DREYER Élisabeth née RADUO alias COBI

Par Daniel Grason

Née le 23 décembre 1908 à Nice (Alpes-Maritimes), morte le 29 février 2000 à Paris (XIIIe arr.) ; sténodactylo ; résistante ; déportée à Ravensbrück (Allemagne) puis à Mauthausen (Autriche).

Fille de Jean, musicien et d’Elsa Stancoff (selon l’acte de naissance, Sturzinger selon la famille), Élisabeth Raduo ménagère, épousa le 13 juillet 1935 André-Robert Dreyer en mairie de Clichy-la-Garenne (Seine, Hauts-de-Seine). Le couple habita le 18 rue Wurtz à Paris XIIIe arrondissement qu’ils quittèrent pour Nogent-sur-Marne (Seine, Val-de-Marne) où ils vivaient le sous l’identité de Cobi, nom de la tante d’Élisabeth au 26 rue Paul-Bert.
Titulaire du Brevet commercial, Élisabeth Dreyer travailla jusqu’en septembre 1943 à la Compagnie d’assurances La Préservatrice près de la gare Saint-Lazare au 18 rue de Londres à Paris (IXe arr.).
Les Brigades spéciales réalisèrent une vaste opération contre les résistants communistes organisés chez les Francs-tireurs et partisans (FTP), et Francs-tireurs et partisans Main-d’œuvre immigrée (FTP-MOI). Il y eut quatre-vingt- seize arrestations dont celle d’André Robert Dreyer interpellé le 26 novembre 1943 à 18 heures 15 alors qu’il se présentait au 7 rue de l’Étang à Saint-Gratien (Seine-et-Oise, Val-d’Oise). Avant la guerre, il était connu de la police comme membre de l’association touristique populaire, et militant au Parti communiste à Clichy-la-Garenne (Seine, Hauts-de-Seine).
Le 27 novembre 1943 à 14 heures, trois policiers appréhendèrent Élisabeth Dreyer à Nogent-sur-Marne. Son domicile situé au 25 rue Paul-Bert était sous surveillance policière depuis plusieurs jours. Fouillée par une femme policière étaient saisis : Une feuille à en-tête de la compagnie d’assurances La Préservatrice annotée au verso, une feuille à en-tête de la Compagnie Nord Lumière annotée en sténo au verso et une quittance de loyer libellée au nom de mademoiselle Cobi.
Lors de la perquisition des documents se rapportant à l’activité du Parti communiste clandestin furent saisis. Son mari André vivait avec elle, mais se faisait passer auprès du voisinage pour un parent.
Elle fut emmenée dans les locaux de la BS2 pour interrogatoire. Titulaire du Brevet commercial, elle exerça la profession de sténodactylographe à la Compagnie d’Assurances La Préservatrice au 18 rue de Londres près de la gare Saint-Lazare à Paris (IXe arr.). Elle quitta son emploi qui était rémunéré 2 300 francs par mois en janvier 1943.
Lors de son interrogatoire, elle fut confrontée à un roulement de questions : « Quels sont actuellement vos moyens d’existence ? », « Pour quelle raison vous aviez cessé d’habiter vous domicile légal, […] alors que le loyer […] est toujours à votre nom ? »
Elle répondit être venu « habiter Nogent parce que le loyer était moins cher, et pour éviter le voisinage des Établissements Gnome et Rhône qui, à Paris nous gênait. »
« Comment se fait-il que vous habitiez à Nogent sous le nom de mademoiselle Cobi, qui est celui de votre tante ? », « Quelles étaient vos occupations depuis que vous avez cessé de travailler. » Elle répondit rester chez elle et s’occuper du ménage. Concernant son mari elle affirma ignorer son activité, informa n’avoir jamais été membre du Parti communiste, mais avoir « participé cependant à des manifestations et à des défilés. » Elle déclara que son mari ne vivait pas continuellement avec elle, s’absentant de temps à autre huit ou quinze jours.
Élisabeth Dreyer fut emprisonnée, matricule 38064 elle était le 30 mars 1944 dans le convoi de quarante-huit femmes qui partit de Paris à destination de la prison d’Aix-la-Chapelle où elles furent jugées, condamnées, transférées en mai au camp de Ravensbrück en Allemagne, puis Mauthausen en Autriche. Dans ce transport était notamment Lucienne Vermeil, Thérèse Coulon, Hélène et Suzanne Fredin ainsi qu’Armande Roeckel.
Jean Dreyer, fourreur, frère d’André Dreyer témoigna en septembre 1944 devant la commission rogatoire chargée d’enquêter sur les agissements de Robert B… inspecteur de la BS2 des Renseignements généraux. Celui-ci était dans l’équipe d’inspecteurs qui interpellèrent Élisabeth et André Dreyer.
Ce policier était apprécié par les membres de la commission d’épuration de la police comme un « fonctionnaire servile et sans aucune moralité. Ennemi acharné des Français résistants. […] Relève du droit commun, n’hésitant nullement à s’emparer frauduleusement d’objets ou de ravitaillement au domicile des patriotes arrêtés. »
Le frère d’André Dreyer, Robert déclara sur procès-verbal le 28 février 1945 à propos de sa belle-sœur Élisabeth : « Elle a été arrêtée dans la souricière établie à son domicile, le 27 novembre 1943 ».
« Conduite à la Préfecture de police, elle a été giflée par un inspecteur à la suite de son refus de reconnaître qu’elle était israélite, ce qui était inexact. »
« Livrée elle aussi aux Allemands, elle a été internée […] au camp de Romainville, puis déportée en Allemagne. […] Nous n’avons jamais plus reçu de ses nouvelles ».
Il porta plainte contre les policiers qu’il considérait comme « responsables de la mort de son frère [et] de la déportation de sa « belle-sœur, ainsi que contre ceux qui se sont rendus coupables de vols au cours de la perquisition ».
Il informa que « Les policiers ont emporté tout le linge de maison, tous les vêtements et de nombreux objets mobiliers, poste de T.S.F etc. à l’exception des gros meubles intransportables. Des scellés ont été placés sur le logement à l’issue de cette perquisition. »
Le propriétaire de l’appartement également cafetier Ludovic Bernardi déclara que les vols avaient été commis par les inspecteurs qui étaient en surveillance dans le logement. Des femmes quittaient le logement « avec des sacs à provision bourrés d’objets divers. […] Ceci a duré une semaine environ. »
Il témoigna sur procès-verbal le 5 mars 1945 : « Trois policiers ont effectué une perquisition en ma présence. Ces inspecteurs n’ont à ma connaissance, rien emporté d’autres que des papiers divers et des fausses cartes d’identité en assez grand nombre ».
« Le logement a été ensuite occupé par de nombreux autres inspecteurs qui avaient établi une surveillance dans ce local. Ces inspecteurs étaient ravitaillés par des femmes que j’ai pensé être leurs épouses ».
« C’est au cours de cette surveillance que les vols ont été commis. J’ai remarqué que les femmes quittaient le logement avec des sacs à provision bourrés d’objets divers. J’en ai remarqué particulièrement une vêtue d’un manteau de fourrure qui était chargée à l’extrême. Ceci a duré une semaine environ ».
« Ces actes étaient commis le plus discrètement possible, et hommes et femmes s’efforçaient de ne point attirer mon attention sur leur manège ».
« Élisabeth Dreyer rentra de déportation, elle a été homologuée combattante des Forces françaises de l’intérieur (FFI), au titre de la Résistance intérieure française (RIF), et Déportée internée résistante (DIR).
Elle mourut dans sa quatre-vingt onzième année le 29 février 2000 à Paris (XIIIe arr.).

Pour citer cet article :
https://maitron.fr/spip.php?article227581, notice DREYER Élisabeth née RADUO alias COBI par Daniel Grason, version mise en ligne le 24 décembre 2021, dernière modification le 24 décembre 2021.

Par Daniel Grason

SOURCES : Arch. PPo. PCF rapport des Renseignements généraux du 29 novembre 1943, 77 W 3113-293378, GB 133 (transmis par Gérard Larue) GB 137 BS2. – Bureau Résistance GR 16 P 487.163. – État civil en ligne cote NICE : Naissances : 1908/2, vue 485. – Site internet Match ID.

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