SZPEJTER Jakob, dit SPETER Jacques, dit RAVINE Jacques

Par Zoé Grumberg

Né le 16 février 1906 à Luck (aujourd’hui Loutsk, Ukraine), mort en juin 1984 à Paris ; employé, peintre en bâtiment, journaliste, comptable ; militant communiste en Pologne, en France et au Brésil ; résistant, responsable de la MOI ; responsable de l’UJRE.

À la naissance de Jakob Szpejter, la ville de Luck (ou Loutsk), se situait dans l’Empire russe, avant d’être intégrée à la Pologne après la Première Guerre mondiale. Il était originaire d’une famille juive. Son père Alter Szpejter était employé et sa mère Gitla Szpejter sans profession. Après des études secondaires, Jakob Szpejter fit une année d’études supérieures en électricité, avant d’exercer la profession d’employé de bureau. En 1926, à Luck, il rejoignit le Parti communiste. Il exerça les rôles de responsable syndical et secrétaire du parti de la ville de Luck de septembre 1926 à août 1927. Lors de son service militaire, en 1927-1928, il aurait mené des activités communistes. En 1929-1930, il fut responsable communiste pour la région de Luck. Dans le contexte de la répression contre le communisme en Pologne, il rejoignit la France en 1931.

En France, jusqu’en 1935, il fut secrétaire de l’organisation culturelle Kultur Lige à Paris. Peintre en bâtiment, il rejoignit le syndicat des peintres en bâtiment comme militant de base. En 1935, afin de retrouver de la famille, il se rendit au Brésil où il vécut deux années durant lesquelles il milita au PC brésilien. À son retour en France, il suivit une école du parti : l’école centrale des groupes juifs de la Main-d’œuvre immigrée (MOI), durant six semaines au début de l’année 1937. Il devint ensuite l’un des secrétaires des Amis de la Presse Nouvelle – Naye Prese (en français Presse Nouvelle), journal de la sous-section juive de la MOI – de 1937 à 1939.
Durant la période de la guerre, il exerça des responsabilités dans la MOI. De novembre 1939 à l’occupation en 1940, il fut responsable principal de la trésorerie des groupes clandestins juifs de la MOI à Paris. De 1940 à mai 1941, il fut secrétaire de l’organisation de résistance juive de Paris « Solidarité ». De mai 1941 à septembre 1943, il devint responsable du secteur juif de la MOI en zone sud. Il fut arrêté à Marseille en novembre 1941 et condamné à sept mois de prison pour usage de fausses pièces d’identité. Il parvint à sortir de prison grâce à l’aide de militants de Marseille, ce qui suscita la méfiance du parti après la guerre. À la suite de sa libération, il se rendit à Lyon et se remit à la disposition de la direction du groupe juif en zone sud. Envoyé à Paris pour une entrevue avec « Hervé » (Louis Gronowski, responsable national de la MOI clandestine) et Adam Rayski (responsable du travail juif) il fut renvoyé à Lyon avec la mission de remplacer Édouard Kowalski au poste de responsable de la MOI et du secteur polonais en zone sud. Il prit aussi en charge les questions techniques de la MOI en zone sud.

À l’issue de la guerre, de retour à Paris, Jacques Ravine continua son activité dans les groupements juifs du PCF. Il fut naturalisé français en 1947. Il était membre de l’Union des Juifs pour la Résistance et l’Entraide (UJRE) où il exerça le poste de secrétaire entre 1944 et 1947. Il fut aussi rédacteur à Naye Prese jusqu’en 1958. Amené à remplir un questionnaire biographique en 1948 il y écrivait qu’il estimait avoir plus de goût et d’aptitude pour « le travail d’étude et de rédaction sur des problèmes économiques et sociales (sic) et par conséquent militer dans les syndicats ». Dans ce même questionnaire, le responsable politique du groupe juif estimaot que Ravine avait une « bonne compréhension de la ligne du Parti » mais qu’il aurait une tendance au « sectarisme » dans l’application et qu’il s’adapterait « difficilement dans une organisation des masses (sic) ». Le souhait exprimé par Ravine aurait toutefois été entendu : dans son questionnaire de 1963, il décrivit en effet avoir été secrétaire de l’intersyndicale juive en 1947-1948. Une militante du secteur juif, Techka Tenenbaum, écrit quant à elle dans son questionnaire de 1950 que Ravine était toujours secrétaire de l’intersyndicale juive en 1950. Il aurait à ce titre été membre de la commission du secteur juif du PCF, en charge du travail syndical.

Entre 1947 et 1958, il milita dans la cellule 224 du IIIe arrondissement de Paris. En 1958, à la suite de différends, il quitta les organisations juives communistes et devint comptable au sein de quatre entreprises commerciales. Il continua toutefois à militer dans la cellule du PCF de son quartier jusque dans les années 1970, période à laquelle sa femme et lui n’auraient pas repris leur carte.

Jacques Ravine était marié à Macha Speter-Ravine (1909-1987), née à Zamosc. Née Wajser, comptable, puis finisseuse, elle était membre du PC. Résistante pendant la guerre, elle fut déportée à Auschwitz d’où elle revint. Le couple eut deux enfants : Denise (née en 1937), épouse Sévastos, étudiante en médecine devenue psychiatre et membre du PC, militante jusqu’en 1982 ; et Michel (1946-2007), membre des JC dans sa jeunesse. En 1973, Jacques Ravine publia l’ouvrage La Résistance organisée des Juifs en France (1940-1944). Il mourut à Paris en juin 1984. Il est enterré au Père Lachaise.

Pour citer cet article :
https://maitron.fr/spip.php?article228635, notice SZPEJTER Jakob, dit SPETER Jacques, dit RAVINE Jacques par Zoé Grumberg, version mise en ligne le 1er juin 2020, dernière modification le 9 décembre 2020.

Par Zoé Grumberg

ŒUVRE : En lutte contre l’ennemi nazi, Éditions Ofsnaï, 1970 (en yiddish). —La Résistance organisée des Juifs en France (1940-1944), Julliard, 1973.

SOURCES : Arch. du Comité national du PCF, dossier biographique. — Entretien téléphonique avec sa fille Denise Sevastos, janvier 2019. — Entretiens avec Julien Hirszowski, fils d’Israël Hirszowski dit Jacobi.

rebonds ?
Les rebonds proposent trois biographies choisies aléatoirement en fonction de similarités thématiques (dictionnaires), chronologiques (périodes), géographiques (département) et socioprofessionnelles.
Version imprimable