Par Antoine Olivesi
Né le 10 décembre 1894 à Maillane (Bouches-du-Rhône), mort le 18 janvier 1991 à Saint-Rémy-de-Provence (Bouches-du-Rhône) ; instituteur ; militant au syndicat des instituteurs, secrétaire général de la Ligue antifasciste de Saint-Rémy-de-Provence (Bouches-du-Rhône), adhérent du mouvement Amsterdam-Pleyel ; coopérateur ; conseiller municipal entre autres de Saint-Rémy ; auteur de manuels pédagogiques et de méthodes pour enseigner le provençal.
Camille Dourguin était issue d’une famille de tradition républicaine, exemple rare dans une commune farouchement « blanche ». Son père, Marius Bouurguin, paysan puis facteur des postes, était un militant radical-socialiste, ami du député radical d’Arles, Henri Michel ; il avait en particulier longtemps présidé la société locale « rouge » de secours mutuel, « La Prévoyance ». Sa mère, Marie Daillan, cuisinière, appartenait à une famille paysanne républicaine.
Camille Dourguin fit ses études à l’école primaire supérieure d’Arles, puis, de 1910 à 1913, à l’École normale d’Aix-en-Provence, où il obtint le brevet supérieur. Instituteur, il fut affecté à Eyragues en 1913. En 1914, il fut mobilisé et le resta jusqu’en 1919 (grade final : adjudant). En 1919, il fut nommé à Saint-Rémy-de-Provence, où il resta instituteur (et membre du Syndicat des instituteurs) jusqu’à sa retraite en 1953.
Sous l’influence de Joseph Mauron*, qui avait été son directeur à l’école de Saint-Rémy, il anima, en tant que secrétaire général, la ligue antifasciste de Saint-Rémy, de 1934 à 1936. En compagnie de Charles Mauron*, il s’occupa activement du Comité de Front populaire Saint-Rémois, et fit paraître pendant deux ans un bulletin mensuel ronéotypé, Le Front populaire Saint-Rémois qui devint ensuite, pour quelques numéros seulement, Le Front républicain Saint-Rémois, pour soutenir l’action de la municipalité dirigée par Joseph Mauron, à l’élection de laquelle il avait largement participé en 1935. Adhérent du mouvement Amsterdam-Pleyel, il participa aux réunions de juillet 1936 du Comité de Vigilance des Intellectuels antifascistes, Camille Dourguin occupa, pendant la guerre d’Espagne, le poste de trésorier du Mouvement d’Aide Saint-Rémois aux républicains espagnols (son épouse Hélène, institutrice également, étant secrétaire du comité féminin correspondant).
S’il ne fut pas inquiété pendant l’Occupation, Camille Dourguin figurait néanmoins en bonne position (3e rang) sur la liste des otages possibles pour Saint-Rémy, que l’on découvrit à la Libération.
Délégué (depuis 1928) puis administrateur (de 1963 à 1969) de « La Ruche Cavaillonnaise » (Union des Coopérateurs de Provence), responsable d’une remarquable gestion des cantines scolaires Saint-Rémoises, Camille Dourguin déploya son activité sociale dans le cadre de la gestion communale, de 1947 à 1959, en tant que conseiller municipal « indépendant » (il refusa toujours d’adhérer à un parti politique) dans les municipalités présidées par son ami Charles Mauron.
Depuis toujours, Camille Dourguin vouait à la langue provençale une grande affection, doublée d’une grande admiration pour l’œuvre de Frédéric Mistral, son compatriote de Maillane : il était allé, dans sa jeunesse, lui rendre visite pour un exposé qu’il devait faire à l’École normale d’Aix sur Mirèio ; en octobre 1913, lorsque Raymond Poincaré, président de la République, était venu à Maillane saluer Mistral, Camille Dourguin avait fait partie de l’orchestre improvisé de « jeunes républicains » qui avait joué « La Marseillaise » devant la maison du poète (la fanfare de Maillane, aussi bien que le conseil municipal, royalistes, ayant refusé de recevoir le président de la République). Lui-même écrivain de récits provençaux, Camille Dourguin se consacra, à partir de 1945, à son œuvre essentielle : la pédagogie du provençal, et le développement d’un enseignement du provençal officiel. En 1946, il créa avec Charles Mauron l’association pédagogique « Lou Prouvençau à l’Escolo », pour regrouper les enseignants de provençal : il en assuma le secrétariat général, et, de 1952 à 1970, en dirigea le bulletin de liaison. Auteur d’enregistrements à caractère pédagogique, de plusieurs ouvrages scolaires (dont on trouvera la liste ci-dessous), notamment du classique livre de lecture Lou Prouvençau à l’escolo, publié en collaboration avec Charles Mauron en 1952, et constamment réédité depuis, Camille Dourguin ne cessa d’exercer ses activités militantes comme pédagogiques avec modestie et dévouement.
Par Antoine Olivesi
ŒUVRE : Souvenirs, récits en provençal (notamment dans La Mount-Joio de Sant-Roumié, Florilège des écrivains de Saint-Rémy, 1973) ; articles, comptes rendus, etc. (collection du bulletin Lou Prouvençau à l’escolo) ; disques : Initiation à la lecture du provençal, Linguaphone ; Initiation à la lecture du provençal et Quelques contes de Roumanille, disques publiés par l’association pédagogique Lou Prouvençau ; ouvrages : Pèr aprene à legi lou prouvençau ; en collaboration avec Ch. Mauron, Lou Prouvençau à l’escolo, livre de lectures (1re éd. : 1952, puis 1958, 1966, 1970, 1973, 1976) ; avec Ch. Rostaing : Morceaux choisis des « Memori e raconte » de Mistral (1971) ; Morceaux choisis des œuvres provençales de Joseph d’Arbaud (1974).
SOURCE : Renseignements fournis par le militant en réponse au questionnaire.