SÉCHAUD Lucien André Jean

Par Daniel Grason

Né le 13 octobre 1906 à Paris (XIXe arr.), mort le 17 juin 1944 à Mauthausen (Autriche) ; chauffeur de taxi, manœuvre ; communiste ; résistant ; déporté.

Fils d’Alphonse, quarante-quatre ans, commis principal et de Elisa Aschlgen, trente-six ans. Lucien Séchaud obtint à l’issue de sa scolarité le CEP. Il exerça la profession de chauffeur de taxi. Il épousa le 15 novembre 1934 Rosalie Rovo en mairie de Bruay-sur-Escaut (Nord). Le couple habitait 3, square Jules-Cheret à Paris (XXe arr.). Il adhéra au Parti communiste en 1935, fut membre de la cellule 2048 de la porte de Montreuil. Il a été quelques mois trésorier de la cellule.
De la classe 1926, recrutement d’Annecy en Haute-Savoie, il a été mobilisé le 2 septembre 1939 au dépôt de Bourg. Il fut affecté au VIe bataillon alpin de forteresse. Il a été démobilisé le 25 juillet 1940 par le centre de Montmélian arrondissement de Chambéry en Savoie. Membre du Parti communiste, après l’interdiction de l’organisation prise par le décret-loi du 22 septembre 1939, ses convictions demeuraient intactes.
De retour en région parisienne, il regagna son domicile. Chômeur, il alla travailler à Athis-sous-Laon dans l’Aisne. Il travailla en qualité de chauffeur-livreur aux établissements Foulon et Peuchet au 27 rue de la Grange-aux-Belles à Paris (Xe arr.). Sa femme mourut, il alla habiter chez sa sœur au 166 rue de Charonne à Paris (XIe arr.).
En janvier 1943, embauché chez Szekely, 321 rue du faubourg Saint-Antoine à Paris (XIe arr.), il fut envoyé à Barfleur dans la Manche où il travailla jusqu’à la mi-mars. Sa mère étant malade et hospitalisé à Domfront dans l’Orne, il alla lui rendre visite. De retour à Barfleur il était informé de son décès. Il s’occupa des obsèques qui eurent lieu à Paris.
Au début avril 1943, il décida d’entrer dans les FTP, il rendit visite à un ancien camarade de sa cellule Ferreira qui vivait 2 square du Périgord dans le XXe arrondissement. Il lui demanda de le mettre en contact avec un responsable. Il rencontra « Ferry » le « Militaire » du groupe dont il devait être membre.
Quelques jours plus tard, il rencontra un responsable des cadres un après-midi derrière l’église Saint-Vincent de Paul où il fit part de ses motivations. Le groupe Victor-Hugo dépendait de la région P 2. Lucien Séchaud avec d’autres FTP eurent pour mission de récupérer des armes sur des soldats allemands. Les FTP disposaient d’un revolver et d’une matraque.
Lucien Séchaud participa à plusieurs opérations en compagnie de « Jacques », « Ferry », « Joseph », « Champion » et « Julien ». Toutes les tentatives furent des échecs. Il loua un garage au 103 boulevard Lefevre dans le XVe arrondissement, puis fut chargé de voler un véhicule.
« Ferry » l’informa le 3 mai que V… le patron d’un café « avaient fait arrêter quatre camarades, dont deux auraient été fusillés et qu’il était sur le point d’en dénoncer d’autres. » En conséquence « V… devait être exécuté », Lucien Séchaud fut désigné pour exécuter la sentence. Il repéra les lieux et l’itinéraire de repli dès le lendemain, « Jacques » assurerait sa protection.
Lucien Séchaud et une femme du groupe allèrent consommer au café « La Marquise » le 5 mai pour repérer les lieux. La femme lui désigna le patron. Le 6 mai 1943 à 10 heures à l’angle des rues de Charonne et de la rue des Boulets à Paris (XIe arr.), « Jacques » lui remettait une mallette, à l’intérieur : une mitraillette, deux chargeurs, deux pistolets, deux grenades, une matraque et une clef anglaise. Il alla à son domicile, vérifia le contenu.
À 15 heures, armé il se rendait à la station Saint-Maur et rencontrait deux membres du groupe. Il remettait à « Jacques » un pistolet et une grenade, lui-même portait un armement similaire.
Lucien Séchaud accompagné d’une femme qui portait un enfant dans ses bras rentra dans le débit de boissons La Marquise au 131 rue Saint-Maur à l’angle de la rue d’Angoulême (Jean-Pierre Timbaud) à Paris (XXe arr.). Au comptoir, ils commandèrent deux Vichy, peu après alors que le propriétaire venait de remonter de la cave, Séchaud tira deux coups de feu sur Georges V… propriétaire, grièvement blessé l’homme tomba à terre. Blessé il a été emmené à la clinique des Bluets.
Deux gardiens de la paix se lancèrent à la poursuite, Séchaud emprunta la rue Saint-Maur vers la rue des Trois Couronnes tira mais son arme s’enraya, il jeta son pistolet à terre. Rue du Faubourg du Temple, il lança une grenade Mills en direction des policiers… mais elle n’explosa pas, il fut arrêté.
Fouillé il portait sur lui un carnet de rendez-vous, un faux certificat de travail et une quittance de loyer d’un garage situé 105 boulevard Lefebvre à Paris (XVe arr.). Interrogé, il déclara avoir rejoint un groupe de FTP le 15 avril 1943 par l’intermédiaire d’Antoine Ferreira.
Le chef du groupe « Ferry » lui avait donné l’ordre de tuer Georges V… qui était tenu responsable de l’arrestation des auteurs de l’attentat contre Marcel Capron ex-député communiste qui avait rompu et créé avec Marcel Gitton le Parti ouvrier et paysan français (POPF).
Lucien Séchaud était hébergé par sa sœur, les policiers perquisitionnèrent, ils découvraient dans une mallette une mitraillette et deux chargeurs garnis, deux grenades, deux pistolets automatiques calibre 7,65 mm de marque Savage, une clef à molette, un morceau de câble électrique. Plusieurs documents dactylographiés qui concernaient les FTP « Pour aller de l’avant », une circulaire d’instruction technique sur le matériel, une feuille de papier sur laquelle figurait au recto des instructions sur l’emploi des engins incendiaires et au verso un schéma de destruction de voies ferrées.
Interrogé le 6 mai, il déclara que la mallette lui avait été remise par « Jacques », celui-ci était chargé de la protection lors de l’attentat contre le propriétaire du débit de boisson. Lucien Séchaud a été frappé à de plusieurs reprises lors de son interrogatoire.
Il déclara être appointé 2 000 francs par mois plus les frais et des tickets d’alimentation. « C’était la première fois que j’étais en possession d’armes » déclara-t-il « J’avais consenti à prendre la mallette en garde à condition que celle-ci ne demeure chez moi que quelques heures car j’affirme que ma sœur ignorait tout de mon activité et je ne désirais pas qu’elle trouve les armes à mon domicile. » Il affirma : « Je n’ai participé à aucun autre attentat. » Il indiqua que son taxi était garé dans un box à Montreuil-sous-Bois (Seine, Seine-Saint-Denis).
Georges V… mourut le 7 mai à 5 heures du matin, son corps fut emmené à l’amphithéâtre de l’hôpital Saint-Louis. Le foie avait été touché et les intestins perforés. Les policiers allèrent à Montreuil-sous-Bois vérifier si le taxi de Lucien Séchaud y était. Rien ne fut saisi, l’un nota que le « véhicule semble hors d’usage ». Rouxel et Ancelin qui participèrent à l’attentat contre Capron étaient emprisonnés à Fresnes, un inspecteur leur présenta le 7 mai la photographie de Lucien Séchaud, ils affirmèrent ne pas le connaître. L’analyse balistique par le Service de l’identité judiciaire de l’arme utilisée par Lucien Séchaud démontra qu’ « Aucun de ces projectiles ne présente de point commun avec les balles et douilles examinées lors des attentats antérieurs. »
Des tickets d’alimentation détenus par Lucien Séchaud avaient été volés au Centre de distribution des titres de rationnement d’Asnières (Seine, Hauts-de-Seine). Une confrontation eut lieu le 11 mai entre Lucien Séchaud et Andrée M… et Lucie G… qui habitaient Asnières et y travaillaient. Lors de la confrontation elles ne reconnurent pas Séchaud, une troisième employée s’était évanouie. Le chef de Secteur de la mairie également présent précisa qu’ils étaient deux, l’un armé d’une mitraillette qu’il n’avait pas vu distinctement et un autre « que j’ai aperçu était armé de deux parabellums. Il semblait très ému et tremblait. » Deux gardiens de la paix étaient de faction, le premier fit des descriptions physiques plus détaillées qu’il résuma : « le premier avait plutôt le genre ouvrier, le second plutôt type du milieu. » Le deuxième gardien affirma « Ce n’est pas l’un des assaillants ».
Lucien Séchaud et Antoine Ferreira ont été incarcérés à la prison de Fresnes, et mis à la disposition de la Sipo- (police de sûreté) – SD IV (Service de sécurité), qui comprenait la section IV A la Gestapo au 11 rue des Saussaies à Paris (VIIIe arr.).
Comparut-il devant la Section spéciale ? Son nom ne figura pas sur les listes de déportés de la Fondation pour la Mémoire de la Déportation. Sur son acte de naissance a été inscrit « Décédé le 17 juin 1944 à Mauthausen (Autriche). » Lucien Séchaud n’a pas été homologué.

Pour citer cet article :
https://maitron.fr/spip.php?article229449, notice SÉCHAUD Lucien André Jean par Daniel Grason, version mise en ligne le 20 juin 2020, dernière modification le 20 juin 2020.

Par Daniel Grason

SOURCES : Arch. PPo. 221 W 8, rapport des Renseignements généraux du 10 mai 1943, BA 1748, 77 W 660-218574. – Bureau Résistance (pas de dossier). – État civil numérisé Paris XIXe arrondissement 19N 228 acte n° 2177.

rebonds ?
Les rebonds proposent trois biographies choisies aléatoirement en fonction de similarités thématiques (dictionnaires), chronologiques (périodes), géographiques (département) et socioprofessionnelles.
fiches auteur-e-s
Version imprimable