DOUMENC Georges, Émile, Gabriel

Par Hélène Chaubin

Né le 7 octobre 1925 à Montpellier (Hérault), mort en février 2019 ; journaliste ; résistant dans l’Hérault ; militant communiste, membre du bureau fédéral du Vaucluse et de l’Hérault, membre du bureau départemental de l’ANACR.

Georges Doumenc
Georges Doumenc
Détail d’une photographie collective, prise en 1944 à Béziers, des membres du "maquis de Bédarieux (Hérault)". C
Communiqué par Christian Guiraud

Marcel Doumenc, le père de Georges Doumenc, était ajusteur à Montpellier où le grand-père paternel de Georges avait fondé un atelier de mécanique qui fonctionna jusqu’à la crise de 1933. Sa mère, Madeleine Castan, était lingère et brodeuse. Il avait une sœur, Marcelle, née en 1927.

Les influences familiales reconnues par Georges Doumenc furent une éducation protestante et la tradition du patriotisme. Adolescent, il appartint aux « Éclaireurs unionistes », une organisation membre de la fédération protestante de France, dont le logo était alors orné d’un coq (un insigne interdit ensuite par Vichy). Georges Doumenc retint aussi dans l’histoire familiale le personnage de son arrière-grand-père maternel, Simon Carabasse, ouvrier à Bédarieux sous le Second Empire, qui avait échappé de peu à la répression qui suivit le coup d’État du 2 décembre 1851 : en effet, il appartenait à une société républicaine secrète où il exerçait des responsabilités avec le titre de « centurion ». Une centurie regroupait plusieurs sections de moins de 10 personnes. Faire partie de ce type d’organisation signifiait le risque de déportation en Algérie.

Lycéen à Montpellier en 1936, où certains de ses amis portent des bagues décorées des trois flèches de la SFIO, Georges Doumenc s’en procura une autre avec le dessin de la faucille et du marteau. Mais il est évident que c’est le temps de la Résistance qui infléchit définitivement les choix et les convictions de Georges Doumenc. Il adhéra en 1944 au Parti communiste et fit partie du bureau fédéral de l’UJRF.

Pendant la guerre, il avait distribué l’Humanité clandestine, des tracts, et rejoint à la fin de 1943 le maquis FTPF du Bousquet d’Orb, celui de Vernazoubre, qui compta environ 150 hommes en 1944. Les ouvriers y côtoyaient quelques lycéens et étudiants. Parmi ces derniers, Louis Marres, le fils de Paul Marres, professeur de géographie à la faculté des Lettres de Montpellier, qui était l’un des responsables régionaux du Front national.
Les maquis des hauts cantons de l’Hérault furent traqués par les Allemands jusqu’en juillet 1944. En août, ils se livrèrent à des combats de retardement dans la plaine en attaquant les colonnes allemandes qui faisaient retraite d’ouest en est vers la vallée du Rhône. Louis Marres fut tué le 21 août 1944 près de Faugères. Georges Doumenc compta parmi les maquisards qui convergèrent ensuite sur Montpellier trois jours plus tard. Il avait le grade de lieutenant dans les FTPF. Les Allemands avaient évacué Montpellier et Béziers les 21 et 22 août. L’Hérault avait été libéré sans intervention directe de forces régulières. Le colonel De Chambrun, qui commandait les FFI et parlait de révolution, établit avec eux un pouvoir militaire, policier et judiciaire avec lequel les pouvoirs civils durent composer. Georges Doumenc était à Béziers dans la Brigade légère du Languedoc, formée à la fin du mois d’août. Il portait un béret à étoile rouge. Gilbert de Chambrun refusait le projet d’absorption des bataillons FFI de la R3 dans l’armée du général De Lattre. Pourtant, l’amalgame devait se faire. Georges Doumenc partit avec les FFI mis à la disposition de l’armée par décret du 9 décembre 1944. Ils rejoignirent la 1re armée près de Besançon et firent route vers la forêt de la Hardt en Alsace. Georges Doumenc ne fut pas de ceux qui combattirent jusqu’à la capitulation allemande car il fut envoyé trois mois avant l’armistice à l’école des cadets d’Aix-en-Provence. Il y fut ramené au grade de sergent et eut à subir les arrêts de rigueur pour avoir diffusé Rouge Midi. Il alla ensuite rejoindre dans le Tyrol les forces d’occupation. À la demande de Paul Marres, son futur beau-père, André Diethelm alors ministre de la Guerre facilita sa démobilisation et son retour à Montpellier en 1946. Il put y reprendre ses études et passer le baccalauréat.

Attiré par la marine marchande, Doumenc fréquenta pendant deux ans l’école de navigation à Nice. Puis il entra à la faculté des sciences de Montpellier. Au bout d’un an, il interrompit ses études, et commença à travailler en 1946 comme employé à la Caisse d’assurances mutuelles agricoles. C’est en 1947 que débuta sa carrière de journaliste à La voix de la Patrie qui était l’organe du comité du Front national de l’Hérault. Il y resta jusqu’à la disparition de ce journal en 1953. Il devint alors le responsable de l’agence de La Marseillaise de Montpellier. Il avait épousé le 30 octobre 1947 Paule Marres, la fille de Paul Marres. Tous deux étaient membres du Parti communiste depuis 1944 et Paule Marres avait été élue conseillère municipale à Montpellier en 1947. Le couple eut quatre enfants : Luc, architecte à Montpellier, né en avril 1946 ; Michel, journaliste à l’Humanité, né en août 1947 ; Sylvie, inspecteur des PTT, née en décembre 1948 ; Laure, architecte dans la région parisienne, née en mai 1951.

Paule Doumenc était professeur de Français. Quand elle fut nommée dans le Vaucluse, son mari prit la tête de l’agence de La Marseillaise à Avignon où tous deux séjournèrent jusqu’en 1964. Ils retournèrent alors à Montpellier où Georges Doumenc reprit la direction de l’agence de La Marseillaise, poste qu’il conserva jusqu’à sa retraite en 1981. Dans cette période, il se rendit à deux reprises à une école d’un mois organisée à l’intention des journalistes communistes à Viroflay, en 1966 et en 1968. Il était entré en 1957 au bureau de section de Montpellier ouest et au comité fédéral. Pendant son séjour à Avignon, il fut membre du bureau fédéral du Vaucluse, puis, de retour à Montpellier, il intégra le comité fédéral de l’Hérault en 1965, puis le bureau de 1966 à 1981. Il fut également secrétaire du comité de ville de Montpellier qui recouvrait toutes les sections : dans cet intervalle d’une quinzaine d’années, le nombre des adhérents passa de 800 à 2400. Georges Doumenc préféra demeurer journaliste plutôt que de devenir permanent comme cela lui fut proposé en 1966. En tant qu’ancien combattant et résistant il appartenait aussi au bureau départemental de l’ANACR de l’Hérault.

Resté fidèle à son parti depuis 1944, il s’est cependant en 2008 « mis en congé du parti en attendant le prochain congrès ». Georges Doumenc n’a jamais renoncé à une attitude critique tant vis-à-vis des dirigeants (depuis Georges Marchais), que des politiques choisies. Il se définit comme « un refondateur objectif ». Il a regretté l’abandon de la ligne révolutionnaire en faveur d’une « ligne opportuniste », et condamné les choix de Marie-Georges Buffet et de la direction du Parti communiste. Il avait salué le processus d’union qui aboutit à l’entrée de quatre communistes au gouvernement de Pierre Mauroy en 1981. Son espoir d’un rassemblement des gauches en 2007 a été déçu. Après l’échec de 2007, il s’est rapproché des « Collectifs unitaires pour une alternative au libéralisme » et a milité contre le traité de Lisbonne.

Il a toujours jugé indispensable le rassemblement des gauches, même s’il a blâmé la Ligue communiste révolutionnaire pour son refus des responsabilités.

Il a manifesté la même capacité critique après avoir voyagé dans certains pays de l’espace communiste : URSS, Cuba et Vietnam. Par exemple en stigmatisant l’usurpation du pouvoir par une nomenklatura qui, selon lui, conduisit à l’échec la politique du dernier chef d’état de l’URSS, Mikhaïl Gorbatchev.

Pour citer cet article :
https://maitron.fr/spip.php?article22915, notice DOUMENC Georges, Émile, Gabriel par Hélène Chaubin, version mise en ligne le 25 octobre 2008, dernière modification le 1er septembre 2020.

Par Hélène Chaubin

Communiqué par Christian Guiraud "> Georges Doumenc
Georges Doumenc
Détail d’une photographie collective, prise en 1944 à Béziers, des membres du "maquis de Bédarieux (Hérault)". C
Communiqué par Christian Guiraud

SOURCES : Arch. comité national du PCF. — Arch. Dép. Hérault, 138W21, direction de la Sécurité, Montpellier, octobre et novembre 1944, 138W17, rapport du préfet, décembre 1944. — Entretiens et correspondance avec Georges Doumenc en mai 2008 à Montpellier. — Presse locale. — Lieutenant Colonel Michalon, « L’amalgame FFI- 1re armée », Colloque de Paris, éd. ministère de la Défense, 1974, p. 35. — Hélène Chaubin, « De la Libération à la paix, les pouvoirs locaux face à la problématique du département de l’Hérault », Colloque de Millau, octobre 1998, CDDP de l’Aveyron. p.41-47. — Gérard Bouladou, L’Hérault dans la Résistance, Lacour éditeur, Nîmes, 1992, 242 p. — Gilbert De Chambrun, Journal d’un militaire d’occasion, Les presses du Languedoc, Montpellier, 2000, 190 p. — Jacques-Augustin Bailly, La Libération confisquée, le Languedoc, 1944-1945, éd. Albin Michel, Paris, 1993, 481 p.

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