par Berlin au moment du procès de Leipzig en septembre 1933. Il est initié franc-Maçon, mais ne retiendra de ce passage que de très douloureux souvenirs.

En 1936, au début de la guerre d’Espagne, Jean Deguent adhère comme « sous-marin » au PCB. Il devient secrétaire intermittent de la section juridique du SRI. Il assure la défense des militants devant les tribunaux et participe aux travaux juridiques pour le groupe parlementaire communiste. Il est membre du groupe d’intellectuels communistes, dont font notamment partie Jean Fonteyne, Paul Libois, Maurice Beublet, Robert Lejour et dont Edgar Lalmand assure le « tutorat ». Mais au lendemain du Pacte germano-soviétique de 1939, Deguent démissionne du PCB car il n’admet pas le changement brutal et l’absence d’explications. Son adhésion n’ayant pas été publique, son départ demeure inconnu d’autant que publiquement, il défend l’URSS, le pacte comme la guerre russo-finlandaise !

Mobilisé de janvier à mars 1940, Jean Deguent part en mai en France, à moto, avec Robert Lejour qui regagne la Belgique après la capitulation. Il descend dans le Midi et rencontre à Bayonne (département des Pyrénées-Atlantiques) Isabelle Blume, Camille Huysmans, Max Buset et son propre beau-frère, Georges Housiaux. Il s’embarque avec eux le 25 juin pour la Grande-Bretagne. Il débarque sans le sou et doit être pris en charge par l’assistance publique anglaise ! Mais ses compétences trouvent à s’employer rapidement.
Nommé conseiller juridique auprès de la mission économique de René Boël, Deguent est bientôt conseiller d’administration attaché au Cabinet des Affaires économiques. Il est nommé membre du Conseil juridique le 25 janvier 1941 et plaide devant le Conseil de Guerre. Il assure enfin le secrétariat de la Commission d’études pour les problèmes d’après-guerre (CEPAG). Le 16 août 1941, il épouse Marthe Huysmans, fille de Camille. À Londres, au contact du milieu très agité et souvent peu glorieux de l’émigration belge, Jean Deguent est témoin des intrigues internes, des jeux d’influence des hommes d’affaires et banquiers, de la légèreté, le « verbalisme » et la « suffisance » des milieux politiques socialistes. Ces « découvertes », mais aussi le rôle joué par l’URSS dans la guerre le convainquent d’avoir commis une erreur grave en quittant le PC en 1939 (Extraits de sa biographie et sa demande de réintégration, rédigée à Londres, le 25 septembre 1944). Ce sentiment sera renforcé par les informations, apportées à Londres par Albert Marteaux, sur l’action du Parti dans la clandestinité et par leur cohabitation fortuite avec l’épouse de Fernand Grenier et le couple Waldecq-Rochet, délégués par le Parti communiste français (PCF) dans la capitale britannique. Le couple qu’il forme avec Marthe Huysmans est tenu à l’écart de la « bonne société » londonienne en raison de leurs positions jugées trop rouges. Il participe à l’essai de constitution d’un Front de libération à l’image du Front de l’indépendance (FI), et édite le seul numéro paru d’un bulletin de ce mouvement, torpillé par le gouvernement.

Dès son retour en Belgique, Jean Deguent demande et obtient sa réintégration au PCB. En février 1945, il devient secrétaire du cabinet d’Edgar Lalmand, ministre du Ravitaillement. En octobre 1946, il relance son cabinet d’avocat. Il se présente à la cinquième place sur la liste communiste à Bruxelles lors des élections communales. Il est élu conseiller communal à Bruxelles.

Avocat plaidant dans certains procès politiques ou sociaux, Jean Deguent n’occupe plus le terrain strictement politique. Trésorier de l’Association internationale des Juristes démocrates, il est membre du bureau de l’association. En 1963, membre actif de la section d’Uccle du PCB, il rejoint les positions de Jacques Grippa* mais s’éloigne du parti à nouveau sans bruit et sans devenir actif dans la formation prochinoise que ce dernier va lancer et piloter.

Pour citer cet article :
https://maitron.fr/spip.php?article227333, notice DEGUENT Jean. par José Gotovitch, version mise en ligne le 8 mai 2020, dernière modification le 8 mai 2020.

Par José Gotovitch

SOURCES : Interview de Jean Deguent réalisée le 9 novembre 1981 – CArCoB, dossier CCP – BALTHAZAR H., GOTOVITCH J., Camille Huysmans in Londen, Anvers, 1978.

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