CANE René

Par Stéphane Paquelin

Né le 20 janvier 1927 à Sanvignes-les-Mines (Saône-et-Loire), mort le 9 janvier 2001 à Saint-Vallier ; militant syndicaliste mineur et communiste, animateur de la grève des mineurs de 1948 à Montceau-les-Mines aux côtés d’Edmond Marc.

René Cané est né dans un milieu modeste en 1927. Son père italien, était arrivé à Sanvignes-les-Mines en 1922 après avoir fui le fascisme dans la mesure où ses convictions politiques étant très ancrées à gauche. Il fit ensuite venir celle avec qui il était déjà fiancé, qu’il épousa et qui allait lui donner deux enfants. Ancien combattant de la Première guerre mondial, gazé, il devait décéder à l’âge de 47 ans en février 1940. Ce décès remis en cause les projets de René Cané qui se préparait au concours d’entrée à l’école d’ingénieurs de la marine à Brest. Au lieu de cela, lui et sa mère entrèrent aux Houillères de Blanzy comme trieurs de charbon en juin 1941.
Rapidement, il manifesta son hostilité à l’égard des Allemands et de Vichy, notamment en exigeant de sa sœur qu’elle décroche la photographie du maréchal Pétain, puis en participant à la résistance. Il eut en effet connaissance de l’appel du général de Gaulle par l’intermédiaire d’un tract. Mais c’est à la fin du mois de novembre 1941 qu’il se signala réellement à l’attention des autorités : un mouvement de grève fut en effet déclenché qui toucha tous les puits sauf celui de Laugerette où il travaillait. Il parvint à faire cesser le travail dans l’atelier de criblage, paralysant ainsi toute l’activité du puits. Il fut bientôt arrêté, le 17 décembre avec une soixantaine de camarades, mais une manifestation de femmes à Montceau-les-Mines parvint à faire fléchir les autorités et lui et ses camarades furent relâchés.
Cette épisode ne fit que le renforcer dans ses convictions anti-allemandes et anti-vichyssoises tout en le poussant vers le Parti Communiste, lequel lui semblait le plus actif. Cette évolution n’allait pas de soit. En effet il était écartelé entre l’influence de sa mère, très pratiquante, et celle de son père. En l’absence précoce de ce dernier il devint dans un premier temps catholique convaincu, participant notamment activement aux activités du cercle catholique de Sanvignes. Toutefois il se détacha progressivement de ces convictions pour s’orienter vers d’autres horizons idéologiques. De fait, après l’épisode de la grève de 1941, il entra en contact avec un triangle qui le chargèrent de distribuer clandestinement des tracts. Il poursuivi ensuite son engagement dans la résistance et quelque mois avant le débarquement il était chargé de recruter des camarades qui étaient ensuite envoyés au bataillon Valmy des FTP. Il fit ensuite un passage par un maquis de l’Armée Secrète, puis fut intégré à la compagnie des gardes du général De Lattre de Tassigny. Il termina finalement la guerre en Allemagne sur les bords du lac de Constance.
Il rentra en France en 1945. En effet dans le cadre de la bataille du charbon, les engagés volontaires exerçant par ailleurs la profession de mineur pouvaient rejoindre leurs foyers. C’est donc à son retour aux Houillères de Blanzy, bientôt nationalisées, qu’il adhéra au Parti communiste français et par la même occasion à la CGT.
Durant l’année 1946, une fois passé l’euphorie de l’adhésion au thème de la bataille du charbon, le mécontentement se développa dans les rangs des mineurs, fondé sur des raisons aussi bien politiques que économiques. Il déboucha finalement sur un léger mouvement de grève qu’il pris en charge, ce qui lui valu par ailleurs un rappel à l’ordre de la part du Parti communiste et du principal dirigeant syndical mineur. Il joua également un rôle dans la grève de 1947, à la suite de quoi il fut élu secrétaire adjoint du syndicat des mineurs à la suite du congrès de la fin 1947. À l’âge de 21 ans il se trouvait donc en partie responsable d’une organisation qui regroupait à l’époque plusieurs milliers d’adhérents.
C’est dans ce contexte que survint la grève de 1948, une grève extrêmement violente, durant laquelle le bassin allait se trouver plongé dans une situation quasiment insurrectionnelle. De ce fait, à la suite d’affrontements durs entre les mineurs et les forces de l’ordre, la répression fut à l’aune des troubles et Roger Cané, avec Edmond Marc* une des principales victimes puisqu’il fut condamné à 1 an de prison ferme. Il est vrai qu’il militait alors au premier plan, tant sur le plan départemental puisqu’il était membre de la commission exécutive de l’union départementale CGT où il siégea au moins jusqu’en 1952, que sur le plan régional ou national. En effet il était secrétaire de la fédération régionale des mineurs et membre du conseil national de la jeunesse CGT. Il fut au bout du compte libéré par une mesure de grâce conditionnelle dix mois plus tard le 14 juillet 1949. Mais en juillet 1950 il participa à une manifestation en faveur de l’appel de Stockholm et fut mêlé à des affrontements avec la police. Une fois de plus arrêté avec deux autres camarades, sa grâce conditionnelle fut annulée et s’y ajouta une condamnation de 4 mois supplémentaires. Au total il demeura seize mois en prison.
A sa sortie, il ne put réintégrer la mine et connut une certaine instabilité professionnelle : d’abord marchand de vin sans grand succès, il entra ensuite aux forges de Gueugnon avant de se faire empbaucher dans une entreprise de Genelard chez Fournier Mouillon. Il s’y montra très actif, parvenant notamment à implanter fortement la CGT, mais son revenu étant pour le moins réduit et il éprouvait de réelles difficultés à faire vivre sa femme avec qui il s’est marié le 30 décembre 1950 et les trois enfants qu’elle lui avait donné. Finalement il put opérer un spectaculaire retournement de situation en obtenant en 1956 un emploi aux Travaux Souterrains, ce qui lui ouvrit une carrière dans les grands chantiers, notamment en Grèce et en Tunisie.
De retour en France en 1965, il travailla sur le chantier du RER. Il s’était alors installé en région parisienne, à Nanterre. C’est dans ces conditions qu’il prit part au mouvement de mai 1968, participant à la manifestation du 13 mai et faisant pavoiser de drapeaux rouges les grues du chantier où il exerçait les fonctions de chef de travaux et qui était en grève.
C’est seulement en 1974 qu’il revint à Sanvignes-les-Mines, travaillant sur un chantier situé dans les Houillères, comme ingénieur de travaux. Parallèlement il continua à militer, principalement dans le champ politique, puisqu’en 1977 il se présentait en tête de la liste communiste aux élections municipales à Sanvignes, un scrutin où il fut battu d’extrême justesse mais qui fut annulé pour fraude. Lors du nouveau scrutin il ne conduisait plus cette liste.
Depuis le milieu des années 1980 il s’engagea surtout dans les mouvements d’anciens combattants, en particulier l’ARAC qu’il avait relancé sur le plan départemental en 1985, en devenant secrétaire départemental dés 1986 puis président au début des années 1990 et membre du bureau national en 1993. Lors du congrès de 1997 il demanda qu’on lui retire cette dernière responsabilité pour des raisons de santé.

Pour citer cet article :
https://maitron.fr/spip.php?article228055, notice CANE René par Stéphane Paquelin, version mise en ligne le 21 mai 2020, dernière modification le 21 mai 2020.

Par Stéphane Paquelin

SOURCES : Archives de l’UDCGT de Saône et Loire. — Archives départementales de Côte d’Or, 1189W312. — Entretien avec René Cané, Mai 1999. — Renseignements de Jean-François Poujeade.

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